Joël Maltaverne
Une nouvelle vie dans les Cévennes !

Marc Labille
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Après une vie passée à Issy-l’Evêque où il élevait des bovins charolais, Joël Maltaverne est parti passer sa retraite dans les Cévennes. Auprès de ses grands enfants, il explore là-bas un autre visage de l’agriculture sans renier pour autant ses racines saône-et-loiriennes.    

Une nouvelle vie dans les Cévennes !
Sur l’exploitation de sa fille, Joël Maltaverne participe à la cueillette de roses de Provins, une fleur aux vertus médicinales.

Ancien exploitant en Saône-et-Loire, Joël Maltaverne vit aujourd’hui dans les Cévennes où il fabrique de la farine de châtaignes, cueille des fraises et des roses de Provins, presse du jus de pomme… Cet ancien administrateur de la FDSEA, autrefois éleveur-engraisseur de charolais à Issy-l’Évêque, n’est pas devenu un babacool ! Il continue de garder des liens avec ses anciens collègues syndicalistes bourguignons et lit toujours, avec le même plaisir, L’Exploitant Agricole de Saône-et-Loire

Mais sitôt l’heure de la retraite sonnée, lui qui comme son papa avant lui, n’avait jamais quitté la ferme des Gageots, est parti s’installer au sud de la Lozère à l’autre extrémité du Massif Central ! L’explication à ce nouveau départ est purement familiale. Ses deux filles vivent aujourd’hui là-bas et la plus jeune est à la tête d’une petite exploitation en vente directe. Titulaire d’un CAP d’horticultrice, d’un BTS et d’une licence en environnement, Nathalie avait toujours eu envie de se lancer dans une production fermière, la transformation et la vente directe, explique le papa. Et c’est à Gabriac dans les Cévennes qu’avec son compagnon, elle a fini par trouver ce dont elle avait besoin. De retour de dix ans passés en Guyane, sa grande sœur Natacha l’a rejointe. Elle travaille aujourd’hui au Parc National des Cévennes. Grands-parents de quatre petits-enfants tous installés désormais à Gabriac, Joël et son épouse ont vu comme une évidence de les rejoindre. À Issy-l’Évêque, ils n’étaient que locataires et encore jeunes, le couple a préféré partir avant de ne plus pouvoir le faire.

Berceau des circuits courts

En quittant le Charolais pour les Cévennes, Joël et son épouse sont un peu « repartis à zéro ». Leur nouveau lieu de vie se trouve à la limite du Gard. C’est une région au relief accidenté, avec beaucoup de forêts, de toutes petites exploitations très diversifiées : fruits, châtaignes, miel, fromages de chèvres… « Les circuits courts sont nés ici ! À 1 h 30 de Nîmes, 2 heures de Montpellier, le potentiel touristique est important. Les Cévennes sont très à la mode ! », confie Joël. L’ancien militant de la FDSEA de Saône-et-Loire ne cache pas que « les Cévennes sont une terre historiquement antisystème. Les protestants s’y sont réfugiés ; les résistants aussi ». Au début des années 70, les Cévennes étaient un peu une terre d’accueil pour soixante-huitards, comme le Larzac… Aujourd’hui encore, la région conserve cette connotation alternative et militante et les Cévenols de souche sont assez minoritaires, explique Joël. Le succès de ce territoire lui vaut aussi de posséder de nombreuses résidences secondaires.

Truites, fruits, glaces, sorbets…

Devenu à son tour Cévenol d’adoption, Joël passe le plus clair de son temps à aider sa fille sur sa petite exploitation de quelques hectares. Elle produit des pommes, des fruits rouges, élève des truites dans les bassins d’un ancien moulin. Nathalie transforme sa production de fruits en confitures et fabrique des glaces et des sorbets à base de lait de brebis. Tous ces produits sont commercialisés en vente directe, au marché, en dépôt-vente… Les truites sont transformées en rillettes, soupes ou vendues entières. Jusqu’alors locataires, Nathalie et son compagnon ont acheté une petite exploitation dont ils rénovent les bâtiments pour y aménager leur habitation ainsi qu’un laboratoire de plain-pied.

De nouveaux amis !

Depuis qu’il a rejoint sa fille, Joël participe aux tâches qui ne manquent pas. Sur cette terre culturellement bien différente de son Charolais natal, il s’est rapidement fait des amis ! Au point même de s’insérer dans le tissu agricole local. Il s’est ainsi lié avec un agriculteur qu’il aide pour ses foins. Lorsque ce voisin est tombé gravement malade, Joël s’est occupé de la ferme, à tel point qu’il est devenu salarié du service de remplacement pendant deux mois !

Grâce à sa connaissance du travail d’agriculteur et son implication auprès de sa fille et des voisins, Joël a rapidement « fait ses preuves » dans ce nouvel environnement. « J’aimais bien mes vaches et je me suis bien épanoui dans mon métier », reconnaît l’ancien éleveur de charolais. Mais il avoue aussi « n’avoir jamais rien connu d’autre et être heureux de pouvoir découvrir autre chose ». Amené à côtoyer aujourd’hui des opposants à l’agriculture conventionnelle, Joël n’hésite pas à débattre avec eux… Les convictions syndicales de sa première vie ne quittent pas cet ancien président d’USC. Avec le recul, Joël reconnaît être de cette génération qui a connu « l’intensification à outrance ». Mais il estime aussi que cette même génération « a su évoluer ». C’est ce qu’il explique aujourd’hui à ses nouveaux amis, avec ce recul et cette ouverture d’esprit qu’il continue de cultiver avec enthousiasme.