Danone et l’association laitière Jura Bresse
Engagés pour une alimentation 100% française pour les vaches

Marc Labille
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Danone vient de signer son tout premier accord AlimFrance avec les éleveurs de l’association laitière Jura Bresse. La nouvelle démarche visant à produire du lait sans protéines d’importation, a été présentée à la presse le 21 mai dernier à Devrouze.

Engagés pour une alimentation 100% française pour les vaches
Laurent Boivin du Gaec du Champ de Lux, Laurent Schatz directeur lait pour la France, François Eyraud directeur général Danone et Anthony Ecoffier président de l’Association Laitière Jura Bresse.

Vendredi dernier à Devrouze, Danone et l’association laitière Jura Bresse (ALJB) ont présenté le tout premier accord signé avec les producteurs pour une alimentation des vaches 100% française. Profitant de la « Semaine de l’Agriculture Française », l’industriel laitier avait choisi l’exploitation de l’un de ses fournisseurs bressans, en l’occurrence le Gaec du Champ de Lux. Il s’agit de l’une des 80 fermes adhérentes de l’organisation de producteurs (OP) ALJB qui livrent leur lait à Danone en Saône-et-Loire et dans le Jura.

Cette signature marque une étape importante pour le bassin laitier régional. C’est la suite d’un travail entamé en 2011 avec la création de l’OP ALJB qui fédérait les producteurs historiques de Danone sur la zone. Les deux partenaires étaient alors des pionniers de la préparation de l’après-quotas avec la mise au point des tout premiers contrats dont les formules de prix intègrent les coûts de production depuis 2016, rappelait François Eyraud, directeur général de Danone en France. Une contractualisation dont le dirigeant connait bien les enjeux, lui qui a participé aux groupes de travail des EGAlim il y a quelques années. Dans cette démarche impulsée par la profession, l’association laitière Jura Bresse a été un exemple national et elle continue d’être novatrice, soulignait François Eyraud. Un partenaire amont apprécié par l’industriel laitier pour la concrétisation de ses engagements, tant pour la santé des consommateurs que dans la transition écologique.

Danone souhaite agir « en faveur de la résilience économique et environnementale des exploitations » en impulsant « une accélération vers une agriculture régénératrice, toujours plus locale et plus vertueuse », expliquait-on. Plus de 50% des agriculteurs partenaires de Danone sont d’ores et déjà engagés en ce sens et d’ici 2025, 100% des ingrédients des recettes Danone devront être issus de cette agriculture régénératrice, fait valoir la marque.

Se passer des protéines d’importation

La signature de l’accord AlimFrance incarne cette accélération. Convaincu que la qualité des produits laitiers est intimement liée au régime alimentaire des vaches laitières, Danone lance, aux côtés de ses partenaires producteurs, un programme visant une alimentation 100% française. Concrètement, il s’agit de supprimer les 20% qui manquent aux exploitations françaises pour être à l’autonomie vis-à-vis des importations. Ce qui revient à se passer des protéines étrangères (soja brésilien…), permettant au passage de se préserver de la volatilité des cours des matières premières et d’améliorer la souveraineté alimentaire du pays. En ce sens, Danone souhaite accompagner la création d’une véritable filière française de protéines végétales durable et créatrice de valeur. Une forme de relocalisation au service du dynamisme des bassins laitiers et des territoires. Une démarche bénéfique à plus d’un titre (diversification culturale, bilan carbone, transports…) qui s’inscrit dans le plan protéine national.

Efforts récompensés

Le programme AlimFrance consiste en un accompagnement technique des exploitants, financé par Danone, avec le concours de l’Institut de l’Élevage et de la Chambre d’Agriculture : formations collectives, accompagnement individuel… La démarche comprend aussi un accompagnement financier qui se concrétisera par une aide à la conversion de 15 €/1.000 litres de lait, s’ajoutant aux autres primes versées par Danone dans le cadre de ses programmes d’agriculture régénératrice. À travers cette démarche, les producteurs de l’ALJB visent une plus value supplémentaire. Car dans l’esprit des EGAlim, les efforts accomplis devront à terme se traduire par un impact sur le prix payé par les consommateurs. Cette ultime étape n’étant pas la plus facile à franchir tant les distributeurs demeurent encore intraitables dans les boxes de négociation commerciales… Mais les EGAlim ont armé les négociateurs de lois et les mentalités évoluent dans le bon sens… Comme le font les éleveurs au travers de leurs organisations professionnelles, Danone œuvre pour ce juste retour avec l’ambition d’une hausse de 15% des revenus d’ici 2025, fait-il valoir.

