EXCLU WEB / Les principaux industriels vont renégocier avec la grande distribution

Cédric Michelin
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Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a réuni le 17 mai, à Bercy, les principaux acteurs de l’industrie alimentaire pour enrayer la hausse des prix dans les rayons. Ces fournisseurs des grandes surfaces ont accepté de revoir leurs tarifs à la baisse d'ici à la fin du mois de mai. Sous conditions.

EXCLU WEB / Les principaux industriels vont renégocier avec la grande distribution

« Excellente nouvelle pour les consommateurs ! Les grands industriels se sont engagés à renégocier avec les distributeurs les prix des produits de grande consommation. C’est un engagement nécessaire pour casser la spirale inflationniste d’ici l’automne », s’est réjoui Bruno Le Maire sur son compte Twitter. Sous son autorité et en présence des ministres délégués Roland Lescure (Industrie) et Olivia Grégoire (Commerce), il a invité les représentants de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) et de l’Institut de liaisons des entreprises de consommation (Ilec) qui représentent les grandes marques (Coca-Cola, Danone, L'Oréal, Nestlé, etc.) à renégocier leurs tarifs. Car l’inflation alimentaire a augmenté de 15,9 % sur les douze derniers mois et de près de 20 % sur deux ans. Selon Jean-Philippe André, président de l’Ania, « le top 75 des industriels de la grande consommation - qui représente 80 % du marché - s'est engagé, avant la fin du mois de mai, à rouvrir les négociations ». Mais cette réouverture se fera sous deux conditions : Première condition que les industriels aient obtenu une hausse de prix de leurs tarifs de plus de 10 % pour les négociations de prix de 2023.

MPA et MPI

En effet, celles récemment obtenues ne concernaient qu’un rattrapage de 2022. Comme les agriculteurs, les industriels ont dû faire face à une importante augmentation de charges (transports, énergies, emballages…) qu’ils n’ont pas pu toujours répercuter. Si les matières premières agricoles (MPA) sont sanctuarisées à travers les lois Egalim, les matières premières industrielles (MPA + coûts de fabrication) ne le sont pas. Seconde condition : que le prix d'un de ses « intrants » c’est-à-dire MPA, énergie, transport, emballage, etc. ait sensiblement baissé. La réouverture des négociations devrait être déclenchée à partir d’une baisse de 20 % de ces intrants.

« Il s’agit d’un effort consenti sur les marges des grands industriels, et non celles des agriculteurs. Cet engagement concerne uniquement les plus grands fournisseurs de marques nationales, et non les PME », a précisé Bruno Le Maire. A vrai dire, la pression était assez forte sur les industriels car Bercy menaçait clairement de dénoncer nommément les récalcitrants. Le 10 mai, Olivia Grégoire avait menacé de dévoiler « publiquement (le nom des) marques qui ne veulent pas négocier à la baisse (…) Je ne suis pas sûre que ça [leur] fasse de la publicité ». Pour les plus inflexibles, Bercy avait même prévu, en dernier ressort, des mesures de rétorsion fiscales. « Nous suivrons avec attention la concrétisation de cet engagement. Nous appelons également les distributeurs à répercuter le plus rapidement possible la baisse des tarifs dans les prix de vente aux consommateurs », assuré le ministre de l’Économie. 

Le lait exclu et les charcutiers inquiets

Dans un communiqué du 16 mai, veille de la réunion, la Fédération nationale de l’industrie laitière (FNIL) s’est félicitée de voir le lait être exclu de la renégociation généralisée. « Les efforts des acteurs de la transformation laitière pour maintenir un prix du lait qui assure la juste rémunération des producteurs de lait sont ainsi reconnus », indique la FNIL. En revanche, les entreprises de charcuterie-traiteurs (FICT) s’inquiètent des 17 défaillances d’entreprises qu’elle a pointées depuis le début de l’année en raison d’une importante hausse des frais fixes : « le prix des pièces de découpe de porc, qui représente plus de 50 % des coûts de fabrication, a de nouveau augmenté de 15 à 20 % depuis le début de l’année, pour la plupart des pièces », souligne la FICT. Les charcutiers traiteurs prévoient pour le premier semestre 2023, « une dégradation de leur trésorerie entre -20 % et -75 % et un résultat d’exploitation en baisse de plus de la moitié et même négatif pour plusieurs entreprises ». Ce qui va contraindre les ¾ d’entre elles à réduire leurs effectifs et leurs volumes de production.