EXCLU WEB / « Les robots commencent petit à petit à rentrer dans les mœurs »

Le Forum international de la robotique agricole (FIRA) se tiendra du 7 au 9 février prochain à Auzeville-Tolosane dans la banlieue de Toulouse. L’occasion pour sa directrice, Gwendoline Legrand, de faire le point sur le marché des robots en France et de présenter les dernières nouveautés.

EXCLU WEB / « Les robots commencent petit à petit à rentrer dans les mœurs »

Quel est le principal enjeu de ce 7e FIRA ?

Gwendoline Legrand : Il est simple : que les agriculteurs s’emparent du sujet de la robotique, des machines autonomes pour leur activité quotidienne. Ces machines ont certes vocation à être commercialisées mais tout l’intérêt d’un Forum comme celui-ci est d’abord de sensibiliser les agriculteurs sans lesquels l’innovation aurait du mal à conquérir les esprits et les champs ? 

C’est-à-dire ? 

GL : Les constructeurs s’appuient sur l’expertise des agriculteurs pour concevoir leurs machines et robots. Ils réalisent des expérimentations au cours desquels ils déterminent les avantages et inconvénients de tel outil, de telle manœuvre. Le retour d’expérience des agriculteurs est indispensable et essentiel pour développer ces machines. C’est l’essence même du FIRA qui a permis à un grand nombre d’agriculteurs de faire connaître ces nouveaux outils et qui a, in fine, facilité la tâche des agriculteurs dans leur quotidien. Je pense notamment aux robots de traite qui ont été adoptés dans de nombreuses exploitations laitières. Les robots commencent petit à petit à rentrer dans les mœurs. 

Quels sont encore les freins qui empêcheraient les agriculteurs d’acheter des robots ou des machines autonomes ? 

GL : Ils sont encore nombreux. Il existe des freins philosophiques, psychologiques et sociétaux que l’on pourrait résumer par la crainte de la dépossession. Laisser la main à une machine n’est pas évident. Ils nourrissent, plus souvent à tort qu’à raison, la crainte que cette machine fera le travail moins bien que leur propre main. Les agriculteurs craignent aussi de ne pas savoir bien programmer ces robots, un sentiment qui disparaît généralement bien vite avec une indispensable session de formation, que ce soit directement par le constructeur, soit par l’intermédiaire du distributeur qui aura lui-même été formé par le constructeur. Puis les échanges avec les constructeurs permettent, en amont de la mise sur le marché, des adaptations. L’objectif des constructeurs est de rendre l’utilisation plus simple, plus ergonomique, plus pratique. Il existe enfin un dernier frein : celui de la rentabilité et du financement. Mais là encore c’est un verrou qui peut être contrecarré : acheter un engin agricole, un tracteur, une moissonneuse, etc, n’est jamais anodin. Acquérir un bien reste un acte réfléchi. 

Comment se porte le marché du robot agricole aujourd’hui en France ? 

GL : Il se porte plutôt bien et commence à prendre un peu d’ampleur. La France ne comptait pas moins, en 2021 de 15 000 robots dont 80 % pour la traite. D’après un récent sondage réalisé par notre association GOFAR, 29 % des agriculteurs français envisageait d’investir dans un robot dans les cinq ans à venir, principalement (à 78 %) pour améliorer la productivité de leur exploitation mais aussi pour réaliser des tâches spécifiques (44 %), améliorer la qualité au travail. Au plan mondial, la robotique agricole se développe aussi. Pas moins de 15 000 robots ont été vendus en 2021, 19 000 en 2022 et les projections pour 2023 font état de 22 000 ventes. 

Quelles sont les nouveautés de ce 7e FIRA ? 

GL : Nous allons réaliser des démonstrations en plein champ avec des robots dédiés dans quatre domaines : les grandes cultures, l’arboriculture, la viticulture et le maraîchage. Il y aura de nombreuses démonstrations de ces machines autonomes qui permettent, selon les domaines, le désherbage, la pulvérisation, les semis, l’analyse des plantes etc. A travers ces démonstrations, nous mettons l’agriculture au cœur de la recherche fondamentale et appliquée, mais aussi dans un écosystème international très ouvert. De nombreux exposants étrangers seront sur place : Allemands, Néerlandais, Belges, Israéliens, Slovènes, Lettoniens, Espagnols, Italiens. Ce sera l’occasion pour les agriculteurs français d’échanger, d’établir des comparaisons. Cette septième édition leur permettra aussi de réfléchir, à travers un colloque réalisé en partenariat avec l’Inrae sur la manière dont les robots peuvent aider les agriculteurs à réussir leur transition agroécologique. Un sujet très actuel et factuel s’il en est.