Tanguy de Lachaise à Saint-Forgeot
Nouvelle vie dans l’élevage et la vente directe

Marc Labille
-

Trentenaire originaire de Lyon, Tanguy de Lachaise a troqué un début de carrière dans l’expertise immobilière pour devenir agriculteur dans l’Autunois. Adoptant avec délectation son nouveau métier auprès de son beau-père, ses compétences en marketing l’ont rapidement amené à développer la vente directe. Portrait.

Nouvelle vie dans l’élevage et la vente directe
Tanguy de Lachaise s’est installé à Saint-Forgeot en juillet 2018 en s’associant à son beau-père Bernard Moreau, retraité aujourd’hui.

A Saint-Forgeot, tout près d’Autun, la Ferme du Cluselier propose, depuis deux ans, de la viande bovine et ovine en vente directe. A la tête de cette nouvelle activité, Tanguy de Lachaise, 33 ans, installé en juillet 2018. Ce jeune lyonnais d’origine était pourtant loin de se destiner à l’agriculture. Titulaire d’un bac option marketing, Tanguy a vécu un an en Irlande où il travaillait comme serveur dans le milieu de la nuit. De retour en France, il s’est associé avec son père pour exercer pendant neuf ans dans l’expertise immobilière à Lyon… Une période plutôt prospère dans un univers bien éloigné de l’élevage saône-et-loirien… Et pourtant. Entre temps, le jeune homme qui a toujours eu des attaches en Bresse et dans l’Autunois avait fait la connaissance de sa future épouse Ombeline. Au terme de leurs trois premières années de vie commune à Lyon et alors que leur premier enfant venait de naitre, l’envie de s’installer dans l’Autunois a commencé à germer. Le secteur de l’expertise immobilière était en pleine mutation. La vie citadine devenait très stressante pour la petite famille. Et puis, Ombeline avait un papa agriculteur dont l’exploitation serait bientôt à reprendre. Un alignement de planètes qui fait que le jeune couple et son aîné ont choisi de quitter Lyon pour Saint-Forgeot. Tanguy a repris les études pour un BPREA. Puis il s’est installé en s’associant avec son beau-père Bernard Moreau, gérant de l’EARL du Cluselier.

170 brebis, 60 vaches allaitantes à l’herbe…

En dépit d’un profil atypique, le jeune homme n’a pas remis en cause la philosophie de cette exploitation familiale acquise par le grand-père de Bernard en 1903. Il faut dire que le beau-père de Tanguy a toujours fait montre de beaucoup de recul par rapport à son exploitation, n’hésitant pas à explorer des voies de diversification originales (activité équestre, cynégétique…) et à sortir des sentiers battus (vêlage en plein-air, travail avec des salariés, recours à l’entreprise…). Le double troupeau bovin-ovin a donc été conservé et même conforté. L’EARL compte aujourd’hui 170 brebis charollaises et texel ainsi que 60 vaches de races charolaise et limousine. A cela s’ajoute une cinquantaine d’hectares de cultures (blé, orge, colza, triticale).

Econome, la conduite de l’exploitation l’a toujours été en misant sur un élevage à l’herbe extensif ; des bovins mâles vendus à 7-8 moins d’âge sans être alourdis. Avec son cheptel mixte de limousines et de charolaises, Bernard avait opté pour un vêlage de printemps assez tardif et en plein-air avec un minimum d’intervention humaine. Finis à l’herbe et aux céréales maison, les agneaux sont produits selon le cahier des charges label rouge.

« La relation client me manquait… »

S’il s’est découvert une passion pour l’élevage, Tanguy a rapidement éprouvé le besoin de retrouver la relation client qu’il avait perdue en quittant son ancien métier. Pour ce jeune homme rompu au marketing et à la communication, qui a côtoyé les grandes métropoles, la vente directe s’est imposée naturellement. « Les gens sont demandeurs de cela : de circuit court, de contact avec l’éleveur… La vente directe a le vent en poupe et il y a plein de choses à faire dans ce domaine », assure Tanguy. « Du producteur au consommateur, il n’y a qu’un pas ! », aime à dire le jeune éleveur. C’est avec cette ferme conviction qu’il va à la rencontre de ses clients, privilégiant l’échange de vive voix et la convivialité.

