Les brèves du 28 février 2023

Mis en ligne par Cédric Michelin
-

Voici les brèves du 28 février 2023

Les brèves du 28 février 2023

Pesticides : « rien que le cadre européen », promet Borne, sauf « cas de force majeure »

Dans le cadre de sa visite au Salon de l’agriculture le 27 février, la Première ministre est revenue sur les rapports entre les réglementations européenne et française, après les récentes décisions concernant les néonicotinoïdes et le S-Métolachlore : « En matière de produits phytosanitaires, nous respecterons désormais le cadre européen, et rien que le cadre européen », a promis Élisabeth Borne. Et de préciser : « Nous ne créerons aucune distorsion de réglementation pour nos producteurs sauf en cas de force majeure, quand la santé publique est menacée. » Au sujet de la gouvernance des AMM (autorisations de mise sur le marché) des pesticides, la Première ministre a simplement annoncé que son gouvernement « travaille aux problèmes qui subsistent dans le processus d’autorisation de mise sur le marché ». Et de citer « la mauvaise synchronisation entre les calendriers français et européen de réexamen des substances », et le « renforcement nécessaire des moyens de l’Efsa ». La présidente de la FNSEA Christiane Lambert – qui plaidait pour une reprise en main du sujet par les pouvoirs publics – estime avoir « été entendue sur la nécessité d’un changement de méthode dans les décisions ». Selon elle, la Première ministre envisagerait « une modification par la loi » afin de redonner « au politique » du pouvoir sur les autorisations de produits. « Le ministère de l’Agriculture devrait avoir un droit de regard sur les décisions de l’Anses », prévoit Christiane Lambert, alors que l’agence sanitaire assume la compétence exclusive des AMM depuis une réforme de Stéphane Le Foll en 2014.

 

Pesticides : Élisabeth Borne veut « investir massivement » dans les alternatives

À l’occasion de sa visite au Salon de l’agriculture le 27 février, la Première ministre a, comme attendu, annoncé le lancement d’ici l’été d'« un plan de développement d’alternatives pour les produits phytosanitaires les plus importants, appelés à être retirés du marché lors des prochaines années ». Il sera abondé par des fonds du plan France 2030 – le montant n’a pas été précisé. Ce nouveau plan inclura notamment les instituts techniques et les fabricants, appelés à prendre des « engagements sur leurs plans de travail des prochaines années ». Ce plan dédié à la « recherche et à l’innovation » doit, au passage, « renforcer nos moyens pour l’agriculture biologique ». Une annonce bien vue par la FNSEA avait poussé auprès de l’Élysée et de Matignon pour « une planification pluriannuelle des alternatives », très proche du « plan de développement des alternatives » envisagées par la Première ministre. Plus largement, Élisabeth Borne appelle son gouvernement à présenter une nouvelle mouture d’Ecophyto d’ici l’été également, intitulée Ecophyto 2030. La Première ministre a enfin plaidé pour « développer une offre de conseil individuel et stratégique adaptée », dans le cadre de la concertation autour du Pacte et de la future Loi d’orientation et d’avenir (LOA). Une demande portée notamment par les chambres d’agriculture, qui souhaitent un renforcement et une « adaptation territoriale » de l’offre de conseil.

 

Pesticides : « Les industriels doivent prendre leur part » dans la recherche d’alternatives (Anses)

Saluant la volonté de planification du gouvernement sur les pesticides, le directeur général de l’Anses Benoit Vallet a estimé, lors d’une conférence de presse le 27 février, que « les industriels connaissent les dossiers et doivent prendre leur part en matière de recherche et d’innovation ». Face aux critiques du gouvernement sur le S-métolachlore, le président de l’agence sanitaire souligne au passage que « l’évaluation des produits à base de S-métolachlore avait été demandée en mai 2021 par nos tutelles » au sein des ministères de l’Agriculture, de la Transition écologique et de la Santé, comme rappelé dans l’avis sur ce sujet. Et le processus de retrait en cours, poursuit-il, vise avant tout à se conformer aux textes européens sur l’eau. Alors que le gouvernement espère établir une liste de 200 molécules candidates au réexamen pour en évaluer les alternatives, la directrice du pole Produits réglementés Charlotte Grastilleur s’interroge de son côté sur le chiffre retenu. Avec dix molécules étudiées par an par l’agence, « si nous connaissions à l’avance celles susceptibles d’être retirées, nous ne mènerions pas d’évaluation », observe-t-elle. Par ailleurs, « le rôle de l’Anses n’est pas de travailler sur les alternatives », sauf en cas de molécule candidate à la substitution, rappelle-t-elle. Exception récente : le travail sur le glyphosate, « a mobilisé les services pendant deux ans » sans offrir de solutions dans tous les cas.

 

Bio : une aide à la trésorerie de 10 M€ évoquée à huis clos, les syndicats déçus

Selon plusieurs sources interrogées par Agra Presse, Élisabeth Borne aurait évoqué une aide à la trésorerie de 10 M€ pour les agriculteurs bio lors d’un déjeuner organisé le 27 février avec le Conseil de l’agriculture française, la Confédération paysanne et la Coordination rurale. La Première ministre et son entourage n’ont en revanche pas évoqué ce soutien durant la déambulation l’après-midi même, ni devant la presse. « La répartition et les modalités restent à confirmer, mais le montant semble plutôt faible par rapport aux difficultés des filières », réagit Étienne Gangneron, vice-président de la FNSEA en charge du bio. Dans un document présenté le 21 février au cabinet du ministre, le Cniel estimait les pertes financières à 59 M€ en 2021 pour la seule filière laitière, avec 71 M€ de pertes projetées sur 2023. Inaporc évoquait dans le même document une perte de 30 M€ par an en raison des déclassements. Pour Philippe Camburet, président de la Fnab (producteurs bio), l’éventuelle enveloppe de 10 M€ serait donc « un scandale ». « Nous avions demandé 15 000 € d’aide par producteur. Le montant évoqué représenterait à peine 160 € pour chacune des 60 000 exploitations bio françaises », calcule l’élu syndical. À la Confédération Paysanne, la secrétaire nationale Marie-Pierre Répécaud confie sa « colère » face à l’absence de confirmation par Élisabeth Borne. « Le signal était le bon, le président de la République l’avait même évoqué lors de notre rendez-vous cette semaine », rappelle-t-elle.

 

Bio : baisse confirmée de 32 % des conversions en 2022

« Les déconversions font beaucoup parler d’elles, mais ce sont surtout les conversions qui ont été mises en attente », observe Laure Verdeau, directrice de l’Agence bio, estimant nécessaire de « sanctuariser la consommation ». D’après les chiffres transmis en exclusivité à Agra Presse, le nombre de conversions au bio a reculé de 32 % sur un an, passant de 7706 nouvelles fermes en 2021 à 5245 en 2022. Le ralentissement est particulièrement marqué en grandes cultures (-55 %), en lait (-54 %), en porcin (-50 %), ainsi qu’en vaches allaitantes et en vin (-49 % et -46 % respectivement). Dans les filières avicoles, le recul avait été observé dès 2021 (-40 % en poules pondeuses et -50 % en volailles de chair). Parallèlement au ralentissement des conversions, les arrêts de certification ont augmenté de 2510 à 3380 fermes sur un an, soit 5,8 % de l’effectif total, contre 4,7 % en 2021. « Ces arrêts sont dus pour moitié à des départs à la retraite, et pour l’autre moitié au retour au conventionnel », détaille Dorian Fléchet, chargé de l’observatoire national de l’agriculture biologique. Comme par le passé, les arrêts concerneraient en priorité les exploitations certifiées depuis moins d’un an, ainsi que celles converties depuis cinq à dix ans. Le pourcentage d’arrêts de certification est particulièrement élevé en porcin (8 % de l’effectif total), ainsi qu’en pondeuses, grandes cultures et légumes (6 % pour tous).

 

Eau : Béchu réunit les préfets pour planifier les « problèmes de raréfaction »

Afin de faire un point « territoire par territoire » de la sécheresse hivernale que connaît la France, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu réunira les préfets coordinateurs de bassin lors d’une réunion le 27 février au soir, a rapporté l’entourage du ministre de la Transition écologique et de la secrétaire d’État à l’écologie Bérangère Couillard. « Les deux prochains mois seront cruciaux, et il est important d’anticiper d’éventuelles mesures qui pourront être prises ces prochaines semaines », souligne-t-il. Cinq jours plus tôt, Météo France a annoncé la plus longue sécheresse jamais enregistrée, avec 32 jours sans véritable pluie. « Les mois d’octobre et de février ont été particulièrement déficitaires en eau, ce qui n’a pas permis de réhumidifier suffisamment les sols pendant cette période de recharge [des nappes phréatiques NDLR] », admet l’entourage des deux membres du gouvernement. Aussi, les préfets ne devront pas avoir « la main qui tremble » lorsqu’il s’agira de prendre des arrêtés cadres départementaux sécheresse permettant de « s’assurer que la ressource en eau soit préservée cet été », a affirmé Christophe Béchu dans un entretien au Journal du dimanche. Après ces premiers échanges avec les préfets coordonnant les principaux bassins, le ministre rencontrera l’ensemble des préfets de France le 6 mars.

 

Gestion de l’eau : les semenciers demandent un accès garanti à l’irrigation

À l’occasion du Salon de l’agriculture le 27 février, les semenciers ont demandé que leur accès à l’irrigation soit garanti en cas de restriction pour pouvoir fournir les blés, tournesols et maïs de demain, alors que la production de semences en France, premier exportateur mondial, a diminué depuis le début de la guerre en Ukraine. « Nous pouvons puiser dans les stocks. Mais si la production de semences baisse trop, nous risquons d’en manquer en 2025 », a soutenu Didier Nury, président de l’Union française des semenciers (UFS) à l’AFP. Aussi, le président de l’UFS déplore-t-il que les « agriculteurs multiplicateurs n’aient aucune certitude sur l’accès qu’ils auront à l’eau en juillet, au moment clef de la floraison », alors que les dates de semis approchent. « Notre besoin en eau est faible, mais c’est maintenant que les agriculteurs font leurs choix de cultures et c’est donc maintenant qu’ils ont besoin de certitudes », soutient Didier Nury. Il souhaite que « la production de semences soit systématiquement protégée et considérée comme une culture spécialisée », pouvant déroger aux restrictions générales d’eau. Sur les 397 000 ha dédiés à la production de semences en France en 2022, 40 % sont irrigués, soit 0,2 Mrd de m3 d’eau sur les 3,2 Mrd de m3 consommés par le secteur agricole chaque année. Selon l’UFS, cela représente « une part infime de l’irrigation agricole pour un milliard d’euros d’excédent commercial. »

 

Influenza aviaire : le ministère en passe de précommander des doses de vaccin (CFA)

« Le ministre nous a annoncé qu’il va passer une précommande de vaccins contre l’influenza aviaire », a déclaré Jean-Michel Schaeffer, le président de la CFA (aviculteurs, FNSEA) et d’Anvol (interprofession des volailles de chair) à Agra Presse le 27 février. L’éleveur alsacien se félicite de ce « premier signal envoyé » par le ministre de l’Agriculture lors d’une réunion avec les filières avicoles le 24 février. Comme annoncé en décembre, le locataire de la Rue de Varenne enclenche donc les commandes avant que la stratégie vaccinale ne soit finalisée. Lors de cette même réunion, Marc Fesneau a confirmé le calendrier (avis de l’Anses en mars, validation du plan en mai), selon Joël Limouzin, membre du bureau de la FNSEA, qui a senti « une vraie volonté du ministre d’avancer ». Selon lui, les discussions démarrent entre filières et pouvoirs publics sur la stratégie vaccinale à adopter (espèces, régions et durée notamment). M. Limouzin milite pour une vaccination obligatoire au moins pour les palmipèdes, réputés plus à risque face au virus. Afin de nourrir ces discussions, les filières avicoles ont exploré fin 2022 le coût et les modalités de quatre scénarios. « Quel que soit le scénario retenu, il faut commander les doses maintenant », note Jean-Michel Schaeffer, faisant écho à la demande des fabricants de vaccins.

 

Indemnisations influenza : la CFA regrette la baisse d’une partie des aides

Dans un entretien à Agra Presse le 27 février, le président de la CFA (aviculteurs, FNSEA) Jean-Michel Schaeffer regrette la baisse du montant de certaines indemnisations économiques liées à l’influenza aviaire pour 2022-2023. Lors d’une réunion avec les filières avicoles le 24 février, le ministre de l’Agriculture a annoncé que les aides dites « I2 » (difficultés de remise en place des animaux après la fin des restrictions sanitaires) couvriront 50 % des pertes, contre 100 % l’année précédente. « Cela va être compliqué pour les éleveurs qui n’ont pas produit depuis un an », explique M. Schaeffer, rappelant que les Pays de la Loire ont connu deux épisodes rapprochés d’influenza (février 2022, puis fin 2022-début 2023). Exception notable : les éleveurs situés dans les 45 communes les plus denses de la région se verront couverts à 90 % dans le cadre du plan de repeuplement échelonné (remises en place plus tardives pour les palmipèdes). En revanche, le président de la CFA se dit « satisfait de la revalorisation des VMO (valeurs marchandes objectives, NDLR), à partir du 15 septembre 2022, qui prend en compte les conséquences de la guerre en Ukraine ». Ces valeurs unitaires qui servent de base au calcul des aides datent « d’avril, mai 2022 », alors que « l’aliment pour volailles a renchéri de 100 à 120 €/t depuis ».

 

Protocole nord-irlandais : accord entre l’UE et le Royaume-Uni pour fluidifier le commerce

Après d’intenses et laborieuses négociations, l’UE et le Royaume-Uni ont finalement conclu le 27 février un accord politique de principe concernant le protocole nord-irlandais afin de trouver des solutions pratiques pour lever les barrières commerciales en mer d’Irlande (documents en anglais). Au niveau sanitaire et phytosanitaire, il permettra d’instaurer une « voie verte » par laquelle les produits agroalimentaires de détail en provenance de Grande-Bretagne destinés à être vendues en Irlande du Nord seront soumis à des exigences de certification et des contrôles minimaux. Les normes britanniques de santé publique s’appliqueront à ces produits. En revanche, les marchandises en provenance de Grande-Bretagne et destinées à la vente en Irlande et dans le reste de l’UE passeront par la « voie rouge » et feraient l’objet de contrôles douaniers et d’inspections sanitaires (végétales et animales) plus stricts. Cet arrangement est aussi assorti d’une série de garanties, notamment des installations d’inspection SPS et un étiquetage qui seront introduits progressivement. Lorsque ces mesures de protection seront pleinement en place, les contrôles d’identité seront réduits à 5 % seulement. Au niveau douanier, l’accord établit un nouveau système d’opérateurs de confiance qui permettra aux marchandises agroalimentaires qui ne risquent pas d’entrer dans le marché unique de bénéficier de procédures simplifiées. À défaut, des contrôles douaniers complets seront appliqués. Pour une application rapide du texte, une réunion du comité mixte UE-Royaume-Uni sur l’accord de retrait aura lieu dans les prochaines semaines, assurent les deux parties.

