Espaces test agricoles
Se rencontrer, se tester, s’installer

Françoise Thomas
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Le principe des espaces test agricoles est de proposer un accompagnement multi-acteurs autour des porteurs de projet essentiellement en hors cadre familial. Les rencontres annuelles du Reneta, le réseau national des espaces-test agricoles, se sont déroulées à Cluny la semaine dernière. Ce dispositif est aussi une solution pour installer la future génération d’agriculteurs…

Se rencontrer, se tester, s’installer
L’équipe de Semeurs du possible : Maryon Cantrel, Élodie Patrice, Cécile Ruppli accompagnent la mise en place des espaces test agricoles au niveau de la Bourgogne.

C’est un peu un retour aux sources car il y a quelques années, Cluny avait déjà accueilli les rencontres nationales du Reneta. Il faut dire que la ville est particulièrement sensibilisée au sujet, puisque dans le cadre du projet alimentaire de territoire (le PAT), la communauté de communes du Clunisois réfléchit très sérieusement à la mise en place d’un espace-test agricole sur son secteur…

En attendant, les trois journées organisées les 22, 23 et 24 juin derniers à l’espace des Griottons ont été l’occasion pour les différents acteurs concernés, déjà installés ou porteurs de projet venus de différentes régions, de se rencontrer et d’échanger sur le sujet. Chaque espace-test est créé en fonction du projet du futur installé et des besoins et caractéristiques du secteur, ces rencontres servent ainsi beaucoup d’échanges autour des différentes expériences, pour s’inspirer de ce qu’ont fait d’autres tout en l’adaptant à ses contraintes.

« Il n’y a pas de modèle d’espace-test établi », rappelle Jean-Baptiste Cavalier, le coordinateur national du Reneta. « Il y a actuellement 61 espaces-test en fonctionnement en France et en Belgique, ce sont 61 dispositifs configurés différemment ! », résume-t-il.

Finaliser la formation

S’il existe une charte Reneta rappelant les principes communs à respecter, le champ des possibles est vraiment vaste. Le principe est de mettre à disposition du porteur de projet une terre agricole.

Cette parcelle peut être louée à une collectivité ou à un agriculteur, notamment via une association par exemple Terre de Liens. « À l’issue de la période de test, cette terre peut être vendue ou continuer à être louée par le propriétaire ».

Actuellement, deux tendances s’observent à l’initiative de la création d’espaces test, « il y a soit une association de développement agricole et rural dans le cadre de l’accompagnement de personne en installation, et soit un établissement d’enseignement agricole car il a été identifié que les personnes passées par un BPREA par exemple ne sont pas toutes en capacité de s’installer immédiatement ». D’où l’envie de leur proposer de se tester plusieurs mois en conditions réelles sur un temps donné, avant de franchir le pas.

Ces espaces test peuvent aussi être une solution envisagée pour un agriculteur dans le cadre d’une transmission ou d’un développement d’activité sur sa ferme. « Ce peut être un agriculteur qui choisit de mettre le pied à l’étrier d’un jeune ». Des situations qui se rapprochent alors beaucoup du dispositif droit à l’essai, mis en place par Gaec&Sociétés (voir notre édition du 24 juin 2022), « nos deux associations sont d’ailleurs en liens étroits », commente le représentant du Reneta.

Porte de sortie possible

La durée requise est d’un an minimum et peut aller jusqu’à trois ans. « L’essentiel est de voir l’activité sur une saison complète minimum ». Il se constate une durée moyenne de deux ans. À l’issue de cette période, les chiffres montrent « une installation avec un projet concret pour 74 % des personnes, une non-installation pour 10 % d’entre elles, et une non-installation tout en restant dans le milieu agricole, aussi pour 10 % », détaille Jean-Baptiste Cavalier. « Dans ces trois cas, nous considérons que l’espace-test a été une réussite ». Ainsi seuls 5-6 % demeurent indécis, « la période de test ne leur ayant pas permis de se positionner… ».

Reneta fête cette année ses 10 ans. À voir si le phénomène s’estompe dans le temps. Mais en tout cas, pour l’heure, le principe peut être une solution sérieuse pour plusieurs situations.

Qui sont les porteurs de projet ?

Au niveau national, ils sont à 91 % non issus du milieu agricole, à 58 % des hommes, d’une moyenne d’âge de 35 ans (79 % de moins de 40 ans), ils testent à 86 % le maraîchage, mais l’élevage progresse lentement à 11 % (en bovin lait, caprin et ovin), la production végétale (arboriculture, viticulture) représente seulement 3 %. Il y a 67 lieux-tests permanents. En tout, plus de 1.250 personnes ont déjà été accompagnées en 10 ans.

Le réseau bourguignon

Semeurs du possible est le relais régional de ce dispositif. Initiée en 2009 par la MSA, en partenariat notamment avec Bio Bourgogne et le CFPPA du Morvan, l’association a depuis accompagné 182 personnes. Plus de la moitié d’entre elles se sont installées localement (avec un taux de pérennité de 91 % après cinq ans), un petit quart se sont orientées vers du salariat agricole et 14 % ont poursuivi hors agricole. « Nous ne suivons pas des projets exclusivement en bio », précise l’une des salariées Élodie Patrice. Les "tests" sont majoritairement effectués en maraichage bien sûr, mais aussi en paysagisme, en plantes aromatiques, etc. « Nous mettons aussi du matériel à disposition des porteurs de projet, l’indemnité demandée augmente chaque année pour se rapprocher d’une comptabilité au réel ». Élodie Patrice relève que Semeurs du possible est surtout connu pour accompagner des projets en maraichage portés par des collectivités, hors ce sont bien tout type de projets qui peuvent être ainsi soutenus.