Accompagnement technique

Accompagnement technique

Assurant l’animation de l’OP Association laitière Jura Bresse, la chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire accompagnera les éleveurs livreurs à Danone dans le programme AlimFrance. Un programme de formation (Vivéa) est prévu, confirme Laurent Lefèvre, conseiller à la chambre d’Agriculture. Les exploitations se verront proposer un diagnostic destiné à faire ressortir les leviers d’adaptation pour une alimentation 100 % française. Une adaptation des systèmes fourragers au changement climatique est au programme. De fait, l’abandon des protéines d’origine étrangère impliquera un effort sur la valorisation de l’herbe (pâturage, culture, récolte…). L’introduction de légumineuses, d’intercultures, de dérobées riches en azotes font partie des leviers. Le programme AlimFrance prévoit aussi des déclinaisons à l’échelle territoriale et nationale avec, par exemple, la recherche de nouveaux partenariats avec des céréaliers et la construction de nouvelles filières de protéines françaises. Un travail est également conduit avec les fournisseurs d’aliments pour adapter les formules aux disponibilités françaises.

 

Anthony Écoiffier, président de l’Association laitière Jura Bresse

Aujourd’hui, ce sont 80 exploitations qui fournissent Danone, présentait Anthony Écoiffier, président de l’OP. « Il nous faut maintenir une filière dynamique et nous devons travailler le collectif pour rester attractifs vis-à-vis de notre collecteur. Cela passe par une densité de volumes suffisante, un maillage et des services pour la production laitière. Avec 45 % d’agriculteurs âgés de plus de 50 ans, le défi est de maintenir le nombre d’exploitants. Il faut pouvoir donner envie aux jeunes de s’installer et pour cela, il faut un revenu et donc de la valeur ajoutée. Or pour atteindre cette valeur ajoutée, nous devons répondre aux attentes sociétales. Notre région de polyculture-élevage n’a pas vocation à se spécialiser dans la production céréalière et nous voulons nous engager pour faire évoluer les choses. Le programme AlimFrance est une réponse aux limites de la mondialisation et de l’importation de protéines étrangères. Il nous fournira des arguments pour communiquer vers les consommateurs en leur montrant que nous sommes dignes de leur confiance », conclut Anthony Écoiffier. 

Laurent Boivin, Gaec du Champ de Lux à Devrouze

Le Gaec du Champ de Lux compte deux associés et emploie deux salariés à Devrouze. L’exploitation couvre 280 hectares dont 190 de cultures pour un troupeau laitier de 115 vaches produisant 1 million de litres de lait. Comme nombre d’exploitations laitières de la Bresse, le Gaec du Champ de Lux a beaucoup évolué en l’espace d’une trentaine d’années, faisait valoir Laurent Boivin, l’un des associés. « Dans un secteur dépourvu d’usine de transformation du lait, la profession a joué la carte de la compétitivité et de la restructuration. Danone est venu collecter du lait dans la région au milieu des années 1980. Ces dernières années, nous avons fait en sorte de constituer une zone de production intéressante pour notre collecteur. Nous avons beaucoup travaillé la qualité avec la prise en compte - nouvelle pour nous - du devenir du produit auprès du consommateur… ». Adhérent de l’association laitière Jura Bresse dont il fut le premier président, Laurent Boivin est engagé dans le programme AlimFrance. Convaincu de l’intérêt pour la région, il estime que « c’est une démarche pour un meilleur revenu, un meilleur lait et une meilleure empreinte carbone ». L’agriculteur de 51 ans ajoute d’ailleurs « que nous n’avons pas le droit d’hypothéquer les ressources naturelles », d’où sa satisfaction de s’engager dans un programme qui contribue à la qualité des sols et à l’environnement.

Site Danone de Saint-Just-Chaleyssin

Les 80 producteurs de Saône-et-Loire et du Jura livrent leur lait pour l’usine Danone de Saint-Just-Chaleyssin dans le Rhône. Le site produit les desserts de marque Activia, Danette et Velouté. La zone de collecte de l’usine couvre un rayon d’une soixantaine de kilomètres autour du site.