 

Bovins viande : M. Macron « très marqué par les chiffres de la décapitalisation » (Interbev)

Lors de son entrevue avec la filière viande le 25 février, « Emmanuel Macron a été très marqué par les chiffres de la décapitalisation », rapporte Emmanuel Bernard, le président de la section Bovins d’Interbev (interprofession bétail et viande) dans un entretien à Agra Presse le 27 février. L’année dernière, la baisse du cheptel s’est accélérée, avec une perte de 837 000 vaches (laitières et allaitantes) depuis 2016. Cette décapitalisation a pesé sur la production de viande bovine en 2022 (-3,7 %), et le phénomène se poursuit début 2023, selon une récente note d’Agreste (-3,1 % en janvier 2023 sur un an). Durant sa visite au Salon de l’agriculture, « le chef de l’État a aussi remarqué les nombreux jeunes qui travaillent autour de l’élevage », relève Emmanuel Bernard, signe selon lui que « la passion et l’envie sont toujours là ». Les professionnels ont aussi rappelé à M. Macron leur opposition à l’accord de libre-échange UE-Mercosur : en excluant toute signature en l’absence de réciprocité environnementale, « le président de la République n’a pas changé d’avis, nous en prenons acte », réagit Emmanuel Bernard.

 

Loi Sempastous : les seuils d’agrandissement significatif « proches » de 2 Saurm en moyenne

À l’occasion d’une conférence organisée le 27 février par la FNSafer, le nouveau chef du bureau foncier de la DGPE (ministère de l’Agriculture), Florian Thomas, a annoncé que l’ensemble des préfets de régions métropolitaines avaient fait paraître leur arrêté fixant le niveau du seuil d’agrandissement significatif. Ce seuil détermine si une opération de rachat de parts sociales agricoles doit faire ou non l’objet d’une demande d’autorisation d’exploitation. Ce nouveau dispositif introduit par la loi dite Sempastous entrera en vigueur à partir du 1er avril. Le seuil correspond à la taille exploitée par l’acquéreur si l’opération venait à aboutir. La loi Sempastous prévoit qu’il peut être fixé à un niveau situé entre 1,5 et trois fois la surface agricole utile régionale moyenne (Saurm). Selon Florian Thomas, les préfets de région, qui ont jusqu’au 1er mars pour le fixer par arrêté, ont le plus souvent choisi un niveau « proche de 2 fois la Saurm ». À partir du 1er avril, les demandeurs devront déposer ces dossiers aux Safer des départements où est situé le siège de l’exploitation visée, qui donneront un avis, qui pourra être positif, négatif, ou conditionné à des « mesures compensatoires » (p.ex. revente d’une partie des terres). Dans ce dernier cas, la procédure peut prendre « jusqu’à huit mois », prévient le fonctionnaire de la DGPE.

 

Foncier : accélération des cessions de parts sociales avant la mise en œuvre de la loi Sempastous

À l’occasion d’une conférence le 27 février, les Safer ont observé une accélération des cessions de parts sociales en 2022, qu’elles associent à la mise en œuvre de la loi Sempastous au printemps 2023, qui doit précisément encadrer ces opérations. Sur la période du 1er janvier au 31 octobre, le nombre de cessions de parts a augmenté de 23,4 % par rapport à 2021, et la valeur des cessions a bondi de 131 %, selon la FNSafer, qui précise que deux opérations exceptionnelles par leur ampleur ont été réalisées sur la période. La fédération fait le lien avec la loi Sempastous, qui doit être mise en œuvre à partir du 1er avril. Le président de la FNSafer rappelle que « l’objectif de la loi n’est pas d’interdire, mais de restaurer un contrôle, et de s’intéresser plus particulièrement aux cessions à des tiers ». Selon les chiffres des Safer en 2021, 60 % des opérations de cessions de parts sociales agricoles concernent des membres de la famille ou des associés ; le reste viserait des cessions à des tiers. Pour Emmanuel Hyest, ce nouvel outil de régulation vise in fine à « maintenir des agriculteurs sur les territoires », et à soutenir la production française, car « quand on s’agrandit, on a plutôt tendance à simplifier les modèles ».