Tanguy a commencé par vendre des colis de viande d’agneau. Les animaux sont abattus à Autun à quelques kilomètres seulement de la ferme. Le jeune éleveur a tout de suite diversifié la gamme de ses produits en proposant saucisses natures ou aromatisées, merguez…Vendu entier l’hiver, le gigot est tranché en été pour pouvoir être préparé à la plancha, fait valoir Tanguy. Jamais à court d’idée, le jeune éleveur a lancé une fondue bourguignonne à la viande d’agneau. L’année dernière, il innovait avec un saucisson sec et un chorizo sec de viande d’agneau !

Débuts prometteurs

Les débuts dans la vente directe se sont révélés particulièrement prometteurs. Tanguy estime gagner mieux sa vie qu’en livrant sa production à la filière et les perspectives de développement semblent nombreuses pour la ferme de Saint-Forgeot.

Mais si le fait d’être aux portes d’Autun est en soi déjà un bel atout pour l’exploitation, Tanguy mise beaucoup sur ses réseaux, le bouche-à-oreille, les comités d’entreprise, les collectivités. Bien que rompu aux nouvelles technologies et aux réseaux sociaux, le jeune agriculteur privilégie malgré tout le téléphone, sollicitant beaucoup le cercle de ses connaissances (amis, famille, anciens collègues, etc…). Ayant longtemps pratiqué la clientèle et la culture d’entreprise, Tanguy ne ménage pas ses efforts. Mais les résultats sont au rendez-vous.

Les sécheresses consécutives n’ont pas entamé le moral de Tanguy depuis son installation. L’évolution de la ferme familiale vers la vente directe est une réussite et même une suite logique. Depuis le départ en retraite de son beau-père, Tanguy est désormais seul à la tête de la structure. Adepte des courses d’endurance, le jeune homme est confiant tout en estimant avoir encore beaucoup de choses à apprendre et à accomplir. Hyperactif comme ils se décrit lui-même, le jeune père de famille sait aussi savourer « un cadre de vie très agréable et un métier qui n’est plus celui d’il y a 30 ou 40 ans », conclut-il.

 

Covid : « les clients ont joué le jeu ! »

« Avec le covid 19, les ventes aux comités d’entreprise et aux collectivités se sont arrêtées du jour au lendemain », confie Tanguy de Lachaise qui rapporte s’être « retrouvé avec tous ses agneaux sur les bras ». Pour relancer les ventes, le jeune agriculteur a réactivé les bonnes vieilles recettes à savoir le téléphone, le bouche-à-oreille et les réseaux de connaissance… La méthode a porté ses fruits puisque la ferme du Cluselier a réalisé 150 livraisons pour Pâques ! « Les gens ont joué le jeu. Il y a eu comme un déclic du circuit court. On a senti comme un attachement au monde agricole », confie Tanguy. Si les ventes ont retrouvé un bon niveau, en revanche, il a fallu adapter l’offre aux circonstances. Les caissettes de 10 kg ont été délaissées au profit de la vente au détail, explique l’agriculteur qui ajoute que cela génère plus de travail mais la marge est meilleure. Les ventes ont donc bondi en tranches de gigot, côtelettes, saucisses… La Ferme du Cluselier a déjà commercialisé 60 agneaux depuis le mois de janvier (contre 55 en 2019) et « ce sont les meilleurs mois qui arrivent », confie Tanguy. Ce dernier développe aussi la viande bovine. Finalement, la crise du coronavirus aura renforcé l’activité de la Ferme du Cluselier.