Les annonces d'Attal, Le Maire et Fesneau

Cédric Michelin
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En déplacement le 26 janvier dans un élevage bovin à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne) pour répondre aux manifestations des agriculteurs, le Premier ministre a annoncé « l’arrêt de la trajectoire de hausse du GNR » (gazole non routier) et d'autres annonces. Un peu plus tôt dans la journée, les Ministre de l'Economie et de l'Agriculture ont aussi fait des annonces.

Les annonces d'Attal, Le Maire et Fesneau

Manifestations: Attal abandonne la «trajectoire de hausse du GNR» et simplifie le paiement 

En déplacement le 26 janvier dans un élevage bovin à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne) pour répondre aux manifestations des agriculteurs, le Premier ministre a annoncé «l’arrêt de la trajectoire de hausse du GNR» (gazole non routier). La hausse progressive de la taxation du GNR prévue jusqu’en 2030 – et négociée avec la FNSEA – est donc abandonnée. Gabriel Attal a dit «assumer» cette «décision de bon sens» qui n’aura, selon lui, «aucun impact sur les finances publiques», car l’État s’était engagé à reverser le produit de cette hausse aux agriculteurs. Par ailleurs, le chef du gouvernement a annoncé la «déduction de l’exonération en pied de facture», comme demandé par la FNSEA. «Quand vous serez livrés en carburant, la déduction sera faite immédiatement, et l’État compensera les distributeurs», a-t-il détaillé, précisant que ce système est «acté avec les distributeurs» de carburant. Le Premier ministre a dit vouloir mettre fin au «système kafkaïen» dans lequel les agriculteurs devaient acheter leur carburant, déposer un dossier de demande d’exonération, puis être remboursé l’année suivante. Enfin, M. Attal a indiqué que les pouvoirs verseront plus tôt que prévu, «dès le mois prochain» une avance de 50% sur l’exonération du GNR, soit 215 M€.

 

Manifestations: aides d’urgence rehaussées pour MHE, bio et intempéries en Bretagne 

En déplacement en Haute-Garonne le 26 janvier, le Premier ministre a annoncé des enveloppes en hausse pour plusieurs aides d’urgence récemment déployées, ainsi que l’accélération des versements correspondants. Ainsi, l’indemnisation des frais vétérinaires due à la maladie hémorragique épizootique (MHE) sera portée à 90%, au lieu des 80% annoncés par le ministre de l’Agriculture le 19 janvier. Ces aides MHE totaliseront 50 M€, ce qui constituera «une première mise», selon M. Attal, étant donné que la maladie est susceptible de causer de nouveaux dégâts au printemps. Le guichet pour ces indemnisations «ouvrira d’ici le 5 févier» et elles seront versées «très vite, à partir de février». Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé que le gouvernement «va remettre 50 M€» dans les dispositifs d’aide aux producteurs bio pour «accompagner l’ensemble des agriculteurs en difficulté». Après 94 M€ d’aides ces derniers mois, en deux vagues, la Fnab (producteurs bio) a chiffré les besoins à «plus de 250 M€ par an depuis deux ans». Enfin, M. Attal a annoncé vouloir «doubler le fonds d’urgence pour la Bretagne» qui a été mis en place après la tempête Ciaran, en novembre. Destiné à trois régions (Hauts-de-France, Bretagne et Normandie), ce fonds était initialement doté de 80 M€, puis abondé de 15 millions d'euros.

