Les brèves du 24 février 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
-

Voici les brèves du 24 février 2023

Les brèves du 24 février 2023

Crise du bio : les producteurs dénoncent le manque de réponses de la Rue de Varenne
« Nous sommes en colère de nous être faits balader de bureau en bureau pour nous entendre dire que nous ne répondons jamais assez bien aux critères », déplore Philippe Camburet, président de la Fnab (agriculteurs bio), dans un communiqué du 23 février rédigé conjointement avec les transformateurs du Synabio, les distributeurs (Synadis) et les coopératives (Forébio). Car, malgré la mobilisation de l’ensemble des acteurs depuis plusieurs mois pour élaborer un plan de sauvegarde face aux difficultés de nombreuses filières bio, et les propositions détaillées présentées le 21 février au cabinet du ministre, « le soutien gouvernemental tant espéré ne vient pas », déplorent les organisations. Et à l’inverse, soulignent-elles, l’Allemagne a adopté « son nouveau plan bio avec une ambition de 30 % de surfaces en 2030, 30 % du budget de la recherche soit 35 M€ et un engagement à financer l’aide au maintien ». Dans un autre communiqué publié le même jour, la Confédération paysanne regrette qu’« aucune réponse ne [ne lui ait] été apportée ». La Conf’ exhorte le président de la République à « donner très rapidement des signaux » sur la bio, notamment au travers d’une aide d’urgence. Dans son propre communiqué, la FNSEA estime aussi que « la réponse du ministère […] n’est pas satisfaisante ». Le syndicat demande une « aide conjoncturelle » pour les producteurs et veut « revoir » l’objectif de 18 % de la SAU en bio en 2027.

Carbone : le marché obligatoire dépasse les 100 €/t
Après une augmentation de près de 20 % depuis le début de l’année, la tonne de CO2 a dépassé les 100 € sur le marché obligatoire européen. Ce cours correspond aux crédits que les entreprises des secteurs de la sidérurgie, de la cimenterie ou de l’énergie soumises au système SEQE n’utilisent pas, et qu’elles peuvent revendre à leurs concurrents. Sur LinkedIn, Jean-Marc Jancovici a salué cette augmentation, puisqu’un prix élevé « incite les industriels à se décarboner ». Pour autant, le polytechnicien spécialiste du climat estime que « ce prix a une faiblesse : personne ne sait ce qu’il deviendra à l’avenir, car un prix de marché n’est jamais prévisible ». Face aux incertitudes, rappelle-t-il, son organisation Shift project avait proposé d’encadrer les enchères autour du marché obligatoire par un prix de réserve croissant dans le temps. Dans une interview accordée à nos confrères d’Ouest-France (article payant) et publiée le 23 février, l’eurodéputé Renaissance Pascal Canfin estime qu’un nouveau marché du carbone pourrait être lancé dans le secteur alimentaire grâce aux crédits générés en agriculture. Ce marché pourrait fixer un prix plancher de 70 €/t, contre 40 €/t actuellement chez France Carbon Agri, afin que les agriculteurs ne portent pas « seuls toutes les contraintes ».

Importations ukrainiennes : Bruxelles propose de renouveler la suspension des droits de douane
En vue de stimuler l’économie ukrainienne, au ralenti depuis l’invasion russe, la Commission européenne a proposé le 23 février (dans le cadre de l’accord d’association UE-Ukraine) de renouveler pour un an la suspension de tous les droits de douane et contingents tarifaires sur les produits ukrainiens importés dans l’UE. Avec les « Voies de solidarité » mises en place pour aider l’Ukraine à exporter ses céréales, la suspension des droits de douane – en vigueur depuis juin 2022 – a « permis aux exportations ukrainiennes de rester remarquablement stables en 2022, malgré les perturbations causées par la guerre », souligne Bruxelles. Certains États membres limitrophes de l’Ukraine (Pologne, Bulgarie, République tchèque, Hongrie, Roumanie et la Slovaquie) avaient toutefois alerté à plusieurs reprises la Commission de l’impact négatif de l’afflux de céréales ukrainiennes bon marché sur la compétitivité de leurs agriculteurs. Consciente de ces perturbations, Bruxelles a ainsi intégré dans sa nouvelle proposition un mécanisme de sauvegarde accéléré pour protéger le marché de l’UE si nécessaire. Avant d’entrer en vigueur, le règlement devra faire l’objet d’une approbation conjointe du Parlement européen et du Conseil de l’UE.

