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Carnet de bord du bonheur en agriculture

Il se pourrait que la phrase que l’on attribue d’ordinaire à Alphonse Allais (1854-1905),  « il faudrait construire les villes à la campagne, l’air y est plus sain », aurait pour origine, selon Jacques Rouvière dans Dix siècles d’humour dans la littérature française, une plaisanterie se trouvant dans un ouvrage de 1848 : Le Pamphlet provisoire illustré. Finalement, l’idée d’Alphonse Allais ne serait pas si saugrenue qu’il n’y paraît.

Carnet de bord du bonheur en agriculture

À lire l’ouvrage de Nicolas Hazard, Le bonheur est dans le village, on pourrait même détourner la maxime « allaisienne » et dire que les villages agricoles et ruraux sont très certainement l’avenir de l’urbanité. Il suffit de voir l’exode urbain qui s’est accéléré à l’occasion des deux périodes de confinement consécutifs à la crise sanitaire pour se convaincre de l’attrait de nos campagnes. Celles-ci sont non seulement pleines de ressources insoupçonnées mais également pleines de solutions. Nicolas Hazard qui a effectué un tour de France pendant l’été 2020 a rencontré des hommes et des femmes vivant au pays. Il a parlé, échangé, débattu. Il les a surtout écoutés et a découvert une multitude de solutions simples, pas forcément transposables d’une région à l’autre, mais qui permettent de retrouver du sens, de vivre à la campagne, de préserver l’environnement, de nourrir la planète et de produire à taille humaine. Le lecteur croise ainsi Christine et Nicolas, ancienne publicitaire et ancien banquier, qui ont décidé de créer un réseau français de manufactures collaboratives dédiées à l’artisanat d’art, au design et au numérique afin de favoriser le lancement d’activités économiques individuelles. Il croise également Salomé, qui après avoir rejoint Paris et fait de brillantes études, décide de créer Chemins d’avenirs pour aider les jeunes issus des milieux ruraux en recherche de perspectives d’avenir près de chez eux. Nicolas Hazard, qui a créé Inco en 2010, un fonds d’investissement pour financer des entreprises qui ont un impact social et environnemental positif, livre aussi l’expérience de Pierre, agriculteur dans le Lot, qui a créé les Fermes de Figeac, bel exemple de réussite de re-territorialisation et de développement durable. La coopérative - qui rassemble plusieurs centaines d’agriculteurs - a développé une structure « énergies renouvelables ». Ils sont plus de 200 agriculteurs à avoir installé des toits photovoltaïques sur plus de 500 bâtiments agricoles. Certains se mettent aussi au méthaniseur. Au fil des pages, on se prend d’affection pour tous ces entrepreneurs, au sens générique du terme, qui ont osé, mobilisé et fédéré d’autres acteurs pour que leur projet prenne vie, devienne une réalité économique, sociale et solidaire.

Nicolas Hazard prouve à travers sa trentaine d’exemples concrets que la ruralité, en permettant de retrouver de la souveraineté sur certains secteurs, offre un terrain de jeu et de créativité inespéré. Et si tout repartait de là ? Comme le disait l’ancien président de la FNSEA, Raymond Lacombe, il n’y a « pas de pays, sans paysans ».

Le bonheur est dans le village, 30 solutions qui viennent de nos campagnes, de Nicolas Hazard aux Éditions Flammarion, 224 pages, 16 €.