 

Manifestations: Attal promet un plan de soutien pour les viticulteurs la semaine prochaine 

«Marc Fesneau reviendra dans les tout prochains jours» en Occitanie pour présenter «un plan spécifique face à la crise que connaît le secteur» du vin, a annoncé le Premier ministre lors d’un déplacement en Haute-Garonne le 26 janvier. Ce plan sera doté d’une «enveloppe conséquente», a promis Gabriel Attal et comprendra «des mesures de trésorerie» pour faire face à la surproduction. «Je ne laisserai pas les viticulteurs être étranglés par les taux d’intérêt», a encore déclaré le chef du gouvernement. La viticulture traverse une crise de surproduction due à une baisse de la consommation, notamment des vins rouges. Les viticulteurs du sud de la France étaient en première ligne des mobilisations de ces derniers jours, avec des actions parfois violentes: incendie d’un bâtiment de la MSA à Narbonne, déclenchement d’explosifs à la Dreal à Carcassonne. Le 23 janvier, les caves coopératives ont demandé des aides à l’arrachage pour permettre «une sortie digne à nos ainés» et «recalibrer» les exploitations des jeunes installés, ainsi que des mesures conjoncturelles «pour éviter l’effondrement des marchés». Un premier plan d’aides a été récemment déployé dans le vignoble bordelais.

 

Manifestations: le Premier ministre annonce «dix mesures immédiates de simplification» 

Lors de son déplacement en Haute-Garonne le 26 janvier, Gabriel Attal a annoncé prendre «dix mesures immédiates de simplification» qui feront l’objet de décrets «demain et la semaine prochaine». Entre autres, «on va abroger le délai exceptionnel» de 4 mois pour déposer un recours contre les projets agricoles; celui-ci «passera à deux mois» comme pour l’ensemble des entreprises. Par ailleurs, M. Attal a indiqué que «l’OFB sera sous la tutelle des préfets» et qu’une réflexion sera menée pour «faire baisser le niveau de pression» lors des contrôles environnementaux. Le chef du gouvernement a aussi annoncé le passage à un «contrôle administratif unique»: les préfets devront élaborer des «plans de contrôle» dans les exploitations avec un objectif de «pas plus d’un passage dans l’année». Autre mesure concernant les haies: «On va passer de 14 réglementations à une seule», a encore promis M. Attal. D’autres mesures avaient déjà été annoncées, comme l’accélération des projets de stockage d’eau, la création d’une «présomption d’urgence», ou encore l’accélération des autorisations pour le curage des cours d’eau. Par ailleurs, le gouvernement lance un «mois de la simplification» d’ici le Salon de l’agriculture, invitant les représentants agricoles à travailler avec les préfets sur des simplifications de procédures au niveau départemental.

 

Manifestations: Bayle promet de libérer l'A64, la FNSEA appelle à «poursuivre la mobilisation» 

L'éleveur occitan Jérôme Bayle, initiateur du premier barrage devenu une figure de la contestation, a estimé avoir «gagné» sur trois points principaux: le GNR, l'irrigation et la MHE. "Si on s'est battus, c'est pour arrêter tout ça (...) ce soir je vous annonce que demain midi l'autoroute pourra circuler», a-t-il annoncé aux côtés du Premier ministre. Mais l'Occitanie n'est pas la France, a rappelé quelques minutes plus tard le patron de la FNSEA, Arnaud Rousseau, douchant les espoirs d'une sortie rapide de la crise en appelant à «poursuivre cette mobilisation». «Ce qui a été dit ce soir ne calme pas la colère, il faut aller plus loin», a-t-il dit sur TF1, alors que le syndicat majoritaire, associé aux Jeunes agriculteurs, a mobilisé «plus de 72.000 agriculteurs» dans «85 départements» pour exprimer un malaise profond. De son côté, Véronique Le Floc'h, la présidente de la Coordination rurale, deuxième syndicat agricole, a prévenu que les tracteurs de ses adhérents allaient «rester sur les routes», regrettant que le recul du gouvernement sur le GNR ne soit pas allé plus loin. La Confédération paysanne, troisième syndicat, classé à gauche, a aussi déploré des mesures qu'elle a qualifiées de «très largement insuffisantes».