UE/Mercosur : la FNB attend de Macron qu’il « réitère son engagement à ne pas signer »
« J’espère que, lors de sa visite au Salon de l’Agriculture, le chef de l’État réitérera son engagement à ne pas signer l’accord UE/Mercosur », a déclaré le nouveau président de la FNB (éleveurs de bovins viande, FNSEA) Patrick Bénézit le 21 février. Et l’éleveur cantalien de marteler : « Nous souhaitons avoir la garantie du chef de l’État qu’il n’y aura pas d’accord concernant la viande bovine avec le Brésil. » Lors du dernier congrès de la FNB, le 2 février à Metz, le ministre de l’Agriculture a lancé : « Emmanuel Macron a dit [en août 2019] qu’il ne signerait pas l’accord en l’état. Ça n’a pas changé », malgré la volonté affichée du nouveau président brésilien Lula de freiner la déforestation, « donc, en l’état, c’est non ». Une déclaration insuffisante pour le nouveau président de la FNB, qui estime que « le ministre de l’Agriculture n’a pas répondu clairement », notamment sur la question du modèle d’élevage à privilégier. Le 31 janvier, le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans avait déclaré que l’UE espérait ratifier l’accord UE/Mercosur « avant le prochain sommet avec l’Amérique latine qui aura lieu les 17 et 18 juillet à Bruxelles ». La filière bovine est parmi les plus concernées par l’accord UE/Mercosur, qui prévoit un quota d’importation de 99 000 tonnes de viande.

Indemnisations influenza : la CFA s’impatiente et veut le même dispositif qu’en 2021-2022
Après une manifestation à Nantes le 20 février, les éleveurs « attendent […] avec impatience et attention les annonces du ministre » sur les indemnisations pour l’épisode d’influenza 2022-2023, indique la CFA (aviculteurs, FNSEA) dans un communiqué le 23 février. Marc Fesneau pourrait annoncer les modalités d’indemnisations et de repeuplement vendredi 24 février, à en croire la page Facebook des Canards en colère. Dans ce cadre, la CFA demande « la reconduction à l’identique des dispositifs précédents d’accompagnement », à savoir les indemnisations sanitaires (foyers et dépeuplements) et économiques (pertes de production). Comme le regrette la CFA, « les éleveurs se voient refuser de la part des banques des reports d’échéance et des avances de trésorerie », car les modalités de ces aides « ne sont pas encore connues ». Par ailleurs, l’association spécialisée souhaite une « revalorisation des VMO (valeurs marchandes objectives) », sur lesquelles sont basées les indemnisations. « Les coûts de production ont fortement augmenté depuis l’épisode précédent », fait valoir la CFA. Avec 306 foyers en élevage au 22 février, date du dernier bilan, l’épizootie d’influenza ralentit en France, notamment dans les Pays de la Loire, où la profession travaille sur un plan de repeuplement progressif.

Pesticides : Pollinis attaque la prolongation d’autorisation du boscalid dans l’UE
L’association spécialiste des pollinisateurs Pollinis annonce avoir déposé le 16 février un recours auprès du tribunal de l’Union européenne (Luxembourg) contre « la prolongation de mise sur le marché accordée au boscalid ». Ce fongicide de la famille des SDHI fabriqué par BASF, rappelle l’ONG, a vu son autorisation de mise sur le marché expirer en 2018, mais celle-ci a été prolongée le temps de l’évaluation nécessaire au renouvellement. Or, pour Pollinis, cette prolongation « découle d’une interprétation biaisée et abusive de l’article 17 du règlement relatif à la mise sur le marché des produits phytosanitaires ». L’ONG défend non seulement que cette prolongation nie les « risques sanitaires et environnementaux », mais aussi que le retard dans l’examen ne serait pas complètement indépendant de la volonté des fabricants. La Commission, dans une réponse envoyée à l’association, aurait ainsi reconnu « ne pas avoir enquêté sur le rôle qu’a pu jouer BASF dans l’ajournement du réexamen de son pesticide ». Selon les calculs de l’association, 119 pesticides bénéficieraient à ce jour de prolongations sur les 453 substances autorisées au total.

