Enseignement agricole
« L’enseignement agricole fait du sur-mesure »

Comme de nombreux autres secteurs, l’enseignement agricole a appris depuis un an à faire avec la Covid-19. Chef du service de l’enseignement technique agricole au ministère de l’Agriculture, Luc Maurer nous a livré son analyse de la situation.

« L’enseignement agricole fait du sur-mesure »
Luc Maurer, chef du service de l’enseignement technique agricole au ministère de l’Agriculture. © Cheick Saidou/agriculture.gouv.fr

Nommé le 2 novembre dernier adjoint à la directrice générale de l’enseignement et de la recherche au ministère de l’Agriculture, et chef du service de l’enseignement technique agricole, Luc Maurer est au cœur des bouleversements qui perturbent le monde de l’enseignement depuis bientôt un an. Nous lui avons posé nos questions sur cette année sans précédent.

Comment va le moral des troupes ?
Luc Maurer : Il ne faut pas nier qu’une certaine fatigue se fait sentir. En même temps, la fierté d’être restés mobilisés et d’avoir continué à préparer nos élèves aux examens reste forte parmi les professionnels de l’enseignement agricole. Je sais leur mobilisation sans faille pour permettre aux élèves de continuer à apprendre. Pour cela, je les remercie très sincèrement. C’est grâce à eux, à leur engagement sans faille que les élèves n’ont jamais eu à subir de rupture dans leur apprentissage malgré le contexte difficile que nous connaissons.

Y a-t-il des décrocheurs parmi les élèves ?
L.M. : Dans l’enseignement agricole, le taux de décrocheurs est assez faible. Moins, dans l’ensemble, que dans l’Éducation nationale. Cela peut s’expliquer par la petite taille de nos établissements. En moyenne, nos structures sont plus petites et plus familiales. On parle parfois de villages écoles !

Quelles sont les perspectives pour les prochains mois ?
L.M. : Il faut continuer à former les jeunes, c’est une priorité ! Pour l’instant, les épreuves du bac du mois de juin restent programmées, mais on n’est sûrs de rien. Les épreuves de spécialité du bac viennent ainsi d’être remplacées par du contrôle continu.
Mais au-delà du bac, le gros enjeu pour nous, c’est le recrutement d’élèves pour la rentrée 2021. Comment fait-on pour présenter les établissements sans journées portes ouvertes ? Seuls ces moments de rassemblement permettent vraiment aux élèves de se faire une idée sur le cadre de vie qui les attend, surtout quand celui-ci inclut un internat. En attendant, les établissements organisent des visites virtuelles, des visites par famille, presque individuelles, et étalées dans le temps… nous avons besoin de conforter les effectifs.

Comme dans beaucoup d’autres domaines, la crise de la Covid-19 a-t-elle agi dans l’enseignement agricole comme un révélateur ?
L.M. : La crise a révélé une aptitude particulière de l’enseignement agricole à réinventer sa pédagogie : plages d’autonomie, classe inversée… Autant de méthodes où les élèves se trouvent acteurs au lieu d’appliquer des recettes toutes faites. C’est moins académique, mais plus adapté à l’enseignement professionnel, et tout à fait pertinent à un moment où il n’était plus possible de faire cours de façon classique.
Il a la capacité de s’adapter à chacun, via des enseignements concrets, des stages en entreprise, du terrain… Tout cela est prétexte à réfléchir et à enseigner autrement. Les trois familles de l’enseignement agricole que sont les MFR, lycées privés et lycées publics offrent un équilibre intéressant. L’enseignement agricole se caractérise aussi par une bonne collaboration entre les différents professionnels : agriculteurs, pépiniéristes, métiers de l’environnement, paysagistes… Sans oublier les chambres d’agriculture. Il y a une dynamique intéressante en termes de communication et de besoins. Il faut aller jusqu’au bout de ce travail de révélation, et le faire savoir.
Propos recueillis par Lucie De Gusseme