SYNDICAT
Écophyto et les intempéries irritent l’AGPB

L’AGPB est fermement opposée au plan Écophyto 2030, en particulier à l’indicateur de suivi des produits phytosanitaires, le Nodu. Elle s’inquiète par ailleurs des conséquences des intempéries. Elle appellera prochainement les céréaliers à descendre dans la rue.

Écophyto et les intempéries irritent l’AGPB
Éric Thirouin, président de l’AGPB (producteurs de blé, FNSEA). ©AGPB

« Nous sommes absolument opposés à la nouvelle stratégie d’Ecophyto 2030 », a affirmé le président de l’AGPB (producteurs de blé, FNSEA) Éric Thirouin à l’occasion d’une conférence de presse le 17 janvier. Selon lui, la stratégie du gouvernement visant à réduire de 50 % l’usage des pesticides à l’horizon 2030 par rapport à la période 2015-2017, risque de mener l’agriculture française « droit dans le mur ». L’AGPB conteste en particulier l’indicateur qu’elle qualifie de « loufoque », une nouvelle fois choisi par la France pour suivre le recours aux produits phytosanitaires, à savoir le Nodu (nombre de doses unités). Calculé à partir des données de vente des distributeurs de ces produits, le Nodu correspond à un nombre de traitements moyens appliqués annuellement sur l’ensemble des cultures, à l’échelle nationale. « À partir du moment où l’on remplace un produit efficace, mais considéré comme nocif, par une solution moins efficace, nous sommes obligés de passer plus souvent dans les champs. Or, plusieurs passages impliquent une augmentation du Nodu, ce qui fausse les résultats », regrette le président de l’AGPB.

Un contexte morose

« Depuis vingt ans, nous avons réduit de 46 % l’usage des substances actives, mais le Nodu ne le reflète pas. Aussi, utiliser cet indicateur crée une situation de distorsion de concurrence flagrante par rapport à nos voisins », dénonce Philippe Heusele, secrétaire général de l’AGPB. Pour rappel, l’Europe utilise un autre indicateur (HRI), soit l’indicateur de risque harmonisé qu’utilise la Commission européenne pour suivre les objectifs de réduction de l’utilisation des pesticides. À ce titre, le président de l’AGPB précise qu’il appellera les céréaliers « à descendre dans la rue ». Et ce d’autant plus qu’il s’inquiète des propos de Benoît Vallet, auditionné en commission d’enquête sur les causes de l’incapacité de la France à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires sur la santé humaine et environnementale. Benoît Vallet recommande en effet la mise en place d’un registre diffusable visant à tracer les épandages de produits phytosanitaires au niveau de chaque parcelle. « Cela reviendrait à livrer les agriculteurs en pâture », s’alarme Éric Thirouin. Pour l’heure, la loi impose aux agriculteurs de déclarer, dans un registre papier ou électronique, les traitements phytosanitaires à la parcelle, et de les conserver pendant au moins cinq ans. Or, cette période ne s’accorde pas au temps nécessaire à l’épidémiologie, selon le président de l’Anses. Les griefs de l’AGPB s’inscrivent dans un contexte morose pour la filière, avec notamment les intempéries qui touchent depuis deux mois la France. Le président de l’AGPB a estimé les surfaces de blé tendre non semées à environ 10 %. Et de s’inquiéter des semis effectués dans des « conditions exécrables », avec un risque de voir les levées « asphyxiées ». « Il manquera près de 500 000 hectares de blé tendre pour la campagne 2024 par rapport aux années précédentes », a d’ores et déjà averti Éric Thirouin, qui pointe également du doigt la diminution des solutions de désherbage pour le blé tendre. « Nous nous attendons à une situation catastrophique au printemps, avec des agriculteurs qui pourraient renoncer à récolter », prévient-il.

J.J