Plan souveraineté fruits et légumes : Felcoop demande un appui fort au ministère
Dans un manifeste diffusé le 23 février, la fédération des coopératives fruitières, légumières et horticoles (Felcoop) « affirme son soutien absolu aux manifestations d’exaspération des producteurs » ces dernières semaines, comme l’arrachage de vergers. Le syndicat, qui rassemble 200 coopératives et Sica (marques Blue Whale, Prince de Bretagne, Rougeline, Prunille, Unicoque…) estime que « l’arboriculture et le maraîchage sont en déprise » depuis de nombreuses années, sous le poids de « la sur-règlementation, la sur-transposition des règles européennes, sans application de clauses miroir », ainsi que de « la complexification des cahiers des charges ». Une situation aujourd’hui aggravée par « le contexte géopolitique et de sortie de crise sanitaire ». Alors que des annonces sont attendues sur le plan de souveraineté fruits et légumes au Salon de l’agriculture, la Felcoop appelle le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau à « poser un cadre organisationnel, structurant » pour faciliter un « retour à la compétitivité », et qui soit « protecteur des équilibres commerciaux ». Elle demande aussi « un volet conjoncturel à la hauteur de la fragilité de l’amont de la filière à qui on enlève tous les moyens de produire ».

Phytos : pour devenir plus durables, les fabricants veulent investir 10 Mrd€ d’ici 2030
À l’occasion d’une conférence de presse le 23 février, l’association rassemblant les fabricants de produits phytosanitaires Phyteis (ex-UIPP) a annoncé que le secteur prévoit d’investir 10 Mrd€ dans le développement de solutions d’agronomie digitale au niveau européen d’ici 2030, ainsi que 4 Mrd€ dans la recherche sur la bioprotection. Depuis février 2022, la nouvelle entité rassemble quatre familles de technologies, à savoir l’agronomie digitale, les biotechnologies, la bioprotection et la « phytopharmacie conventionnelle ». Elle confirme ainsi la volonté de ses membres de diversifier leurs activités, alors qu’une « pression accrue » s’exerce sur les produits phytopharmaceutiques, essentiellement en Europe. Phyteis relève ainsi un recul de 19,35 % depuis 2018, de 29,5 % depuis 2008 et de 54 % depuis 1999 des volumes de matières actives vendues à la distribution par ses adhérents en France, lesquels représentent 96 % du marché national en valeur. « Le nombre de solutions phytosanitaires autorisées diminue régulièrement », a précisé Bruno Baranne, président de Phyteis, lors de la conférence de presse. Et d’ajouter que les fabricants doivent répondre « à une triple équation », à savoir le maintien de « la performance économique des exploitations », l’amélioration de « la durabilité du modèle agricole » et la prise en considération « des attentes sociétales », dont la moindre consommation de produits de synthèse.

Climat : les recommandations des inspecteurs du MTE sur l’adaptation
À l’issue d’un audit mené dans huit pays*, les inspecteurs du ministère de la Transition écologique (IGEDD) recommandent, dans un rapport publié le 23 février, de clarifier la gestion des politiques d’adaptation. En plus d’un pilotage à la fois interministériel et local, et d’une étude nationale sur les risques, les auteurs préconisent de renforcer l’accompagnement en termes d’ingénierie, tout en mentionnant dans une future loi « la référence climatique à prendre en compte » pour ces politiques. Dans le rapport, l’agriculture fait plutôt figure d’exemple, les auteurs estimant que les exercices du Varenne de l’eau ou des Assises de la forêt pourraient être amplifiés « en répliquant ces démarches dans d’autres secteurs ». Concernant la gestion de l’eau, l’examen des plans des autres pays « ne fait pas apparaître d’approche différente sur ces sujets de ce qui est fait en France », soulignent les inspecteurs. Lutte contre les fuites dans les réseaux, réutilisation d’eaux usées, irrigation goutte-à-goutte : « La liste des leviers mobilisables est connue et citée dans tous les plans ». Plus indirectement, les inspecteurs recommandent également de « renforcer l’implication des secteurs bancaire et assurantiel », notamment pour « mieux prendre en compte l’adaptation au changement climatique dans la finance verte ».
* Allemagne, Autriche, Espagne, Royaume-Uni, Pays-Bas, Suisse, Canada et Japon

L’agriculture bio se défend d’avoir recours à plus de pesticides que le conventionnel
L’organisation de défense du secteur biologique Ifoam, l’ONG autrichienne GLOBAL 2000 et l’association internationale des fabricants de produits de biocontrôle (IBMA) ont présenté le 23 février une étude sur la comparaison toxicologique des substances actives pesticides approuvées pour l’agriculture conventionnelle et biologique en Europe. « Les différences que nous avons constatées sont aussi significatives que peu surprenantes », constatent-elles : 55 % des 256 substances actives autorisées uniquement dans l’agriculture conventionnelle sont assorties d’avertissements liés aux risques pour la santé ou l’environnement, contre seulement 3 % des 134 substances actives naturelles, également autorisées en agriculture biologique. Ces trois organisations veulent se défendre des attaques croissantes venant de « l’industrie européenne des pesticides ». Celle-ci met en garde contre les « compromis écologiques qu’implique une augmentation des surfaces en agriculture biologique qui conduirait à une hausse du volume global d’utilisation de pesticides en Europe ». Les défenseurs du bio appellent au contraire les pouvoirs publics à encourager les politiques et les stratégies visant à réduire l’utilisation et le risque des pesticides, et à renforcer l’agriculture biologique.

