Ferme-auberge de Chamoge
De la ferme à l'auberge

Ariane Tilve
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Entré dans le langage courant, le terme de ferme-auberge désigne une activité encore méconnue du grand public, qui y voit souvent un simple restaurant. La réalité est bien plus complexe pour une expérience bien plus complète, d’autant plus qu’il y a autant d’approches différentes que de sites, comme nous l’expliquent Cédric et Mélanie Capon,, de la ferme-auberge de Chamoge.

Une auberge aux saveurs d'antan.
Une auberge aux saveurs d'antan.

C’est à Baron que le couple a posé ses valises, il y a quelques années, en reprenant la ferme-auberge existante. Eux qui étaient dans la restauration avouent qu’ils n’avaient pas de connaissances particulières en matière d’élevage. Ils se retrouvent aujourd’hui avec un atelier mouton, pour l’agneau, et un autre de volailles. « C’est un vrai métier à apprendre et nous l’apprenons sur le tas », explique Cédric. Ajoutez à cela un gîte pour huit personnes, un hébergement insolite*, une auberge, un traiteur, les repas de groupe ou encore la vente directe et sur les marchés, vous obtenez le cocktail explosif de deux amoureux du terroir qui n’ont qu’une seule idée en tête : manger local et fait maison. « Ce que nous voulions par-dessus tout était de savoir ce que l’on cuisine », insiste Mélanie qui défend l’excellence des matières premières que son compagnon de route prépare. Un principe qui les pousse sans cesse à se remettre en question, que ce soit aux fourneaux où dans les prés. « Par exemple, les gens nous demandent de plus en plus de viande moins cuisinée, avec moins de sauce. Nous avons donc investi dans une plancha et un brasero pour faire de la viande snackée durant les beaux jours ».

 

À table !


La carte change toutes les semaines, voire du samedi au dimanche, mais il y a toujours deux ou trois entrées au choix comme le pâté en croûte de volaille, la salade gourmande ou la crème brûlée aux asperges. Pour le plat, un inconditionnel, ou presque, l’agneau confit : l’épaule, le gigot et le filet cuisent près de huit heures. C’était la spécialité des précédents exploitants et de nombreux clients viennent encore, parfois d’assez loin, pour le déguster. « Durant les périodes de transition où nous avons moins d’agneau et que nous ne pouvons pas proposer cette recette, nous le mentionnons systématiquement pour éviter les déceptions », explique Mélanie. Mais d’autres plats, telle la canette au thym ou la fricassée de volaille, peuvent également figurer au menu. Viennent ensuite les fromages de Champlecy et le dessert, toujours fait maison avec les œufs de la ferme, à l’instar de l’éclair Paris-Brest. Pour les vins, le saint-véran vient du Château la Greffière côté blanc. Côté rouge, on opte pour du morgon et du vin de l’Yonne. Ces vins sont en concordance avec les autres tarifs. « Lorsqu’on a un menu à un prix raisonnable, on ne peut pas vendre un vin à 70 € », s’amuse Cédric. Il propose également du vin au pichet et au verre. Quant aux groupes, ils peuvent apporter leurs propres bouteilles. L’apéritif, en revanche, est fait maison avec, au choix, vin de noix ou d’épine. Le chef réalise également ses crèmes de mûre, de framboise et de fraise pour les kirs.

 

Produits de l’exploitation…


Si le terme de ʺferme-aubergeʺ ne suffit pas à décrire toutes les activités proposées ici, il est également difficile à appréhender pour le grand public qui peut y voir un restaurant alors qu’il est impossible d’offrir la même prestation, ce qui n’est d’ailleurs pas l’objectif. « On ne peut pas être ouvert toute la semaine ; Uniquement le week-end, voire en semaine pour les groupes et uniquement sur réservation ».

