Chronique juridique
Le bail rural environnemental

SERVICE JURIDIQUE DU GROUPE FDSEA 71 
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Le bail rural à clauses environnementales est une forme de bail rural prévu par la loi d’orientation agricole du 6 janvier 2006 et mis en place par le décret d’application du 8 mars 2007. 

Le bail rural environnemental

Le bail rural environnemental permet d’inscrire dans le bail des clauses, listées par le Code rural et de la pêche maritime (CRPM), visant à orienter les pratiques agricoles vers la préservation de la ressource en eau, de la biodiversité, des paysages, des sols, de l’air, ou encore la prévention des risques naturels, la lutte contre l’érosion, etc.

Cette solution juridique permet au propriétaire d’orienter des pratiques agricoles environnementales sur ses terres et garantit à l’exploitant son statut tout en lui ouvrant la porte d’un loyer minoré en contrepartie du respect de ces exigences.

Ce bail particulier reste un bail rural, il est à ce titre soumis au code rural, les dispositions particulières étant prévues notamment à l’article L. 411-27.

Alors quelles sont les spécificités d’un bail rural environnemental et comment le mettre en place ?

Définition du bail à clauses environnementales

Communément appelé bail rural environnemental (BRE), il répond à la définition d’un bail rural classique, c’est-à-dire une mise à disposition à titre onéreux d’un bien à usage agricole en vue de l’exploiter pour y exercer une activité agricole.

La particularité tient à l’insertion de clauses spécifiques orientées vers la préservation de la biodiversité que le preneur s’engage à respecter.

Ces clauses environnementales sont insérées directement dans le bail soumis au statut du fermage.

Elles peuvent être insérées quelle que soit la durée du bail, qu’il soit normal, ou à long terme, cessible ou non, y compris en métayage.

La faculté d’insérer ces clauses dans le bail ne s’exerce toutefois que dans certaines limites, prévues par l’article L. 411-27 du CRPM, plus précisément tenant à la qualité du bailleur, des parcelles mises à bail ou visant le maintien de pratiques agricoles préexistantes ou d’infrastructures écologiques.

La qualité du bailleur

Certains bailleurs sont en capacité, en toutes circonstances, d’inclure des clauses environnementales dans leur bail.

C’est le cas lorsque le bailleur est une personne morale de droit public, une association agréée de protection de l’environnement, une personne morale agréée « entreprise solidaire », une fondation reconnue d’utilité publique ou un fonds de dotation.

La qualité des parcelles mises à bail

Il est également possible, pour tout bailleur, privé ou public, de mettre en place un BRE lorsque les parcelles exploitées se trouvent dans un espace doté d’un statut spécifique.

Les espaces considérés sont listés par le code rural, à l’article L. 411-27. Il s’agit par exemple d’un parc national ou naturel régional, d’un site Natura 2000, d’un périmètre de protection de la ressource en eau, d’un arrêté de protection de biotope, d’une zone d’érosion délimitée par le préfet, etc.

Il est nécessaire que ces espaces aient fait l’objet d’un document de gestion officiel. Les clauses environnementales insérées dans le bail devront être en conformité avec ce document.

Le maintien de pratiques agricoles préexistantes ou d’infrastructures écologiques

La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAAF) du 13 octobre 2014 est venue promouvoir le dispositif du BRE en élargissant son champ d’application.

Depuis la promulgation de la loi, tout bailleur privé peut conclure un BRE sur la totalité du territoire et non plus seulement sur les parcelles situées dans des espaces protégés.

Toutefois, c’est à la condition que le bail vise au maintien de pratiques préexistantes ayant pour objet la préservation de la ressource en eau, de la biodiversité, des paysages, de la qualité des produits, des sols et de l’air, la prévention des risques naturels et lutte contre l’érosion, ou le maintien d’un taux minimal d’infrastructures écologiques (haies, talus, prairies permanentes, arbres isolés ou alignés, mares, vergers, etc.) - article L. 411-27 du code rural.

Comment mettre en place un bail rural environnemental ?

