EXCLU WEB / Industries alimentaires : l’export comme levier de croissance

Cédric Michelin
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L’Association nationale des industries alimentaires a organisé sur le salon international de l’alimentation (SIAL) une table ronde sur le thème : « L’export des IAA à l’heure des crises : quels impacts et opportunités ? ». 

L’année 2021 a semblé marquer le retour de la croissance des industries agroalimentaires (IAA) avec une hausse de +12 % en volume des exportations françaises après deux années de crise et d’incertitudes (2020 et 2021). « Le secteur alimentaire se maintient bien et les premiers signes pour 2022 sont encourageants », note Pascale Thieffry, directrice du département agroalimentaire chez Business France, l’agence française pour l’exportation (*). « Même au plus fort de la crise, les entreprises ont su être résilientes. Elles ont trouvé dans l’export de nombreux leviers de croissance, grâce aux chèques relance export, aux e-vitrines et aux rendez-vous virtuels avec les acheteurs potentiels », explique-t-elle. « En cas de crise, la règle est qu’il faut s’adapter aux clients et coller au plus près de leurs besoins », affirme Camille Mancelle, chef des ventes de lait infantile à la coopérative d’Isigny-Sainte-Mère. Et surtout éviter de tirer des plans sur la comète, dit-il en substance. En effet, la coopérative pensait que la crise du Covid allait accroître le nombre de naissances, tant en Chine (un des débouchés majeurs d’Isigny-Ste-Mère) qu’en Europe. « Or nous avons vu nos commandes chuter avant un retour à la normale en 2021 », précise-t-il.

« Anticiper au mieux »

Après le retour d’une croissance vite freinée par la hausse de l’inflation aggravée par le conflit ukrainien, les industries alimentaires font face à un mur de surcoûts, notamment sur l’énergie et les matières premières. « Le prix du lait a augmenté d’environ 25 % depuis un an, mais on parvient à le maîtriser. En revanche, le prix des matières premières industrielles a explosé : +70 % », détaille Camille Mancelle qui concède pouvoir répercuter une grande partie de ces augmentations sur le consommateur final, car « le lait infantile un produit de première nécessité pour de nombreux ménages. Sur la qualité, on ne revient jamais en arrière ». Même si le nombre d’entreprises qui exportent ont baissé depuis 2021, souligne Angela Cheptea, chercheuse en économie internationale à l’Inrae de Rennes et que « nous avons peu de visibilité pour l’année 2023 », s’inquiète le dirigeant d’Isigny-Sainte-Mère, le maître mot sera « d’anticiper au mieux », insiste Pascale Thieffry. Les IAA ont cependant du mal à lire dans une boule de cristal, notamment sur le prix du fret maritime qui, bien qu’il ait baissé ces derniers mois « reste deux fois supérieur à ce qu’il était fin 2019 », souligne Angela Cheptea. Bien malin aussi celui qui peut prédire ce que seront les taux de change entre le dollar et l’euro fin 2022 ou en février 2023. Un trop fort dollar peut grever la trésorerie d’une entreprise et certains pays comme « l’Égypte, la Libye et l’Éthiopie rechignent à sortir des devises », explique Camille Mancelle. Mais les IAA se veulent tout de même optimistes car de nombreux pays, à commencer par le Chine et l’Europe, restent des moteurs économiques.

« Chasser en meute » 

Un peu plus tôt dans la matinée, à l’occasion de l’inauguration du stand de l’ANIA, le président de la Coopération agricole, Dominique Chargé, avait plaidé pour que l’Etat aide les entreprises à avoir de la visibilité, notamment sur les énergies, « car nous devons continuer à produire pour exporter ». Considérant que le local est complémentaire de l’international « et constitutif de notre compétitivité », il a ajouté qu’il « est nécessaire de chasser en meute pour gagner des parts de marché, faire valoir notre excellence et notre souveraineté alimentaire ». Pour les Chinois, la France c’est l’image « des vaches dans les pâturages, un clocher et la mer », a-t-il souri. « Muscler la France à l’export, c’est notre première préoccupation », a insisté Jean-Philippe André, président de l’ANIA qui a plaidé pour une déconnection entre le prix du gaz et celui de l’électricité afin de rendre certaines entreprises plus compétitives. Mais c’est une décision qui ne pourra cependant être prise qu’à l’échelle européenne a rappelé Olivia Grégoire, la ministre déléguée aux PME et au Commerce. 

(*) Elle est née en 2015 de la fusion d'Ubifrance et de l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII).