Premiers échos des vendanges 2020
Déceptions pour les pinots côté rendements seulement

Cédric MICHELIN
-

Alors que tous les voyants étaient au vert encore en juillet, la sécheresse et la chaleur ont fait basculer les rendements en août. Les premiers échos des vignobles laissent craindre une baisse des volumes relativement conséquente pour les pinots noirs. La situation en chardonnay n’est pas encore tranchée mais mal engagée aussi. Les vignerons espèrent encore des pluies. Les vendanges sont saines et permettent parfois d’attendre un peu. Les vignerons récoltent à maturité, laissant présager de beaux équilibres.

Déceptions pour les pinots côté rendements seulement
À Saint-Vallerin en pleine récolte, Aline Flamand constate que cette année les grappes sont particulièrement petites…

Il est encore trop tôt pour dresser un bilan complet mais, pour l’heure, le sentiment général semble être mitigé dans les vignobles. Après une année exceptionnelle - encore une ! – de précocité, en raison d’un hiver doux, d’un début de cycle précoce s’accélérant encore avec les longues journées d’été, les vignerons envisageaient des vendanges combinant qualité et quantité. Pour la qualité, aucun aléa (grêle ou autre) n’est venu pour l’heure remettre en cause cet acquis. En revanche, côté quantité, les mêmes vignerons ne cachent pas leur déception de ne justement pas faire le plein côté rendements.
Surtout en pinots noirs qui étaient particulièrement précoces. Les parcelles pour les vins de base à crémant ont commencé à être récoltées dès mi-août. « Déjà pour les crémants, il fallait se tenir prêt et ne pas se laisser surprendre » pour récolter autour des 10° de sucre. Au final, le président de l’UPECB (Crémant de Bourgogne), Édouard Cassanet estime qu’avec les chardonnay, « les volumes devraient être là » - du côté du Mâconnais en tout cas - pour l’appellation effervescente. Ce qui n'est pas forcément le cas pour les appellations tranquilles...

Des vignes bloquées

Partout, notamment en sol avec peu de réserve hydrique ou pour les jeunes vignes moins bien enracinées, les pinots connaissent des déconvenues après des semaines sans réelle pluie et les chaleurs qui ont très certainement « bloqué » les vignes. Les pinots pourraient finir avec « moitié moins de rendement » prédisent certains pour certaines parcelles ou secteurs. Entre -20 et -40 % de volume sont évoqués selon les premiers échos. Il en va de même, semble-t-il, pour l’ensemble de la région Bourgogne, notamment en Côte-d’Or.
« Reste que l’on n’aurait pas imaginé en juillet autant de petits volumes, en rouge comme en blanc », regrette François Legros, président de la cave de Buxy. Cette semaine, la cave commençait à peine les chardonnay des appellations villages (Montagny…). Laurent Cottenceau pour l’appellation Montagny témoigne que « les raisins sont jolis d’un côté et tout grillé de l’autre ».

Magnifique équilibre

Par contre, dans le Mâconnais comme dans le Chalonnais, « c’est magnifique » en terme d’équilibre. Les degrés sont excellents autour de 12,5-12,8° en cette semaine. « L’acidité a eu le temps de bien diminuer » heureusement.
L’état sanitaire aussi est impeccable. Et tout sera fait pour tirer le maximum et ne rien compromettre. « Bien qu’en quantité insignifiante, nous avons décidé de dédier un quai aux quelques parcelles qui avaient subi des attaques d’oïdium », met-on par exemple en avant à Buxy. Évidemment, aucune trace de pourriture avec cette sécheresse.
Les quais de vendanges ouvraient également tôt (6 h) pour permettre de rentrer des raisins « frais ». C’est donc toute l’organisation qui s’est adaptée de partout, avec notamment certaines troupes de vendangeurs qui ont pu débuter à 4 h certains matins. Les « groupes froid » ont également permis d’abaisser de quelques degrés les moûts dans certaines caves.

Eau secours

Du côté de l’appellation Saint-Véran, là aussi, le mot d’ordre est adaptation. Prissé et Davayé sont lancés mais pas totalement les secteurs plus « tardifs » de Chânes, Saint-Vérand… « Certains hésitent encore à ce jour à ramasser ou pas », constate Kevin Tessieux, le président du cru. Les analyses se multiplient à la vigne et en laboratoires. Les outils d’aide à la décision se mettent à jour. « On fait des prélèvements et il nous faut encore un peu attendre la maturité pour les chardonnay », prend avec recul, Marc Sangoy, président de la cave de Lugny.
Il reste donc encore du temps. C’est pourquoi, Jérôme Chevalier veut rester « prudent » et ne veut pas encore se livrer au jeu des pronostics. Des pluies sont annoncées ce weekend qui pourraient faire du bien pour les rendements en blancs, en Mâcon ici en l’occurrence pour le président de l’UPVM. Espérons. Au risque sinon de finir avec des vendanges « jalouses » comme disent les anciens, en raison de l’hétérogénéité des volumes entre deux confrères.
Globalement, mi septembre, tout devrait néanmoins être rentré. Les vendanges pourraient donc s’étirer sur quatre à cinq semaines au final pour ce millésime 2020.

Beaujolais : trois semaines d'avance

Dans les zones les plus précoces du Beaujolais, les premiers coups de sécateurs ont été donnés en fin de semaine dernière, avec environ trois semaines d'avance. Il s'agit du « deuxième millésime le plus précoce après 2003 depuis la mise en place du réseau Maturation en 1992 », affirme Inter Beaujolais (interprofession) dans un communiqué du 18 août. Le millésime 2020 aura aussi été marqué par la sécheresse, qui « est venue concentrer les raisins », avec des poids des baies et des grappes « relativement faibles », selon le communiqué. « L'état sanitaire du vignoble reste exceptionnel » et les vendanges sont attendues « dans la moyenne de ces cinq dernières années », ajoute l'interprofession. En raison de l'épidémie de Covid-19, les vignerons se sont vus distribuer plus de 15.000 sacoches et gobelets, ainsi que 55.000 masques, « pour leur permettre, en tant qu'employeurs, d'équiper leurs saisonniers ». 25.000 vendangeurs sont attendus en Beaujolais, qui reste « le seul vignoble, avec la Champagne, où les vendanges manuelles sont majoritaires », avance Inter Beaujolais.