 

Foncier : contre l’« accaparement », Terre de liens s’en prend aux chips Bret’s

Des chips « issues de l’accaparement des terres françaises » : sur un étal factice aux abords du Salon de l’agriculture, le mouvement Terre de liens a ciblé le 27 février la marque Bret’s (Altho), symbole des « investisseurs qui prennent le contrôle » du foncier. Distribués aux passants, les produits « garantis 100 % sans paysans » dénonçaient sur leur emballage ce groupe « passé maître dans l’art d’accaparer les terres bretonnes ». « Aux agriculteurs, chefs d’exploitation, se substituent aujourd’hui des fermes contrôlées par le groupe sur lesquelles des ouvriers agricoles sont fondus dans une vaste chaîne de production industrielle », y expliquait Terre de liens. Le mouvement, qui défend la préservation et le partage du foncier, doit publier le 28 février un rapport « À qui profite la terre ? », sur l’état du foncier agricole en France. Terre de liens souhaite que la future loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA) permette d’« empêcher l’accaparement de terres agricoles par des sociétés financiarisées détenues par des investisseurs non agricoles ».

 

Le collectif Nourrir présente un manifeste pour « un million de paysans » d’ici à 2050

Le collectif Nourrir a présenté, le 27 février au Salon de l’agriculture, un manifeste « 1 million de paysans » pour la transition agroécologique d’ici à 2050. « Des agriculteurs nombreux, pour nourrir durablement la France de demain » : telle est l’ambition de la plateforme rassemblant plus de 50 organisations paysannes, de protection de l’environnement et de défense des consommateurs. Un objectif qui passe, selon Nourrir, par un soutien à la multiplication des fermes agroécologiques. Le collectif propose de revaloriser les métiers agricoles pour susciter les vocations. Il s’agit d’attirer une multitude de profils, y compris ceux non issus du milieu agricole. Diversifier les candidats et formes d’installations impose « une adaptation de l’accompagnement, des formations et moyens de financement, ainsi qu’une répartition du foncier » plus équilibrée. Le deuxième défi est d’assurer la reprise des fermes à céder, devenues progressivement « trop grandes, trop chères ». Une meilleure préparation de la transmission est réclamée. Troisième défi : aller vers « une agriculture vivante et durable ». Le collectif propose d’installer sur des exploitations plus petites, plus diversifiées et plus sobres. Et pour cela de lier les aides publiques à la diversification, à l’autonomie, au bio, à la suppression des pesticides et engrais de synthèse.

 

Aide alimentaire : des bénéficiaires aux profils « de plus en plus hétérogènes » (banques)

Les profils des personnes ayant recours à l’aide alimentaire sont de « plus en plus hétérogènes », démontre une étude présentée par les Banques alimentaires le 27 janvier au Salon de l’agriculture. Ce phénomène est notamment lié aux crises économiques et sanitaires rencontrées depuis 2008. Le nombre de bénéficiaires a triplé en dix ans, passant de 820 000 en 2011 à 2,4 millions fin 2022. L’immense majorité d’entre eux (94 %) vit sous le seuil de pauvreté. Les personnes seules (41 %) et les familles monoparentales (31 %) représentent la majeure partie des demandeurs. Les « travailleurs pauvres » sont de plus en plus nombreux à avoir recours à l’aide alimentaire. « Les deux tiers des personnes accueillies (ayant un emploi, NDLR) ont un contrat à temps partiel », et 60 % sont en CDI, précisent les banques alimentaires. La directrice générale des banques alimentaires Laurence Champier relève que « de plus en plus de personnes stables » professionnellement font appel aux associations. La hausse des prix dans le commerce augmente significativement le recours à l’aide alimentaire, soulève l’étude. La cherté des produits alimentaires est la principale motivation invoquée par 63 % des bénéficiaires, en hausse de 9 % par rapport à 2020. En outre, 67 % affirment qu’ils ne peuvent pas se passer de l’aide alimentaire (+15 %).

