FRSEA Bourgogne Franche-Comté
La Dreal « rame à contrecourant »

Cédric MICHELIN
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À l’heure où plus que jamais la gestion de l’eau doit se faire au plus proche des besoins des territoires (lire aussi en page HH), l’administration semble vouloir faire l’inverse en régionalisant notamment les Comités sécheresse. La FRSEA Bourgogne Franche-Comté a écrit au préfet de région pour dénoncer l’absence de concertation qui fait courir à tous de gros risques à l’heure des sécheresses à répétition. Voici le courrier in extenso du président de la FRSEA, Christophe Chambon.

La Dreal « rame à contrecourant »
La carte régionale BFC proposée par la Dreal pour gérer 54 secteurs...

Monsieur le Préfet,
Nous apprenons, par les départements, que la Dreal propose un arrêté relatif à la mise en place de principes communs de vigilance et de gestion de la ressource en eau en période d’étiage.
Nous sommes surpris de ne pas avoir été consultés en amont pour ce projet qui concerne directement l’agriculture. Cela aurait eu le mérite de supprimer les grossières erreurs techniques, tout en évitant un climat d’inquiétude peu propice à la concertation.
L’enjeu premier est de trouver des solutions équilibrées pour tous les secteurs y compris pour les entreprises agricoles qui viennent de subir trois années de sécheresse consécutives.
Les agriculteurs, directement concernés, sont tout à fait sensibles aux problèmes liés au changement climatique et restent vigilants sur la préservation des ressources en eau.
Toutefois, ils ne pourront pas accepter un projet d’arrêté qui ne tient aucunement compte de leurs contraintes, qui pénalise fortement l’agriculture au détriment d’autres activités, qui fragilise les systèmes collectifs, qui remet en cause l’équilibre financier de nombreuses exploitations, tout en proposant des dispositifs inefficaces.
Compte tenu des enjeux, il est illusoire de penser que seules des mesures de restrictions ou d’interdiction permettront d’apporter des réponses opérationnelles aux menaces qui pèsent sur la ressource en eau.
Aussi, concrètement, les secteurs de surveillance hydrologiques proposés agglomèrent des cours d’eau qui ne sont pas directement reliés les uns aux autres : les bassins versants sont coupés en deux et tout cela en considérant que les fluctuations de niveau des eaux de surface sont directement corrélées à celui des eaux souterraines ; ce qui est tout de même très simpliste comme approche.
Les bassins hydrogéologiques, présentés sur la carte annexée au texte, n’ont aucun lien avec la réalité des nappes phréatiques. Avec les données scientifiques dont on dispose aujourd’hui, ce projet d’arrêté mérite une sérieuse expertise supplémentaire avant d’être définitivement retenu.
Par ailleurs, la surveillance de la fluctuation des nappes ne fait référence qu’à trois ou quatre piézomètres non représentatifs des nappes alors que les associations syndicales autorisées de la Loue et du Doubs en ont une vingtaine et que, jamais, il n’y est fait référence.
Nous sommes aux premières loges pour constater les effets du dérèglement climatique.
Pour autant, est-ce une raison valable et suffisante pour condamner des productions génératrices de valeur ajoutée et d’emploi dès le premier niveau d’alerte ?
Car c’est bien de cela qu’il s’agit :

- interdire l’irrigation par aspersion en journée, de 10 heures à 20 heures, dès le premier niveau de restriction, y compris pour les légumes de plein champ, le maïs semence et le soja ou les surfaces fourragères de sécurité, revient à fragiliser et à condamner un pan entier de notre agriculture.

- Interdire l’irrigation du samedi 10 heures au dimanche 20 heures, en période d’alerte renforcée relève de la méconnaissance totale des pratiques de l’irrigation et de son organisation.

La Dreal rame à contrecourant en proposant des textes qui vont créer plus de contentieux qu’apporter des réponses. Alors que, dans le même temps, l’Assemblée nationale adopte des amendements pour réduire ces contentieux.
Une approche simplificatrice à l’échelle régionale est inopportune compte tenu de la complexité des milieux. Il serait, en effet, plus judicieux, d’identifier chaque secteur géographique spécifique pour prendre les mesures adaptées à la gestion de l’eau dans ces territoires.
Souhaitant que ces demandes soient bien prises en compte, nous restons à votre disposition, avec les professionnels maîtrisant parfaitement ces sujets, pour apporter des informations complémentaires et trouver ainsi des réponses opérationnelles.
Dans l’attente,
Nous vous prions d’agréer, Monsieur le Préfet, l’assurance de notre haute considération.