Gaec Demeule à Rigny-sur-Arroux
Diversifier les ressources fourragères

Marc Labille
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Au fil des années, le Gaec Demeule a adapté sa surface et diversifié ses sources fourragères pour être le plus autonome possible pour l’alimentation de ses 170 charolaises et leur suite.

Diversifier les ressources fourragères
Thomas et Laurent Demeule en compagnie de leur conseillère chambre d’agriculture Sarah Besombes. Depuis trois ans, cette dernière leur assure un suivi alimentation comprenant bilan fourrager, analyses de fourrages et plan d’alimentation.

À Rigny-sur-Arroux, le Gaec Demeule réunit Fabienne, Laurent et leur fils Thomas qui les a rejoints en 2017. L’exploitation couvre aujourd’hui 280 hectares sur lesquels sont élevés un cheptel bovins charolais de 170 vêlages et une troupe de 60 brebis texel. Toute la production bovine est vendue maigre. Inscrit au Herd Book Charolais, le troupeau commercialise quelques reproducteurs. Les autres mâles sont vendus en broutards : les vingt plus lourds, complémentés au pré, partent en novembre et les autres sont repoussés à 450 kg vif pour des ventes en décembre, février, mars, détaille Laurent Demeule. La moitié des femelles de l’année est sélectionnée pour le renouvellement. Quant aux autres, après leur premier hiver post sevrage, elles sont relâchées à l’herbe pour une vente à 400 kg au mois de juin. Enfin, les vaches de réforme sont vendues dès le sevrage des veaux.

Tout se joue au printemps !

Marqué par la sécheresse de 2003, Laurent Demeule a pris l’habitude de se donner les moyens de réaliser un maximum de stock au printemps. Car sur les sols sableux et précoces en bord d’Arroux, c’est à cette saison que tout se joue, explique-t-il. Avec seulement 1 UGB par hectare, le chargement est modéré grâce à des reprises de surfaces successives. Aujourd’hui, le Gaec récolte au printemps 35 hectares en enrubannage et 70 ha de foin. Au fil des années, les associés ont diversifié les sources fourragères pour sécuriser encore un peu plus les volumes. Depuis 2011, l’exploitation produit du maïs ensilage à raison de vingt hectares aujourd’hui. Dix hectares sont semés « de bonne heure » vers le 15 avril. Fertilisé avec du fumier et des boues de station d’épuration, ce maïs fourrage a produit 9,6 tonnes de matière sèche cette année, fait valoir Thomas qui précise que les terres ont bénéficié d’une journée de pluie de 85 mm au mois de juin et d’orages pour 80 mm supplémentaires au mois d’août. Une chance en cette année de sécheresse !

Du méteil entre la céréale et le maïs

L’autre moitié de la surface de maïs est implantée après un méteil. Cette dernière culture qui s’insère entre une céréale à paille et le maïs suivant a été introduite avec l’arrivée de Thomas, toujours pour constituer du stock supplémentaire. Ce méteil est semé en automne, en même temps que les céréales à paille. La famille Demeule implante un mélange de 100 kg/ha de triticale, 45 kg/ha de seigle, 25 kg/ha de pois et 8 kg/ha de vesce. « Le méteil est un moyen de ne pas mettre tous nos œufs dans le même panier. La culture, qui est récoltée en enrubannage, procure du rendement ; jusqu’à sept tonnes de matière sèche hectare », indique Thomas. « Le méteil ne déçoit jamais en volume. Par contre, le pois craint les gelées en hiver », complète Laurent.