Céréales : Kronenbourg commercialise une bière à partir d’orge « responsable tracée »
Depuis le 14 février, Kronenbourg distribue ses premières bières de marque « 1664 Blonde » produites à partir de malt d’orge « responsable tracée » en France. C’est en juin 2022, que Soufflet (filiale d’InVivo) et le brasseur avaient annoncé avoir créé ensemble cette filière. Elle réunissait alors 45 agriculteurs partenaires, situés dans les régions Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté, avec un objectif de production de 900 ha. À l’heure actuelle, la bière est brassée avec près de 20 % de ce malt, mais l’entreprise espère « atteindre progressivement 100 % en 2026 », s’appuyant à terme sur les productions de 5000 ha d’orge, avec 250 agriculteurs concernés. Quant au cahier des charges, il inclut des assolements diversifiés, une réduction de l’empreinte carbone et une meilleure rémunération des agriculteurs via une prime d’engagement. Les consommateurs pourront suivre le parcours complet de leur bière (du champ d’orge à la bouteille) grâce à un QR code imprimé sur les nouveaux packs de « 1664 Blonde », et découvrir son agriculteur, son malteur et son brasseur.

Résidus de médicaments vétérinaires : baisse continue des cas de non-conformité dans l’UE
Les résidus de médicaments vétérinaires chez les animaux et dans les aliments d’origine animale continuent de diminuer dans l’UE, et les niveaux de conformité sont en hausse, se félicite l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) dans son rapport annuel sur le sujet publié le 23 février. Dans l’ensemble, les États membres ont constaté en 2021 – l’année sur laquelle porte l’étude – un pourcentage de 0,17 % d’échantillons non conformes (soit pour dépassement des limites légales, soit pour l’utilisation d’une molécule interdite). Ce chiffre est le plus bas enregistré au cours des 12 dernières années, période durant laquelle ce taux oscillait entre 0,19 % (en 2020) et 0,37 %. Par rapport aux résultats des quatre dernières années, la fréquence des résultats non conformes a particulièrement diminué pour les agents antithyroïdiens.

Alcool : réduire la consommation au nom des violences faites aux femmes (tribune)
La consommation d’alcool est « significativement liée au statut d’auteur mais aussi de victime de violence », rappelle l’addictologue Laurent Bègue-Shankland dans une tribune publiée le 23 février sur le site du Monde (article payant). Ces conclusions, rappelle-t-il, sont étayées non seulement par les données du ministère de l’Intérieur, mais également par une méta-analyse américaine publiée en 2018 grâce aux données de 625 000 participants. Des études en laboratoire suivant l’attitude de couples suivant la dose d’alcool ingérée montrent par ailleurs que « l’alcool favorise les conduites violentes par plusieurs mécanismes neuropsychologiques mais aussi par la légitimation culturelle ». Alors que les violences conjugales ont augmenté de 21 % en 2021, et « puisque l’alcool en est l’une des causes certaines, la société est en droit d’attendre d’Emmanuel Macron qu’il contribue par des mesures fortes à enrayer cette tendance », défend le chercheur. Prix plancher, élévation de la taxation, encadrement des promotions dans les bars, interdiction généralisée de la publicité : dans la mesure où la France fait partie des plus grands consommateurs d’alcool de l’OCDE, « il est raisonnable de chercher à la sortir du peloton de tête […] par des mesures qui ont fait leur preuve », invite le chercheur.

Siqo : les vins de Corrèze enregistrés en tant qu’appellation d’origine protégée
La Commission européenne a approuvé, le 23 février, les vins de Corrèze en tant qu’appellation d’origine protégée (AOP), qui deviennent la 3500e entrée dans le registre européen des indications géographiques. Les vins de Corrèze comprennent les vins rouges, les vins blancs et les vins issus de raisins passerillés portant la mention traditionnelle « vin de paille ». L’aire géographique de production se situe sur les contreforts des bassins fluviaux de Brive et de Meyssac, dans la partie sud-ouest du département. « Les conditions géologiques ainsi que les facteurs humains, comme les techniques de séchage, contribuent à la composition et à la structure des vins, justifiant l’AOP », explique Bruxelles. Cette dénomination s’ajoute aux 1733 vins déjà protégés.