Session chambre d’agriculture 71
Des coopérations internationales concrètes

Françoise Thomas
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La session de la chambre d’agriculture qui s’est déroulée le 10 mars dernier dans l’hémicycle du Conseil départemental a été l’occasion de signer un partenariat et d’évoquer les actions de coopération internationale menées par la structure départementale.

Des coopérations internationales concrètes
La délégation tchadienne a rendu visite à de nombreuses structures agricoles du département, dont le lycée de Fontaines (c) Christophe Charles.

La chambre d’agriculture de Saône-et-Loire s’est engagée depuis plus de deux ans maintenant dans deux projets de coopération internationale dans le cadre du programme européen Archipelago. Bernard Lacour a bien rappelé le principe de partenariat par-delà la France défendu par la CA71 qu’il préside, « nous voulons être le plus concret et le plus efficace possible. Nous apprenons ensemble ».

L’un de ces deux engagements tend à soutenir la filière manioc au Sénégal. Si aucun Sénégalais n’a pu venir en France, les enjeux principaux du projet nommé Goungué Niambi ont été rapidement rappelés. "Accompagner le manioc" en français vise ainsi, d’ici 2024, à poser les bases pour développer les productions locales (et beaucoup moins dépendre des importations), développer les formations et les structures, emmener les jeunes vers l’emploi, apporter de la sécurité alimentaire.

Invité vedette également annoncé par visio, Jacques Attali n’a finalement pas pu intervenir lors de cette session pour des raisons techniques.

Défi immense

Une large place a donc été laissée au projet Al Bouzhour et à sa délégation tchadienne présente quelques jours en Saône-et-Loire (voir notre édition de la semaine dernière).

Avec près de 130 millions d’animaux d’élevage, les besoins de fourrage et de structuration des filières sont immenses au Tchad. « Près de 80 % de la population dépend de l’agriculture mais notre SAU de 50 millions d’hectares est très largement sous exploitée, dépeint Ali Adji Mahamat Seid, le président de la chambre consulaire de commerce, d’industrie, d’agriculture, des mines et d’artisanat (la CCiama). Nous exportons tous les mois 600.000 têtes de bétail », surtout au Nigéria voisin où le poids des bêtes est doublé en moins d’un mois, leur prix multiplié par quatre… Le potentiel est immense pour ce pays à la population très jeune. Mais le défi est tout aussi important. En premier lieu à cause du climat : « nous, le changement climatique, cela fait 30 ans que nous le subissons, a rappelé Ali Adji. Désormais, des secteurs géographiques entiers sont abandonnés et cette année, on a perdu près de 5 % du cheptel à cause du climat ». Nous n’avons aucune filière de prestige, rien n’est mécanisé, il n’y a aucun financement…, constate-t-il également.

Cependant, au cours de ces quatre jours de découverte du département et de ses acteurs agricoles, il a découvert qu’en France aussi « finalement la situation des agriculteurs est difficile. Mais eux aussi sont bosseurs ! Nos pays sont différents, mais nous sommes confrontés aux mêmes réalités, c’est juste le contexte qui change ».

« Vulnérabilité continue »

Ahmed Moussa N’Game, en charge de la section agriculture élevage au sein de la CCiama, a rappelé devant l’assemblée de la chambre d’agriculture la nécessité « de l’engagement et de la solidarité », car les Tchadiens « sont en très grand danger. Nous sommes en position de vulnérabilité continue. Tout ce qui se passe dans le Sahel, c’est la pauvreté et la seule arme pour lutter contre la faim, c’est l’éducation et une éducation de qualité ». D’où l’importance pour lui d’accompagner les paysans tchadiens dans la formation.

Ainsi le projet Al Bouzhour qui unit depuis 2020 la Saône-et-Loire et le Tchad est pour lui « la traduction concrète de l’intelligence collective ». Ce projet vise le développement de la filière de semences certifiées et les premières étapes ont été franchies, les premières récoltes accomplies. Réalisé par et pour la population locale, ce programme est une première graine vers plus d’autonomie fourragère et vise en parallèle « à former et insérer 500 jeunes femmes et jeunes hommes ». Planifié sur 32 mois, ce projet touche à sa fin en matière d’accompagnement par la chambre d’agriculture « mais nous sommes déjà dans la réflexion pour la suite », a indiqué Christophe Masson en charge des programmes internationaux à la CA71.

Miser sur les jeunes

De tels projets « qui partent du champ », comme il l’a souligné, débouchent finalement rapidement sur des actions concrètes. Julien Ayme, consultant invité à la session et enseignant à Science Po, a pour sa part salué « le travail de réflexion de l’Union européenne pour faire évoluer la coopération en s’appuyant sur les corps intermédiaires ».

Dans le même ordre d’idée, « nous ne sommes pas dans l’urgence ni l’humanitaire », est intervenu Ousmane Syll, le directeur du réseau Bourgogne Franche-Comté international. Ainsi pour lui, pas de doute, « la coopération doit être au cœur des politiques publiques pour la paix et la sécurité » et il appelle les jeunes Français, à l’image d’Ali Ahmed coopérant tchadien en France pour un an, à la mobilité européenne et internationale, car « nous apprenons ensemble », avait indiqué en introduction Bernard Lacour.

Signature pour l’innovation

Signature pour l’innovation

Puisque l’un des projets de mandature est « bien de créer des partenariats autour de l’innovation », comme l’a rappelé Bernard Lacour en introduction, cette session a vu la signature de la convention de partenariat avec AgroNov, le pôle d’innovation en agroécologie basé à Bretenière en Côte-d’Or et représenté ce jour-là par son président Frédéric Imbert.

Des premières collaborations existent déjà entre les deux structures. L’action Go Meat, développée à la ferme de Jalogny, permet de travailler autour du monitoring pour les élevages allaitants et consiste en « un projet de détection au point d’abreuvement grâce à la technologie ultra-haute fréquence ». Concept développé par l’une des sociétés adhérentes d’AgroNov.
Autre projet commun : une expérimentation menée au Vitilab autour de la détection de la flavescence dorée via une caméra flash.

Et les essais d’exosquelettes proposés dans les vignes de la Cave des Vignerons des Terres secrètes le 15 mars dernier (voir notre édition précédente) sont aussi un nouvel exemple de cette collaboration autour de l’innovation au service de l’agriculture.

Dernière info à connaître sur ces actions communes : le VitiMeetUp est le prochain grand rendez-vous dédié à l’innovation en viticulture, il se déroule le 4 mai prochain à Davayé.