 

Manifestations: incendie à Narbonne d'un bâtiment de la Mutualité sociale agricole 

Un bâtiment vide de la Mutualité sociale agricole (MSA) à Narbonne a été la cible le 26 janvier d'un incendie en marge d'une manifestation d'agriculteurs, a-t-on appris auprès de la préfecture de l'Aude. «e bâtiment de la MSA était vide, c'est un bâtiment de 300 m2 avec un étage, il y a eu un début d'incendie», a indiqué à l'AFP une porte-parole de la préfecture, précisant que l'incendie s'était déclaré «en marge de la manifestation» des agriculteurs réunis sur place. «Le feu est maîtrisé» et «il n'y a pas de victime», a précisé cette porte-parole, ajoutant qu'elle n'avait pas «à ce stade d'évaluation des dégâts» alors que des vidéos diffusées par des témoins sur les réseaux sociaux montraient une aile du bâtiment fortement endommagée par les flammes. Selon un correspondant de l'AFP sur place, ce sont des palettes incendiées à proximité immédiate du bâtiment qui ont provoqué l'incendie de celui-ci. «Ces exactions sont intolérables d'autant plus, que si le directeur et ses services n'avaient pas pris la précaution de vider le bâtiment de son personnel (jeudi), cela aurait mis des personnes en danger», a réagi auprès de l'AFP Pascal Cormery, le président de la caisse centrale de la MSA.

 

Manifestations: le Modef se mobilise à son tour, y compris après les annonces d’Attal 

Le Mouvement de défense des exploitants familiaux (Modef) «se mobilise pour obtenir des prix rémunérateurs les 26 et 27 janvier», annonce-t-il dans un communiqué le 26 janvier. Avec ce mot d’ordre, l’ensemble des syndicats agricoles ont lancé un appel à manifester, après ceux de la Confédération paysanne, de la Coordination rurale et de la FNSEA. D’ores et déjà, le Modef «prend une part active aux manifestations et aux soulèvements paysans», rappelle-t-il. Le syndicat appelle au rassemblement «en Corrèze, dans le Puy-de-Dôme, en Ardèche et dans les Hautes-Alpes». Des actions qui devaient se poursuivre samedi 27, au lendemain des annonces de Gabriel Attal. Proche du PCF, le Modef estime sur le fond que «la politique libérale de notre gouvernement a assez duré». Le but de ses actions: «Garantir un réel revenu aux paysans» et «recouvrer notre souveraineté alimentaire par une politique agricole, alimentaire durable et sociale». À cette occasion, le syndicat «soumet au débat public» 45 propositions, rappelant des mesures qu’il défend de longue date, comme l’instauration de «prix planchers rémunérateurs», l’interdiction de la vente à perte, ou encore l’encadrement des marges de la grande distribution.

 

Manifestations: «pas question» que la CGT rejoigne les agriculteurs, répondent les JA 

«Pour l’instant, il n’est pas question que la CGT se rallie à nous», a déclaré le président des Jeunes agriculteurs (JA), Arnaud Gaillot, le 26 janvier sur Sud Radio (vidéo complète). «On ne s'est jamais rallié à des mouvements sociaux. On n’a jamais profité d’autres mouvements sociaux pour aller expliquer notre désarroi», a-t-il souligné. Et de préciser que les JA ne partagent pas «les mêmes combats» et «les mêmes enjeux». L’intervention de M. Gaillot succède à l’appel lancé la veille par le syndicat de travailleurs à ses militants à «aller rencontrer» les agriculteurs mobilisés. «Ce sont les mêmes qui tirent les revenus des paysans vers le bas et qui exploitent les salariés dans l’agroalimentaire et la grande distribution», a déclaré Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, sur France 2 le 26 janvier. Et d’ajouter que «les salariés et les paysans peuvent s’unir pour dénoncer ces multinationales et ces marques qui sont réalisées sur le dos des salariés et des paysans». La CGT est en contact avec la Confédération paysanne, et des militants CGT sont bien «bien accueillis» sur les barrages où ils se rendent, en Ariège ou encore dans la Manche, a affirmé Mme Binet.

