Christophe Lapalus
Pour manipuler des bovins, c'est le relationnel qui fait la différence

Marc Labille
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Si les équipements de contention sont indispensables dans les élevages, la relation entre l’éleveur et ses animaux compte pour beaucoup dans la réussite des manipulations. Eleveur et formateur en manipulation des bovins, Christophe Lapalus rappelle quelques principes.

Pour manipuler des bovins, c'est le relationnel qui fait la différence
« On a beau avoir tout le matériel, il y a quand même le côté relationnel entre l’éleveur et ses animaux qui fait la différence ».

Le premier intérêt de s’équiper d’un matériel de contention, c’est « de pouvoir durer dans le temps », introduit Christophe Lapalus, éleveur et formateur sur la manipulation des bovins. Au-delà de préserver la santé de l’éleveur, ces équipements permettent aussi de gagner en main-d’œuvre : « quand on peut manipuler ses animaux tout seul, c’est quand même plus efficace et plus simple », fait remarquer le formateur. Mais « on a beau avoir tout le matériel, il y a quand même le côté relationnel entre l’éleveur et ses animaux qui fait la différence », fait-il savoir.

De fait, le comportement de l’éleveur est déterminant dans la manipulation. « Il faut éviter les à-coups ; anticiper autant que possible et toujours rester modeste », résume l’intervenant.

Leur parler et se placer au bon endroit

Pour comprendre le ressenti de l’animal, Christophe Lapalus se réfère constamment aux cinq sens du bovin. Il faut tout d’abord savoir que ce dernier possède une vision panoramique. Aussi faut-il toujours « parler au milieu des vaches, car cela leur crée un environnement », informe l’intervenant. Un poste de radio allumé fait l’affaire. Le bovin est très sensible au « volume et à la taille de l’opérateur ». La position de l’homme vis-à-vis de l’animal est déterminante dans le déroulement de la manipulation. « On n’est souvent jamais là où il faut ! », résume le formateur qui explique que « le point de bascule de la vache, c’est son épaule ». Et la position de l’éleveur crée « un faisceau » pour l’animal qui a besoin « qu’on lui laisse de l’air : cela diminue sa panique », explique-t-il.

« La vache connaît la gestuelle de l’éleveur par cœur ! », souligne Christophe Lapalus. Autant dire que les bovins sentent immédiatement si leur éleveur est stressé. « Il faut être bien dans ses baskets pour manipuler des vaches », résume le formateur.

À la fois maître d’école, infirmier, négociateur

Dociliser son troupeau demande un peu de doigté et doit surtout se faire naturellement, au quotidien. « L’éleveur est à la fois le maître d’école, l’infirmier, le négociateur », fait remarquer l’expert. Certaines interventions demeurent stressantes pour les animaux (sevrage, piqûres…) et un moyen de contention est parfois incontournable. « Savoir immobiliser un animal à l’aide d’un nœud est essentiel », ajoute l’intervenant et de signaler que « la délinquance existe aussi chez les bovins ». Autrement dit, il peut toujours survenir « des situations qui dérapent ». Dans ce cas, il faut savoir reporter l’intervention ou la manipulation à un autre jour, recommande-t-il.

La buvette et la baguette de chef d’orchestre…

Dotés d’un odorat très sensible, les bovins peuvent être perturbés par un passage de sanglier, un parfum, l’odeur d’un vêtement…

« Le seau de granulé est l’équivalent de la buvette pour le bovin ! ». Par conséquent, le seau de granulé est un bon moyen de « fédérer » le troupeau et donc de le regrouper et l’attirer. Le bâton est quant à lui « le prolongement du bras : la baguette du chef d’orchestre et non une matraque de CRS ! », interpelle Christophe Lapalus qui reconnaît qu’il faut tout de même parfois être en mesure de se défendre. Le contact entre l’homme et l’animal n’intervient que comme une finalité au terme d’une démarche d’approche. Cette phase d’approche qui consiste à aller au milieu du troupeau est d’autant plus nécessaire aujourd’hui que les bovins ne sont plus à l’attache, fait remarquer le formateur. En matière de manipulation des bovins, l’expérience n’est pas forcément un gage de plus de sécurité, met en garde Christophe Lapalus, évoquant le danger de l’excès d’assurance… Pour mieux comprendre la relation homme/animal, la méthode Souvigné est une bonne démarche.

 

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