Maires ruraux de Saône-et-Loire
Les mille missions des maires ruraux

Cédric Michelin
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Samedi 16 septembre, à Martigny-le-Comte, l’Union des maires des communes rurales de Saône-et-Loire tenait son assemblée générale avec un changement de nom, de nombreuses revendications et deux tables rondes sur la loi Zéro artificialisation nette (ZAN) , et la loi AER, voulant accélérer les énergies renouvelables (dans notre prochaine édition). Mais avant, les maires ruraux ont nombre de défis du quotidien à résoudre.

Les mille missions des maires ruraux

Avec 335 cotisants sur les quelque 550 communes rurales de Saône-et-Loire, « soit deux communes sur trois », l’UMCR71 continue de rassembler largement. Pas de quoi se reposer sur ses lauriers pour autant, semblait dire son président, Jean-François Farenc qui cherche toujours à « avoir au bureau au moins deux maires ruraux par bassin » de vie pour avoir une vision globale du département. Au passage, les membres du bureau sont portés à 15 (contre 11 auparavant), « tous bénévoles et de toutes sensibilités » politiques. Autre résolution votée à l’unanimité, le changement de nom. L’UMCR71 va « revenir » à l’Association des maires ruraux 71. « C’est plus aisé à identifier, avec l’association nationale et c’est déjà dans le langage courant de nos concitoyens », expliquait Jean-François Farenc.

Le président interpellait ensuite le préfet et les parlementaires présents – les sénateurs Mercier, Durain et Genet et les députés Corneloup et Rebeyrotte – pour « assurer l’égalité urbains-ruraux » en termes de dotation forfaitaire par habitant qui « varie du simple au double », donc « bien trop en défaveur du monde rural ». Le président des maires ruraux de France, Michel Fournier enfonçait le clou et réaffirmait haut et fort qu’il n’y a « pas de petits maires. Nous sommes tous des maires quelle que soit la taille de notre commune », surtout lorsqu’on sait que la ruralité compte 33 % de la population et occupe 88 % du territoire Français !

 

Harcèlement

 

Si l’association sait compter sur ses partenaires – Département et Groupama en tête -, l’UMCR71 vient en aide aux maires ruraux sur des dossiers juridiques principalement. Car si personne ne doute de l’implication des maires ruraux, ces derniers sont confrontés à une administration croissante, voire des plaintes et agressions à leur encontre. Le maire des Bizots, Jean-Paul Luard venait d’ailleurs à la tribune témoigner sur « ce qui peut vous arriver demain », lui qui s’est retrouvé en première ligne dans « l’affaire Maël », du nom de cet enfant harcelé à l’école. Il fut en retour « harcelé » pour avoir tenté d’aider. Pire, il n’a pas senti de soutien des pouvoirs publics, rencontrant même « beaucoup de difficultés avec l’Éducation nationale », se plaignait-il aux représentants de l’État. Les 150 maires dans la salle lui témoignaient leurs pleins soutiens et Jean-François Farenc les encourageait à poursuivre les « bonnes relations » avec les gendarmes. Il déplorait en revanche que « beaucoup de plaintes soient non suivies de faits » du côté de la justice, prenant date avec Yves Séguy, pour « relancer » les procureurs des tribunaux de Mâcon et Chalon. La maire de Genouilly, Christelle Jandot, rebondissait sur la question du statut du maire. « Je subis le harcèlement d’une personne ayant des troubles mentaux qui n’est pas suivi par le moindre établissement ou hôpital. Il tague la mairie et mon domicile, m’insulte… et mes plaintes sont classées sans suite comme si la justice attendait que quelque chose de grave arrive », ne peut-elle tolérer, faisant écho à l’actualité. Le président national, Michel Fournier, a semble-t-il obtenu du ministre de la Justice que plus aucun dépôt de plainte d’un maire « ne soit plus classé sans suite ». L’UMCR71 ne manquera pas d’en faire part aux procureurs, tout comme le préfet aussi. Yves Séguy rappelle d'ailleurs que la première liberté est celle de la sécurité publique.