 

Négociations commerciales: les contrôles de la DGCCRF montrent des infractions à Egalim 

À l’occasion d’une allocution devant la presse à l’issue du comité de suivi des négociations commerciales, le 26 janvier, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a indiqué que les contrôles effectués par la DGCCRF (Répression des fraudes) «ont fait apparaître un certain nombre d’infractions [à la loi Egalim 2] de la part des industriels comme de la part de certains distributeurs». Les entreprises en infraction recevront «dès la semaine prochaine» des «injonctions de se conformer à la loi». «Qu’il y ait encore des contrats dans lesquels il n’y a pas de transparence, qu’il y ait encore des accords qui soient conclus sans contrat ou sans clause de révision des prix, c’est totalement inacceptable», affirme Bruno Le Maire. Si les injonctions ne sont pas suivies, «des sanctions tomberont, vite, et elles iront jusqu’à 2% du chiffre d’affaires», poursuit-il. Il annonce un doublement des contrôles sur l’application d’Egalim. La DGCCRF a également relevé des infractions sur l’étiquetage de l’origine de produits présentés comme français. «Des sanctions tomberont», assure Bruno Le Maire. «Dire "J’aime les produits français" (…) quand on va chercher une grande part de ses produits à l’extérieur de ses frontières, c’est insupportable», abonde le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, aussi présent à la réunion, en appelant «à une forme de patriotisme agricole».

 

Egalim, origine, Siqo: le ministre de l’Agriculture dispose de la DGCCRF pour les contrôles 

Le ministère de l’Agriculture et de la souveraineté alimentaire (Masa) «dispose de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes» pour les contrôles portant sur les produits agricoles, forestiers et alimentaires, d’après le décret relatif aux attributions du ministre, paru au Journal officiel le 25 janvier. En d’autres termes, le Masa «dispose désormais de la capacité de donner des instructions à la DGCCRF pour l’ensemble des contrôles relevant des produits alimentaires», notamment dans le cadre de l’application des lois Egalim, explique le ministère dans une note transmise à la presse. D’autres domaines comme l’étiquetage de l’origine des produits, les informations aux consommateurs et les signes d’identification de la qualité et de l’origine (Siqo) sont couverts par les attributions de la Rue de Varenne. «Cela permettra au ministre en charge de l’Agriculture de prendre rapidement l’attache de la directrice générale de la DGCCRF afin de partager ses attentes en ce qui concerne les contrôles», indique le cabinet de Marc Fesneau. Le décret mentionne également la police unique chargée des contrôles de sécurité alimentaire, placée sous la direction du ministre de l’Agriculture.

 

Manifestations: les ONG compatissent, mais dénoncent un faux combat contre l’écologie 

Les associations de défense de l’environnement FNE, Greenpeace, WWF, LPO, Générations futures ainsi que la Fnab (producteurs bio) ont tour à tour vivement réagi à «la colère des agriculteurs», avec un message partagé. Si elles partagent le besoin d’une «juste rémunération» des agriculteurs, elles appellent à ne «pas se tromper de combat» en faisant de l’agroécologie un bouc émissaire, a déclaré Jean Burkhard, directeur de plaidoyer du WWF, le 25 janvier. Réagissant vertement aux 24 revendications de la FNSEA et des JA présentées le 24 janvier, Générations futures estime «totalement scandaleux et inacceptable» le rejet en bloc d’Ecophyto et des ZNT, la remise en cause de l’indépendance de l’Anses et la demande d’affaiblissement de l’OFB. Céder sur ces points constituerait «un saut en arrière de plus de 15 ans», s’émeut l’ONG, pour qui réduire la dépendance de l’agriculture aux phytos «doit rester un cap». Même constat chez FNE, qui qualifie les demandes de la FNSEA d’«inquiétantes» et dévoile, le 26 janvier, 15 propositions misant sur l’agroécologie pour «sortir de la crise». De même, la LPO appelle à envisager les «contraintes environnementales» comme «le chemin d’une agriculture durable».