ÉVÉNEMENT
La sécheresse s’intensifie sur le pays

Déjà bien visible au mois d’avril, la sécheresse a aujourd’hui gagné une grande partie du territoire français. Exceptionnel par son intensité et sa longévité, cet épisode impacte aussi sérieusement l’activité agricole. Éléments de compréhension grâce à Météo France et l’Inrae.

La sécheresse s’intensifie sur le pays
Au niveau des grandes cultures, le blé, l’orge ou le colza dont le cycle est déjà bien entamé risquent de souffrir de la sécheresse, même si un rattrapage est encore possible.©Arvalis

« Depuis le 1er janvier, les précipitations ont presque partout été déficitaires, traduisant un phénomène de sécheresse météorologique. Ce manque de précipitations se conjugue à un épisode de chaleur exceptionnellement long qui donne une évapotranspiration plus forte que la moyenne », explique Christian David de Météo France. Pour mieux comprendre le phénomène au niveau local, il apporte quelques données régionalisées : « En Auvergne-Rhône-Alpes ces dernières semaines, les précipitations ont été déficitaires partout, sauf dans les Alpes, le Bugey, une partie du Cantal et le         Sud de la Chaîne des Puy. En plaine notamment, les déficits sont exceptionnels, en témoignent les 103 mm enregistrés entre le 1er janvier et le 15 mai sur la station de Lyon-Bron, battant un record datant de 1976. Côté Bourgogne-Franche-Comté, c’est surtout le Sud de la région qui souffre, et notamment la Saône-et-Loire ». À cette sécheresse météorologique se conjugue une sécheresse dite agricole, mesurée grâce à l’outil Soil Wetness Index (SWI) qui calcule l’humidité des sols selon une échelle allant de 0 à 1, autrement dit de 0 à 100 % d’humidité. Actuellement, la moyenne nationale se situe autour de 30 %, une situation habituellement observable au mois de juillet. La sécheresse agricole est notamment visible dans le Puy-de-Dôme, la Loire, le Rhône et la Haute-Loire.

Les impacts sur l’activité agricole

Signe évident du réchauffement climatique, cette sécheresse de printemps a des effets directs sur le travail des agriculteurs. « Au niveau des grandes cultures, le blé, l’orge ou le colza dont le cycle est déjà bien entamé risquent d’en souffrir, même si un rattrapage est encore possible. Pour les cultures d’été comme le soja ou le sorgho, c’est plus délicat. Nous assisterons au mieux à un décalage du cycle, au pire à des pertes à la levée avec des graines qui ne germent pas », précise Philippe Debaeke, directeur de recherche à l’unité Agir de l’Inrae. Inefficacité de l’irrigation sur un sol trop sec, pousse de l’herbe déficitaire, manque d’azote… les problématiques pour les filières végétales sont multiples, même si Philippe Debaeke estime que les filières de maraîchage et d’arboriculture, « souvent mieux équipées », sont mieux armées pour résister. Ce qui n’est pas le cas de l’élevage, qui souffre aussi de la sécheresse. « Nous invitons les éleveurs à utiliser des outils thermiques car les animaux sont très sensibles à la température et leur productivité peut vite baisser », indique-t-il. À plus long terme, il invite les professionnels à « penser l’évolution de leur système, en intégrant par exemple des espèces plus méditerranéennes ». Mais dans l’immédiat, Christian David de Météo France prévient : si les quelques précipitations et la baisse des températures cette semaine vont ponctuellement atténuer la sécheresse, « il ne faut pas s’attendre à être sortis d’affaire dans les quinze jours ».

Pierre Garcia