Gestion des ravageurs
Choisir les hôtes de la parcelle

Françoise Thomas
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Lancé début 2020 et prévu pour durer jusqu’en 2024, le projet R2D2 s’appuie sur l’agronomie et les insectes auxiliaires pour s’orienter sur "une agriculture durable". Terres Inovia a proposé, dans le cadre des "Jeudi de TI", une conférence à distance pour faire un point sur l’avancée des recherches.

Choisir les hôtes de la parcelle
Le projet R2D2 vise à améliorer les performances du colza tout en réduisant le recours aux insecticides.

Ce sont en tout 1.330 ha qui sont consacrés au projet R2D2 sur les plateaux de Bourgogne. Dans les environs de Courson-les-Carrières dans l’Yonne, plus précisément. Dix agriculteurs se sont montés en collectifs « soucieux d’amorcer la transition de leur système », présente Nicolas Cerutti, chargé d’études Biodiversité fonctionnelle chez Terres Inovia.
L’idée de « ce projet territorial », permettant à l’ensemble des acteurs d’un même secteur d’aller dans le même sens, est tout autant de diminuer les dégâts des ravageurs que de réduire le recours aux produits phytosanitaires.
Un besoin partant du constat de la problématique grandissante de l’impact des insectes ravageurs sur les colzas, et des phénomènes de résistance aux pyréthrinoïdes. Face à l’impasse technique, des solutions doivent être trouvées, d’où ce projet. « Mais lorsque l’on a défini le concept, nous avons aussi insisté sur la notion d’amélioration des performances des colzas ». Avec comme autres objectifs « ambitieux » à long terme et faisant office de cahier des charges : conserver 1/6 d’assolement en colza, un rendement à 30 quintaux/ha, 0 en IFT insecticide, 1 en IFT herbicide. Pour ce faire, Nicolas Cerutti a détaillé les trois axes de travail sur lesquels le groupe s’est engagé : favoriser la robustesse des cultures « pour qu’elles soient plus résilientes par rapport aux attaques d’insectes » ; créer un environnement favorable aux régulateurs biologiques, « en faisant un travail sur leur habitat, notamment grâce aux ressources fleuries, et en adaptant les pratiques agricoles » ; et enfin créer un environnement défavorable aux ravageurs selon la technique du push-pull qui consiste à piéger les insectes grâce à d’autres cultures.

Parmi les leviers mis en place, l’agronomie avec des cultures dynamiques, en jouant par exemple sur les dates de semis ; la réduction du travail du sol ; la mise en place de haie permettant de favoriser la régulation naturelle, etc.

Des constats rassurants

Pour la troisième année de mise en place de ce projet, les premiers constats font état de résultats encourageants sur les colzas (avec 130 ha implantés sur les 173 ha visés ; un rendement à 27,1 q/ha pour un objectif à 30) ; d’une fertilisation systématiquement passée au moment du semis du colza ; de beaucoup plus de semis d’opportunité (c’était 0 % en 2019, 46 % en 2021) et d’association avec d’autres espèces (33 % en 2019, 65 % en 2021). Les IFT ont beaucoup baissé (-78 %) mais les objectifs ne sont pas encore atteints. Il se constate également une évolution de la stratégie face aux ravageurs : si avant 2019, plus de la moitié des traitements étaient systématiques, ils sont à 100 % optionnels en 2021 « c’est-à-dire soumis à règle de décision en fonction du nombre de ravageurs constatés et/ou de seuil de nuisibilité », explique le chargé d’étude.

Autre constat : la mise en place de près de 300 ha de cultures pièges à altises, notamment des crucifères (radis chinois, navette), à proximité des parcelles de colza. « Particulièrement attractives pour les insectes ravageurs, ces cultures permettent de diminuer la pression sur le colza ». Dans un deuxième temps, la destruction de ce couvert en hiver permet d’éliminer bon nombre de ces ravageurs et, dans les faits, « on a constaté peu d’émergences d’adultes au printemps ». « La technique semble prometteuse », souligne Nicolas Cerutti.

En parallèle, huit hectares de bandes fleuries ont été implantés en 2021 visant à favoriser les populations d’auxiliaires de cultures.
Le bilan définitif est pour fin 2024 où un document reprendra tout ce qui aura été mis en place.