Pulvérisation ultra localisée
Les doses de phytos réduites jusqu’à 95 %

David Laisney
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La pulvérisation ciblée permet de réduire drastiquement les doses de bouillie appliquées en ne pulvérisant que les adventices. Cette technique présente ainsi de réels avantages environnementaux et économiques.

Les doses de phytos réduites jusqu’à 95 %
La pulvérisation ultralocalisée en vert sur vert permet de limiter les volumes de bouillie appliqués dans les parcelles cultivées. Crédit : Kuhn

Les dispositifs de pulvérisation ciblée, qui ont connu ces dernières années de grandes avancées technologiques, permettent d’apporter la bonne dose au bon endroit. Ils présentent aussi le grand intérêt de moins pénaliser la culture en place, en n’exposant pas toute la parcelle au produit phytosanitaire. Les caméras embarquées sur les rampes des pulvérisateurs sont aujourd’hui capables, grâce à l’intelligence artificielle, d’identifier une adventice au sein même d’une culture. Les systèmes de pulvérisation permettent, eux, d’appliquer précisément le produit en activant la buse ou les buses situées au-dessus de la zone à traiter. Cette ultralocalisation de la bouillie permet alors d’abaisser nettement les quantités de phytos appliquées. Les observations sur le terrain révèlent une réduction allant de 40 à 95 %, selon le niveau d’infestation de la parcelle. Moins de bouillie préparée, c’est aussi de l’eau économisée. Certains des systèmes s’utilisent aussi pour les apports de régulateurs de croissance, les fongicides ou la fertilisation azotée.

Les mauvaises herbes détectées au milieu de la culture

La pulvérisation ciblée fonctionne selon deux principes : vert sur marron et vert sur vert. Le premier consiste à détecter la mauvaise herbe sur un sol nu. C’est le plus simple, car la détection des plantes peut être réalisée par des capteurs infrarouges qui mesurent la chlorophylle. Il est bien adapté à l’usage d’herbicides non sélectifs, à l’instar du glyphosate. En pulvérisation vert sur marron, la firme américaine Trimble affiche certainement le plus de recul. Ses modules WeedSeeker sont en effet utilisés depuis les années 2000 pour le désherbage localisé avec des pulvérisateurs de grandes cultures, ainsi que pour l’apport d’engrais foliaire en maraîchage. La société John Deere a, elle, présenté au Sima 2022 le procédé See & Spray, qui s’utilise sur un pulvérisateur à rampe pour le désherbage de pré-levée, ainsi que sur une bineuse pour traiter l’entre-rang des cultures en ligne. Plus complexe, la pulvérisation en vert sur vert passe par l’identification des adventices dans la végétation. Elle fait appel à des caméras multispectrales montées sur la rampe, dont les images traitées en utilisant l’intelligence artificielle permettent de cibler précisément la plante à détruire. Ces caméras sont bien sûr capables de travailler en vert sur marron.

Montage sur pulvérisateurs classiques et bineuses

En application vert sur vert, les fabricants de pulvérisateurs sont de plus en plus nombreux à disposer d’une solution. Le groupe français Exel Industries s’y est d’ailleurs particulièrement investi. Sa marque Agrifac propose l’AICPlus et Berthoud commercialise la technologie Sniper. Sa division Exxact Robotics a même mis au point sa propre technologie dénommée 3S, pour Spot Spray Sensor, afin de fournir les sociétés du groupe : Agrifac, Tecnoma, Berthoud, Hardi et Evrard.

Le constructeur allemand Amazone a récemment dévoilé sa solution Smart Sprayer. Pour la développer, il s’est rapproché de Bosch pour les caméras et de BASF pour les modèles agronomiques. Kuhn, qui avait présenté pour la première fois, au Sima 2019, son dispositif i-Spray, prévoit de le commercialiser en 2024. L’équipement actuellement le plus précis est certainement le pulvérisateur Ara de la firme suisse Ecorobotix, qui annonce une réduction des phytos jusqu’à 95 %. Cet appareil, de 6 mètres de large, est en effet capable de traiter des zones de 6 x 6 cm. Il ne mesure que 6 m de large et est conçu pour travailler jour et nuit. À la vitesse maximale autorisée de 7,2 km/h, il réalise quatre hectares par heure, soit un potentiel théorique de travail de 96 hectares par jour en travaillant 24 heures sur 24.

 

Amazone : Le pulvérisateur Smart Sprayer cible les adventices

Amazone : Le pulvérisateur Smart Sprayer cible les adventices

Le pulvérisateur Smart Sprayer développé en collaboration par Bosch, BASF et Amazone autorise des traitements localisés sur les adventices permettant jusqu’à 70 % de réduction de volume d’herbicides sur des cultures en végétation. Les caméras multispectrales haute résolution montées tous les mètres sur la rampe du pulvérisateur sont fournies par Bosch.

BASF entre en jeu avec les modèles agronomiques de sa solution numérique Xarvio Field Manager en préconisant la période, le produit et la dose les mieux adaptés à la culture. Pendant la pulvérisation, les données sont automatiquement remontées sur la plateforme, donnant une vue d’ensemble de la pression en adventices et des zones traitées.

Amazone a optimisé son pulvérisateur traîné UX pour intégrer les capteurs sur la rampe. La précision de pulvérisation est obtenue avec un pilotage buse par buse et en recourant à la technologie PWFM modulant la durée et la fréquence d’ouverture/fermeture des buses. Pour gagner en précision, les buses sont espacées de 25 cm sans recoupement des jets. Cette configuration impose une hauteur de rampe précise, obtenue par l’automatisme AmaContour.

Le Smart Sprayer devrait être commercialisé à l’horizon 2024 pour le maïs et la betterave, puis pour le soja et le tournesol. Amazone prévoit également de développer un appareil à deux cuves et deux circuits, pouvant appliquer deux produits à la demande lors du même passage.