Le BRE est avant tout un bail rural destiné à la mise en valeur du fonds à des fins agricoles. Il peut être proposé tant à l’initiative du bailleur que du preneur. N’ayant pas de caractère obligatoire, il ne pourra pas être imposé par l’une ou l’autre des parties. Ce bail peut être sous-seing privé ou notarié.

Depuis la loi LAAF de 2014, les clauses environnementales peuvent être insérées, non plus seulement à la conclusion du bail, mais désormais également au moment de son renouvellement, comme en cours d’exécution.

Les parties doivent également se mettre d’accord sur la nature des clauses retenues et sur les éléments géographiques sur lesquelles elles portent.

Il est important de réaliser un état des lieux qui prend une dimension toute particulière dans ce type de bail.

Le code rural limite la nature des clauses environnementales qui peuvent être incluses dans le bail, en visant 16 pratiques culturales, telles que : le non-retournement des prairies, la création, le maintien et les modalités de gestion des surfaces en herbe, les modalités de récolte, les modalités d’entretien de haies, talus, bosquets, bandes tampons le long des cours d’eau, mares, fossés, etc.

Lorsqu’une des clauses du bail prévoit le maintien d’un taux minimal d’infrastructures écologiques, la nature de celles-ci et le taux minimal de maintien à respecter doivent être fixés par les parties, notamment en tenant compte des infrastructures répertoriées dans l’état des lieux, élément très important du BRE.

Sont notamment considérées comme des infrastructures écologiques les haies, bosquets, arbres isolés ou alignés, jachères, bordures de champs, fossés, murets, banquettes, mares, vergers de haute tige.

L’importance de l’état des lieux

L’état des lieux est en principe obligatoire pour tout bail rural, qu’il soit ou non à clauses environnementales, selon l’article L. 411-4 du CRPM. Cependant, l’absence d’état des lieux n’est pas sanctionnée en tant que tel.

Par conséquent, en pratique, les parties y renoncent souvent. Toutefois, l’état des lieux est un élément primordial en fin de bail, afin d’établir l’existence d’améliorations ou de dégradations pouvant donner lieu à des indemnités.

Dans le cadre d’un BRE, l’établissement d’un état des lieux est essentiel, rappel fait que c’est un élément déterminant de preuve en cas de contestation, et protecteur des intérêts des deux co-contractants.

Il y a des enjeux particuliers en matière de résiliation ou de non renouvellement du bail s’il y a un non-respect des stipulations particulières.

Les spécificités du BRE

Le respect des clauses environnementales par le preneur et ses conséquences

Dans le cadre du BRE, le fermier prend l’engagement de respecter les clauses environnementales stipulées d’un commun accord avec le bailleur.

En cas de non-respect de ces clauses, le code rural prévoit des dispositions spécifiques de résiliation ou de non-renouvellement du bail.

L’article L. 411-31 du CRPM, qui prévoit les causes de résiliation du bail, dispose que le non-respect par le preneur des clauses environnementales peut entraîner, sauf cas de force majeure ou de raisons sérieuses et légitimes, une demande de résiliation par le propriétaire sans que ce dernier n’ait à prouver l’existence d’un préjudice occasionné par ce non-respect.

De même, selon l’article L. 411-53 du CRPM, le bailleur peut, dans les mêmes conditions, s’opposer au renouvellement du bail.

Surveillance du bailleur

Le bailleur dispose également de la possibilité de s’assurer annuellement du respect par le preneur des pratiques culturales convenues avec lui.

Les modalités de ce contrôle doivent être spécifiées dans le bail.

Quelle contrepartie au preneur ?

En échange de l’obligation faite au preneur de mettre en œuvre des pratiques culturales respectueuses de l’environnement, le montant du fermage peut être minoré.

L’article L. 411-11 du code rural prévoit normalement que le prix du bail est établi conformément aux minima et maxima fixés par arrêté préfectoral.

En présence de clauses environnementales, il est prévu que les minima ne s’appliquent pas, permettant ainsi aux parties de minorer le prix du bail en deçà du plancher préfectoral.

Le prix du bail reste fixé d’un commun accord entre les parties.

La mise en place d’un bail rural environnemental doit correspondre à une volonté commune entre un bailleur et un preneur dans la mise en œuvre des pratiques agroenvironnementales.