Autre question, celle de l’approvisionnement. Labellisée Bienvenue à la ferme, l’établissement doit respecter un cahier des charges qui précise notamment qu’en cuisine doivent être utilisés 50 % de produits issus de l’exploitation et 25 % de produits locaux, un terme qui, là encore, reste flou puisqu’il faut définir ce qui est local (département, région, pays ?). Cédric et Mélanie produisent sur place l’élément de base de leurs menus : l’agneau et la volaille qui permettent notamment de mettre du magret fumé dans les salades gourmandes. Des salades qui poussent, en saison, dans le potager où Cédric cultive aubergines, courgettes, poivrons et tomates. Ces produits serviront ensuite à confectionner des conserves stérilisées pour valoriser cette petite production. « Nous faisons également des confitures et du miel, grâce à nos six ruches, mais aussi des pestos à l’ail des ours ou des asperges sauvages. Les abeilles sont là avant tout pour favoriser la biodiversité. Idem pour les haies qui nous permettent de récupérer le bois » explique Cédric. En décembre, le couple retire toutes les tables de l’auberge qu’il transforme en boutique. On y trouve des colis-cadeaux pour les entreprises ou les mairies, des terrines, du pot-au-feu et autres délices. « Nous avons délibérément choisi de ne pas avoir d’horaires fixes pour la vente directe. Les gens ont pris l’habitude de nous envoyer un SMS pour nous demander si nous étions sur place au moment où ils veulent passer ». Le reste de l’année, il est toujours possible d’acheter nos produits, y compris sur les marchés de Charolles ou celui de Marcilly-la-Gueurce, le deuxième vendredi du mois à partir du mois de mai.

… Ou produits locaux ?


« Nous ne pouvons évidemment pas tout produire sur place », explique Cédric qui rappelle, non sans ironie, qu’il serait difficile de proposer du café ou du cacao produit sur place. Pour alimenter leur plancha, mais aussi pour pouvoir proposer de la viande de bœuf au menu, pas question de se mettre à l’élevage, d’autant plus que c’est un éleveur de Saône-et-Loire, Jean-Philippe Baligand, qui les approvisionne. Les vins sont tous des appellations de Bourgogne, les jus de fruits Magritte sont produits dans la Drome. « Enfin, pour les cocktails on achète la base de cocktail dans l’Ain à une boutique qui s’appelle Viva Cuba. Coté traiteur on fait beaucoup de choses variées ». Ces produits locaux servent à alimenter l’auberge, mais aussi et surtout le service traiteur ou les repas de groupe réservable en semaine dans une salle capable d’accueillir en moyenne une quarantaine de personnes. Mélanie concède qu’il est difficile de s’approvisionner auprès d’un maraîcher local en quantité suffisante malgré les efforts du Jardin de Champlecy. Tous deux estiment qu’à l’avenir, le cahier des charges de la ferme-auberge labellisée Bienvenue à la ferme devrait autoriser les cuisines à s’approvisionner à une dizaine de kilomètres à la ronde, « parce qu’il est actuellement impossible de tout produire, insistent-ils. Que l’on élève soit même ou que l’on serve de la viande issue d’un élevage situé à dix kilomètres, on reste dans une logique vertueuse ». Une bonne opération pour les éleveurs à proximité, mais aussi pour les clients. Pour rappel, actuellement ″le pourcentage minimum de produits issus de l’exploitation pour répondre aux exigences de la charte Bienvenue à la Ferme doit être de 51 % en valeur de chiffre d’affaires″ comme le confirme Paul Thomas, conseiller de la chambre d’Agriculture.

*Possibilité de dormir dans un tonneau aménagé avec sauna et bain nordique en option.

Bienvenue à la Ferme

Créé il y a plus de 30 ans, le réseau de référence sur les circuits courts et l’agritourisme propose aux consommateurs d’aller à la rencontre de ses 8.000 agriculteurs adhérents et de se fournir directement auprès d’eux. En Saône-et-Loire, Bienvenue à la ferme est portée par la chambre d’Agriculture et regroupe une soixantaine de producteurs que ce soit en vente directe de produits fermiers, en fermes-auberges, en gîtes ou chambres d’hôtes, mais aussi en accueil de camping-cars et autres activités équestres, de loisirs et de découvertes agricoles. L’un des principaux objectifs du réseau est de soutenir l’économie locale, mais aussi de promouvoir et de valoriser le savoir-faire agricole. En rejoignant le réseau, les producteurs reçoivent une visite d’agrément et s’engagent à respecter les chartes de qualité Bienvenue à la ferme, garantissent ainsi aux consommateurs la qualité de leurs prestations touristiques et agricoles. En contrepartie, l’adhésion assure une reconnaissance de leur identité et leur permet de professionnaliser leurs activités de vente directe et/ou d’accueil à la ferme, de démultiplier leur communication, de gagner en visibilité et en notoriété.