Pousse de l’herbe
Encore une année atypique…

Marc Labille
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Après trois années de sécheresse et de canicules, 2021 surprend encore par son atypicité climatique. Si les animaux ont pu profiter d’une herbe pâturée poussive mais de qualité, les récoltes ont souffert d’un été pourri. Conséquence directe : les fourrages à distribuer cet hiver risquent d’être très hétérogènes.  

Encore une année atypique…
Au 15 août, les chantiers de foins et de moissons n’étaient pas encore tous terminés sur le département…

Un premier bilan météorologique de l’année 2021 a été réalisé par la Chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. Pour faire ce bilan, les techniciens ont comparé les données météo journalières reçues de Météo France aux moyennes mensuelles des fiches climatologiques (moyenne de 30 ans). Ce bilan conclut sans surprise à une nouvelle année particulière. Après trois ans de sècheresses et de fortes chaleurs estivales, 2021 a démarré avec une fin d’hiver assez douce et un manque de pluie qui a fait craindre une quatrième année de déficit fourrager… Avril et mai ont été des mois froids. La pousse de l’herbe à cette période a été limitée. Les rendements des fauches précoces ont été légèrement amputés. Par contre, ces parcelles ont profité des pluies de mai pour avoir de jolies repousses. 

Printemps froid, été pourri

Le pâturage a été tendu tout le printemps durant par le manque d’eau et surtout par des températures froides. En contrepartie, les lots ont profité d’une bonne croissance ayant toujours de l’herbe de bonne qualité (ce que confirment les suivis de l’engraissement à l’herbe ci-dessous). Il n’y a pas eu « d’explosion » de la pousse d’herbe que l’on connaît habituellement fin avril-début mai. La pousse s’est faite en un temps record autour du 1er juin avec l’arrivée de la chaleur et d’un créneau de beaux jours pour faire une récolte fourragère de qualité. 

Après, les pluies continuelles ont malmené les chantiers de récolte (foin, moisson…). Du 15 juin au 15 août, il y a eu très peu de créneaux sans pluie afin de faire des foins en bonnes conditions. Certains secteurs du département ont même eu à gérer des inondations. Au 15 août, les foins et les moissons n’étaient pas encore terminés sur le département ! 

Au final, nous constatons sur un an un cumul de pluies supérieur de 60 mm (avec certains secteurs de la moitié sud du département à + 110-140 mm). Les températures moyennes restent supérieures à la moyenne avec +0,75°.

Une pousse de l’herbe limitée, mais régulière 

Cette année, grâce à la participation aux mesures des éleveurs, les experts de la pousse de l’herbe ont pu suivre neuf exploitations en Saône-et-Loire. Le suivi est réalisé avec un herbomètre sur des parcelles en pâturage tournant. Ces mesures permettent d’estimer la pousse de l’herbe. En 2021, les sommes de température hebdomadaires ont été dans la normale (même si on s’était habitué à la précocité des années précédentes). Les mois de mars à mai ont été froids et donc la pousse ralentie. Les lots de bovins ont malgré tout profité d’une herbe de très bonne qualité et sèche qui a permis d’avoir de bonnes croissances. En mai, les pluies ont relancé la pousse, mais ont pénalisé les lots en sols lourds où le piétinement des parcelles a pu faire des dégâts. Courant juin, après des premières récoltes de qualité faites dans de bonnes conditions, la pluie a retardé les foins et le pâturage de fin juin a été tendu. La pousse moyenne entre le 7 avril et le 16 juin était de 54 kg de MS/ha/jour ; ce qui est dans la moyenne des dernières années. Mais avec peu « d’explosion » à plus de 100-120 kg/ha/jour comme on a l’habitude d’observer, ce qui a profité à la gestion de la qualité du pâturage. En pâturage tournant, les éleveurs ont toutefois réussi à débrayer certains paddocks début juin.

Source Herb’ Hebdo N°25

 

Un printemps propice à l’engraissement à l’herbe

Au printemps, la CA71 et Alsoni ont attaqué leur quatrième année de suivi d’engraissement des femelles à l’herbe. En 2021, six élevages charolais se sont portés volontaires avec au total 74 femelles (42 génisses d’un an et deux ans et 32 vaches). La réalisation de ce suivi nécessite la mise en place d’un pâturage tournant (minimum cinq paddocks) afin de valoriser au maximum l’herbe mise à disposition des animaux, de bénéficier d’une flore variée, d’une herbe jeune et riche et donc de limiter la complémentation voire, de s’en affranchir totalement quand le terrain et le climat le permettent. Les animaux ont été pesés une fois par mois au printemps. À chaque pesée, des prélèvements d’herbe ont été réalisés afin de mettre en lien l’évolution des valeurs de l’herbe et la croissance des femelles. Sur les six exploitations en suivi, les chargements oscillent entre 45 à 70 ares/UGB à la mise à l’herbe en mars. Les exploitations suivies ont connu des résultats variables ce printemps où la pousse d’herbe a été lente mais régulière dû aux conditions météo. L’épiaison plus tardive a permis de retarder l’apport de concentrés pour ceux qui complémentent. Une porte ouverte de présentation des résultats est prévue pour l’automne 2021. La date et le lieu seront communiqués prochainement. 

Analyse de fourrages indispensables

« La qualité des fourrages pour l’hiver va être très hétérogène », mettent en garde les techniciens de la Chambre d’agriculture. « Il est donc très important de faire des analyses afin de gérer ces stocks en fonction des besoins des animaux ; ceci afin de ne pas reproduire les problèmes sanitaires de l’hiver 2016-2017 ». Les conseillers rappellent en effet l’importance de bien connaître la valeur des produits en stocks afin de bien équilibrer les rations. La mauvaise qualité des foins de 2016 avait généré beaucoup de problèmes de mortalité à la naissance et de reproductions durant l’hiver 2016-2017. Des conséquences qui se sont ressenties jusqu’à aujourd’hui avec des IVV qui se sont rallongés, rapportent les conseillers. 

Dans certaines exploitations, la partie des récoltes qui se sont faites autour du 1er juin peut permettre de tamponner les écarts de valeurs des fourrages. Les conseillers mettent en garde contre les problèmes de moisissures sur la santé des animaux et même celle des éleveurs. Certains foins très mauvais peuvent servir au paillage, informent-ils.