UPECB
Le crémant de Bourgogne en rupture de stock

Ariane Tilve
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Victime de son succès, le crémant de Bourgogne n’arrive plus à répondre à la demande, faute de rendement suffisant, comme l’explique Édouard Cassanet, président de l’Union des producteurs - élaborateurs de crémants de Bourgogne (UPECB) qui regroupe 84 appellations.

Sur la route des crémants de Bourgogne.
Sur la route des crémants de Bourgogne.

L’appellation tutoie plus que jamais d’autres bulles, bien connues, sur les tables de prestige. « On dépasse cette année les 23 millions de bouteilles vendues, un nouveau record. 45 % de ces ventes se font à l’export avec, pour principal client étranger, les États-Unis, suivi par les pays scandinaves, Norvège et Suède en tête », explique Édouard Cassanet. Malgré cet engouement, les ventes risquent de reculer car, cette année encore, le rendement sera faible, a contrario de toutes les autres appellations. Si l’aire de production des crémants de Bourgogne est vaste, la moitié des parcelles se trouve dans le Rhône, et plus précisément dans le Beaujolais. Sur ce secteur, le plus au sud de la Bourgogne-Franche-Comté, il y a eu des petits rendements en chardonnay et en gamay, à cause de la sécheresse marquée de cet été qui n’a pas été compensée par les dernières pluies. Dans le nord de la région, il y a eu des pluies en fin de vendanges, notamment dans l’Yonne et dans le Châtillonnais, où les rendements sont meilleurs, mais cela ne suffit pas à compenser. "Nous sommes en dessous du potentiel global de la Bourgogne », reconnaît Édouard Cassanet. Il n’est plus possible non plus de s’appuyer sur le système de stockage, mis en place en 2008, car les réserves sont vides. « Les réserves avaient déjà été libérées pour alimenter le marché, au fil des années, en raison d’une succession de petites récoltes. Ce système de stocks nous a été très utile puisque, jusqu’à présent, nous avons pu alimenter le marché dans de bonnes conditions. Un marché qui est pourtant très porteur depuis près de dix ans déjà. Nous savons déjà, grâce à nos prospectives de marché, que nous ne pourrons pas répondre à toutes les demandes. Nous risquons même d’assister à une baisse des ventes, malgré la dynamique actuelle. »

 Édouard Cassanet, président de l’Union des producteurs - élaborateurs de crémants de Bourgogne. L'UPECB regroupe 84 appellations. (Crédit UPEBC)

Améliorer le rendement

L’UPECB a peu de leviers pour espérer améliorer les rendements à venir. Alors que certaines appellations cherchent à fidéliser leur public, le Crémant de Bourgogne, lui, cherche à fidéliser les viticulteurs de sa zone d’appellation. Ces derniers choisissent, chaque année, quelles parcelles seront dédiées à la production de fines bulles. La déclaration, faite au 31 mars, entraîne l’application des critères de culture de l’AOC, mais les viticulteurs peuvent se dédire jusqu’à fin juillet. Un système qui rend le rendement très incertain. Avec une moyenne de 3.000 hectares revendiqués l’année dernière, l'appellation enregistre un léger recul avec 2.935 hectares cette année. L’objectif de l’UPECB est donc de convaincre ses viticulteurs de dédier leurs parcelles exclusivement au crémant. « Cela permettrait d’amender, de tailler différemment. Pour produire du mâcon ou du bourgogne, il est préférable d’avoir peu de raisin afin d’obtenir un jus plus concentré. Ce n’est pas le cas pour un crémant, qui ont d’autres critères qualitatifs. Nous recherchons un fruit qui ait une acidité, qui ne soit pas trop marqué sur les arômes, avec une certaine discrétion. » C’est justement pour convaincre les indécis que l’AOC a apporté quelques changements à son cahier des charges pour, notamment, autoriser jusqu’à 30 % de gamay, ou encore étendre, à l’ensemble de l’aire géographique, la "taille à queue du Mâconnais" pour les chardonnay et les sacy. L’encépagement pourrait d’ailleurs, lui aussi, améliorer le rendement des parcelles dédiées grâce aux cépages anciens comme le sacy ou l’aligoté. Seule certitude pour l’heure, de l’aveu même du président de l’(UPEBC), « la valorisation augmente et risque encore d’être marquée, mais jusqu’à présent elle n’a pas freiné les ventes ».