Elevage et environnement
Des crédits carbone pour rémunérer les éleveurs

Mis en ligne par Cédric MICHELIN
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De manière à dynamiser la mise en place de projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France, les représentants des éleveurs (Fédération Nationale des Producteurs Laitiers, Fédération Nationale Bovine, Fédération Nationale Ovine, Fédération Nationale des Eleveurs de Chèvres) ont créé France Carbon Agri Association (FCAA), afin de faciliter la valorisation des projets de réduction carbone. L’objectif étant de permettre aux agriculteurs d’être rémunéré pour leur crédit carbone. Explications…

Des crédits carbone pour rémunérer les éleveurs

« Dans le cadre du Label Bas Carbone et de la méthode Carbon Agri, nous souhaitions optimiser les crédits carbone au profit des agriculteurs, afin d’assurer un retour financier proportionnel à la réduction des émissions. Nous avons donc créé France Carbon Agri (FCAA) pour répondre aux enjeux économiques et environnementaux au service des projets territoriaux et des éleveurs », explique Marie-Thérèse Bonneau présidente de FCAA.
En qualité de mandataire, France Carbon Agri est l’interlocuteur privilégié des porteurs de projets locaux et nationaux en agrégeant des collectifs d’éleveurs. Désireuse d’impliquer un nombre important d’éleveurs dans les démarches bas carbone, FCAA opère en étroite collaboration avec ses partenaires des filières que sont Institut de l’Elevage, le Cniel, Interbev, les organismes de conseil, les coopératives, les entreprises privées, les organisations de producteurs, mais aussi des fédérations départementales, comme les FDSEA….

Comment ça marche ?

Carbon-Agri est une méthodologie pour certifier les réductions d’émission de gaz à effet de serre sur les exploitations agricoles conforme au Label Bas Carbone (certifiée le 30 septembre 2019). Dans le cadre de cette méthode, les agriculteurs bénéficient d’un premier diagnostic « CAP’2ER niveau 2 », qui leur permet de savoir où ils en sont par rapport à cette problématique « carbone ». Le diagnostic est suivi d’un plan d’action bas carbone personnalisé et adapté à leur exploitation. La méthode propose de nombreux leviers techniques pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre (gestion du troupeau et de l’alimentation, optimisation des intrants, gestion des déjections animales…) et l’augmentation du stockage de carbone (implantation de prairies temporaires et de couverts végétaux, plantation et gestion des haies…) pour réduire l’empreinte carbone de l’exploitation. L’exploitant dispose alors de cinq ans pour mettre en œuvre son plan d’action bas carbone. Au terme des cinq ans un nouveau diagnostic « CAP’2ER niveau 2 » est réalisé sur l’exploitation, déterminant ainsi le volume réel de carbone évité sur l’exploitation, et donc le volume de crédits carbone pouvant être vendu.
Grâce à une approche multi-leviers, ce sont plus de quarante pratiques bas carbone qui peuvent être actionnées par les exploitants. Le plan bas carbone permet aux éleveurs de combiner sur leurs fermes, des leviers positifs sur l'économie, l'environnement et le social. Concrètement, cela veut dire que les exploitants peuvent « gagner » à deux niveaux. Tout d’abord, les actions mises en place sur l’exploitation pour réduire les émissions de GES, en plus d’avoir un impact environnemental, permettent une optimisation de l’outil d’exploitation et donc une baisse des charges. Ensuite, la vente des crédits carbone permet un revenu supplémentaire. L’opportunité donc de réduire son empreinte carbone tout en ayant un revenu « complémentaire ».
Centrée aujourd’hui sur l’élevage bovin et les grandes cultures, la méthodologie couvrira à terme d’autres productions agricoles


Le premier appel à projet a été un succès


Le premier appel à projet de FCAA lancé en novembre 2019 s’est clos en février 2020. Avec 391 éleveurs engagés répartis sur le territoire national, ce premier appel à projet est un vrai succès. Suite aux trois mois de confinement liés au Covid-19, la mise en œuvre de la démarche carbone dans les élevages engagés dans le premier projet FCAA se poursuit. Les porteurs de projet réalisent actuellement les diagnostics CAP’2ER niveau 2 pour définir la situation initiale de chaque élevage en terme d’émissions de GES et de stockage de carbone. Sur la base des leviers d’action définis dans la méthodologie Carbon Agri, les éleveurs sélectionnent les pratiques qu’ils souhaitent mettre en œuvre sur leur exploitation, pour réduire leurs émissions de GES ou augmenter leur stockage carbone. Par exemple, l’objectif peut être de réduire la fertilisation azotée minérale sur l’exploitation. Une simulation réalisée grâce à l’outil CAP’2ER permet de calculer le gain potentiel associé au plan d’action de l’éleveur, d’évaluer le volume de GES évité, et ainsi de déterminer le nombre de crédits carbones à commercialiser.
FCAA organise la relation entre les éleveurs engagés dans un plan bas carbone et des acheteurs (entreprises privées, collectivités territoriales ...). À titre d’exemple les premiers acheteurs ont été la Caisse des Dépôts et le groupe La Poste.

Séverine Rémaque

La FDSEA accompagne les éleveurs intéressés

La FDSEA accompagne les éleveurs intéressés par les démarches Carbone. Eleveurs, vous souhaitez :
- Mettre en place un projet global d’exploitation associant la mise en œuvre d’une ou plusieurs pratiques bas carbone (gestion du troupeau, alimentation, gestion des surfaces et des intrants,…) ;
- Faire certifier vos réductions d’émission de GES et d’augmentation du stockage de carbone ;
- Communiquer positivement sur vos engagements ;
- Etre rémunérés pour la réduction de vos émissions de GES ;
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La FDSEA 71 avec l’appui de FCAA accompagne ses adhérents dans une démarche de valorisation économique de la réduction des émissions de GES et d’augmentation du stockage de carbone. Si vous êtes intéressés par la démarche ou si vous souhaitez tout simplement des compléments d’information, contacter le service syndical de la FDSEA 71 au 03.85.29.55.16.

L’agriculture « peu engagée » vers le bas-carbone

Dans son rapport annuel publié le 8 juillet, le Haut Conseil pour le Climat (HCC), instance indépendante et consultative, estime que l’agriculture « n’est pas structurellement engagée sur une trajectoire garantissant l’atteinte de ses objectifs à l’horizon 2030 » en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Citant les données récemment publiées par le Citepa, les experts du Haut conseil soulignent que les émissions agricoles n’ont baissé que de 1 % par rapport à 1990, contre un objectif fixé par la SNBC de 26 % à l’horizon 2030. Espérant concilier revenu des producteurs et lutte contre le réchauffement, le HCC propose quatre mesures structurelles : valorisation du stockage de carbone dans les sols, développement d’une stratégie pour les protéines végétales, généralisation des bonnes pratiques en élevage, et révision de l’affichage des produits alimentaires.

Résultats environnementaux exigés

Dans sa proposition de réforme de la Pac, la Commission européenne proposait, fin 2017, de remplacer les actuelles mesures environnementales dites d’obligation de moyens (conditionnalité, verdissement, MAEC), par des éco-regimes qui consacreraient une logique de résultats, portée en France sous le vocable de PSE (paiement pour services environnementaux). Pour assurer la pertinence de ce type de dispositif, les paiements doivent pouvoir se fonder sur des indicateurs fiables, efficaces et contrôlables. Selon que l’on s’intéresse à la réduction des émissions de gaz à effets de serre ou à la protection de l’eau, en passant par la préservation de la biodiversité, les chantiers sont plus ou moins avancés.