Après avoir testé le pâturage des brebis dans les repousses de colza à l’automne dernier, l’exploitation agricole de Vesoul Agrocampus l’expérimente dans les blés au stade tallage : outre une initiation à la démarche scientifique pour les élèves en BTS PA, il s’agit aussi d’explorer de nouvelles complémentarités entre élevage et grandes cultures.

Des brebis dans les blés
Les brebis pâturent le blé en herbe, ce qui devrait stimuler le tallage et abaisser la pression maladies, par la suppression des feuilles malades.

Le 2 mars dernier, sur le site de la ferme du lycée agricole à Port-sur-Saône (Haute-Saône), plusieurs binômes d’élèves en seconde professionnelle Cultures-Élevage étaient à l’œuvre dans un champ de blé… Comptage, pesées, etc. Objectif ? Échantillonner et qualifier l’état de la culture, avant le pâturage d’une petite troupe ovine. « Cette démonstration s’inscrit dans le cadre du projet Casdar ‘’Inter'actions’’, porté par l'EPL de Fontaines en Saône-et-Loire, qui associe trois autres établissements publics d'enseignement agricole de la région, avec des partenariats chambre d'agriculture, Vetagrosup, Idele, RMT... », introduit Grégory Choux, directeur adjoint de l’établissement. « L’idée générale est de travailler sur le thème de nouvelles formes de coopérations entre des exploitations spécialisées, sur un territoire, typiquement entre des fermes d’élevage et des fermes céréalières. C’est une des voies pour préparer la transition agroécologique, et, sur le plan pédagogique, mettre concrètement en pratique une démarche scientifique expérimentale, avec les notions d’échantillonnage, de mesures, de calculs. Sans oublier la reconnaissance des principales adventices présentes ici ! »
La complémentarité entre systèmes d’élevage et grandes cultures constitue en effet un moyen éprouvé d’optimiser agronomiquement un territoire, grâce à un meilleur bouclage des cycles de l’azote et du carbone, source d’économies d’intrants, de biodiversité, de résilience vis-à-vis des aléas climatiques.

Déprimage au stade tallage

Sur un plan pratique, le déprimage des céréales consiste à faire pâturer des parcelles au stade tallage. Le stade est important, car à partir du début de la montaison, il y a un risque de coupure des futurs épis, ce qui pénaliserait fortement le rendement. « On travaille avec un chargement élevé (de l’ordre de 1.000 brebis/ha), sur un laps de temps court : 24 h ». Les bénéfices attendus sont nombreux, tant pour la culture que pour les animaux : stimulation du tallage, réduction de la pression adventices et maladies, fertilisation, réduction du risque de verse… côté blé, et pour les brebis, petit complément fourrager ! Les mesures réalisées à l’herbomètre étaient de 3,5 cm à la sortie des animaux, contre 5,5 à l’entrée. « Ce qui correspond à une consommation de l’ordre de 2 à 2,5 kg de MS/brebis/jour, ce qui est une valeur habituelle. Les brebis ont bien consommé, y compris les pieds de rumex bien développés ».
Agathe Henry, étudiante en deuxième année de BTS et apprentie sur l’exploitation, a choisi ce sujet de stage. C’est donc elle qui valorisera statistiquement les mesures réalisées par les élèves de seconde. « Le suivi de la parcelle pâturée et d’une bande témoin non-pâturée, jusqu’à la moisson, va nous permettre d’illustrer l’impact du pâturage au début du printemps sur toutes les composantes du rendement : densité du peuplement, nombre de talles par pied, concurrence adventice, nombre d’épis par pied, nombre de grains par épis et poids de 1.000 grains. » En outre, elle a aussi réalisé une enquête auprès d’une trentaine d’exploitations du département pour mieux connaître les pratiques de coopération entre élevages et céréaliculture qui existent déjà.
Alexandre Coronel