Un hiver de stock d’avance minimum

Le Gaec cultive aussi une vingtaine d’hectares de triticale en rotation avec les prairies temporaires, le maïs et le méteil. La conduite de cette céréale rustique est économe : pas de fongicide, un seul herbicide, deux apports d’azote…

L’enrubannage de méteil est réservé aux 40 laitonnes qui passent l’hiver dehors. Elles en reçoivent à volonté, informe Thomas. Les laitonnes et les génisses qui passent l’hiver en bâtiment sont nourries avec de l’enrubannage de prairies temporaires à volonté complété avec des céréales en quantité croissante à l’approche de la reproduction. Avant vêlage, les vaches reçoivent le matin du foin et de l’enrubannage et le soir foin, maïs ensilage et céréales. Cette ration augmente trois semaines avant le vêlage pour atteindre la ration d’après-vêlage : foin, maïs, enrubannage, céréales, tourteaux. Les broutards à la repousse reçoivent quant à eux du maïs à volonté ainsi que des céréales et un aliment à 27 % de matière azotée.

Grâce à ce système fourrager qui a su se diversifier au fil des années, le Gaec est autonome pour l’alimentation fourragère de ses animaux. Seuls le correcteur azoté et l’aliment des broutards est acheté. L’exploitation dépend aussi de l’extérieur pour la paille de la litière. Mais pour le reste, « à la fin de l’automne, nous avons toujours presque deux hivers d’avance en fourrage. En 2019, il nous restait 50 bottes d’enrubannage et 80 bottes de foin », confie Laurent.

Des vêlages maitrisés

Depuis l’installation de Thomas, l’exploitation se fait accompagner par Sarah Besombes de la chambre d’agriculture. « Grâce au Pack 5 ans dont bénéficie le jeune éleveur depuis son installation, le Gaec dispose notamment d’un bilan fourrager, d’analyses de fourrages et d’un plan d’alimentation », indique la conseillère. « Nous ne faisions pas d’analyse. Cela nous a confortés et permis de voir les variétés qui marchaient ou pas », confie Thomas. Pour les rations hivernales, la conseillère leur a fait équilibrer le maïs ensilage pour les vaches en y adjoignant du concentré en plus.

« La plupart des paramètres de l’exploitation sont au vert », confie Sarah Besombes qui cite un taux de mortalité des veaux compris entre 2 et 5 % ; un taux de réussite en nombre de veaux sevrés par vêlage de 98 % sur cinq campagnes... Les deux associés confirment que la surveillance des vêlages est un point fort de l’exploitation. Une étape que Laurent et Thomas maîtrisent par la rigueur et ce malgré une période de vêlage s’étendant du 15 novembre au 15 avril.

400 bêtes pansées en quatre heures de temps !

Chez les Demeule, l’organisation du travail fait partie des ingrédients qui expliquent les bons résultats techniques. Chaque tâche doit être faite en temps et en heure ; « chaque chose a sa place », s’impose comme principe Laurent Demeule. Cette rigueur explique en grande partie la maîtrise des vêlages. On la retrouve aussi dans l’anticipation des stocks de fourrages. Au quotidien, l’organisation du travail se traduit par une certaine sérénité dans les tâches partagées par les trois associés. Chaque jour, les 400 bêtes de l’exploitation sont pansées en seulement quatre heures de temps et ce même travail ne prend pas plus d’une heure trente le matin, révèlent les intéressés. Pour cela, le Gaec dispose de bâtiments fonctionnels. Le matériel est plutôt simple : dérouleuse, pailleuse, dessileuse… Les céréales sont écrasées à l’aide d’un concasseur acheté avec deux autres élevages voisins. Pour les cultures, le Gaec possède son matériel sauf pour le semis du maïs et la récolte réalisés en Cuma.

Un régime spécifique pour les primipares

Si les autres indicateurs sont au vert, la conseillère Sarah Besombes pointe des intervalles vêlage-vêlage « à améliorer » : 380 jours pour les vaches et 400 jours pour les primipares. Ces retards au vêlage pourraient être améliorés par l’alimentation, assure-t-elle. « Dans l’idéal, il faudrait séparer les primipares des autres vaches et leur distribuer une ration spécifique. Car chez une génisse qui doit couvrir des besoins d’entretien, de lactation, de développement et de reproduction, c’est toujours la reproduction qui est sacrifiée en premier si les besoins ne sont pas couverts », explique la technicienne.