Succès des Maisons France Service

Heureusement, ce n’est pas l'essentiel du quotidien d’un maire rural, qui aime la proximité avec les habitants et les commerçants de son village. En revanche, la bureaucratie et la lourdeur des dossiers administratifs ou techniques restent pesantes. « Notre ingénierie communale débute avec les secrétaires de mairie mais les dossiers restent éparpillés dans les collectivités et les services », témoignait Jean-François Farenc, lui-même maire de Blanot. Il conduit un travail avec l’Agence technique (ATD71) pilotée par le Département, qui se fait « fort de répondre dans des délais raisonnables ». Mais les réglementations, lois, fonds… nécessitent toujours plus « d’ingénierie et éléments techniques à fournir », loin de la simplification promise depuis des décennies. Loi ZAN, loi AER, Fonds verts, EnVie, Villages d’avenir, Cœur de ville… le millefeuille français ne s’est pas simplifié.

Pour l’heure, la principale réussite de l’État semble être les Maisons France service qui se vérifient sur le terrain « à moins de 20 minutes » de chaque habitant de la campagne, afin de les aider dans leurs démarches administratives ou numériques par exemple.

Craintes autour de l’accès aux soins médicaux

Le président du Conseil départemental, André Accary, donnait rendez-vous aux maires pour les désormais traditionnelles réunions des territoires « pour présenter les dispositifs d’aides » ou les avancées de l'Internet à très haut débit. Alors que la Saône-et-Loire est le 6e plus grand département de France, l’accès au soin est vital. Le Département « redouble d’efforts pour recruter encore plus de médecins » dans ses Centres de santé. Mais André Accary se montrait inquiet pour l’avenir qui « hélas, va se dégrader ». « À la profession médicale aussi de se mettre autour de la table, depuis la formation jusqu’aux grands plateaux techniques », qu’apprécient, pour leur confort et leur efficacité, les médecins des villes.

La députée et conseillère départementale Josiane Corneloup, qui est également présidente de l’Association nationale des pôles territoriaux et des pays (ANPP), se disait également « catastrophée de voir l’Agence régionale de santé (ARS) reconcentrer les hôpitaux » depuis la loi Rist. « Une détresse absolue s’installe dans les populations », selon elle, faute de ne pouvoir renouveler une ordonnance. En effet six millions de Français n’ont plus de médecins traitants et la loi « Grand âge » ne cesse d’être reportée...

Feux de forêts et pénuries d’eau ?

André Accary concluait néanmoins sur un autre défi pour nos territoires ruraux, celui du changement climatique « bien réel ». Le département voit son risque d’incendies de feux de forêts augmenter, d’où l’arrivée d’engins et de renforts chez les pompiers pour être déployés dans nos 230.000 ha de forêts, « dont beaucoup de feuillus », ou dans d’autres départements en cas de besoin. Pour éviter que les friches, inflammables, ne se développent, le président de la FDSEA, Christian Bajard, invitait les maires ruraux et tous les élus (parlementaires…) à signer un manifeste national qui sera remis au ministre de l’Agriculture, au Sommet de l’élevage, pour lui enjoindre de mieux soutenir la filière.

En conclusion, le Préfet Séguy assurait les maires de « sa grande détermination » pour accompagner les maires à réaliser leurs projets, quitte à « utiliser des dérogations, voire faire des expérimentations » si besoin. Il lançait d’ailleurs un pavé dans la mare avec un autre sujet « cardinal et dimensionnant » : l’eau. Les Assises départementales sur ce sujet se tiendront mardi 10 octobre. « Un sujet extrêmement complexe avec des réseaux à revoir, des industries devant consommer moins… », considérant la Saône-et-Loire « plus vulnérable qu’on ne l’imagine ».