 

Enseignement : lancement d’un « fonds compétences » de 20 M€ (ministère)

Lors d’une réunion des acteurs du pacte et de la loi d’orientation agricole (LOA) le 26 février, Marc Fesneau a lancé un « fonds compétences » de 20 M€ pour l’enseignement agricole dans le cadre de France 2030. « L’appel à manifestation d’intérêt "Compétences et métiers d’avenir" de France 2030 s’enrichit d’un nouvel axe dédié à l’enseignement agricole et à l’innovation pédagogique », selon un communiqué du ministère de l’Agriculture. Ce fonds vise à accélérer le développement des nouveaux outils, compétences et qualifications au service de l’agriculture de demain : hydraulique, robotique agricole, biocontrôle, par exemple, afin de « renforcer notre souveraineté alimentaire dans un contexte de changement climatique ». Deux objectifs sont poursuivis : renforcer « une offre de formation attractive, innovante, en adéquation avec les besoins d’adaptation » de l’agriculture ; permettre à l’enseignement de conforter sa capacité d’innovation et renforcer les synergies avec le réseau d’acteurs de territoires, de la recherche, de l’enseignement supérieur, des entreprises, autour des métiers et compétences d’avenir, explique le ministère.

 

Fruits et légumes : la consommation résiste malgré un « glissement de gamme »

En 2022, 93 % des Français ont déclaré avoir confiance dans les fruits et légumes frais, selon le baromètre de confiance d’Interfel et FranceAgriMer présenté au Salon de l’agriculture le 27 février. Soit un taux « élevé et stable » depuis trois ans, a indiqué la chargée d’études à l’institut CSA Sandra Marie. La consommation de fruits et légumes frais résiste mieux à l’inflation que d’autres produits frais : 80 % des Français n’ont pas réduit leurs dépenses sur ce poste, contre 65 % pour le poisson et 55 % pour la viande. Les consommateurs ne font donc « pas l’impasse » sur les fruits et légumes frais, puisque « 96 % des Français nous indiquent continuer d’en consommer », a étayé la chargée d’études. Cependant, la fréquence de consommation « est un peu en recul » avec 53 % des Français qui mangent des fruits et légumes frais quotidiennement (-6 points sur un an). « Chercher le prix le plus bas » est désormais un critère de choix pour 39 % des Français (+8 points sur un an), et cette « attention accrue sur le prix » s’observe chez « toutes les catégories socio-professionnelles », a précisé Sandra Marie. Pour s’adapter, les ménages « comparent davantage les prix » et opèrent un « glissement de gamme », c’est-à-dire qu’ils achètent moins de fruits et légumes avec un logo ou un label, même si ces derniers continuent à être « de solides facteurs de réassurance ».

 

Tomate, fraise : +3 % de CA pour Savéol qui continue de progresser en fraise

La Coopérative maraîchère de l’Ouest (marque Savéol) a enregistré un chiffre d’affaires « en progression de 3 % » à 232 millions d’euros en 2022, a indiqué son président Pierre-Yves Jestin en conférence de presse au Salon de l’agriculture le 27 février. Cette croissance est tirée par la production de fraises, dont les volumes sont passés à près de 3000 t (contre 2800 t l’an passé) et qui bénéficie « d’un attrait assez fort pour les fruits rouges » chez les consommateurs. En revanche, les volumes de tomates ont diminué « de l’ordre de 3 % » pour atteindre près de 75 000 t. Ce « léger retrait » des rendements est dû à la consommation d’énergie des serres qui a baissé « en moyenne de 25 % », et parfois « de l’ordre de 40 % » selon les maraîchers, a expliqué M. Jestin. Une baisse motivée par la flambée des prix de l’énergie, dont les conséquences ont toutefois été amoindries par la météo estivale « très propice » et « une année 2022 extrêmement lumineuse », a souligné Pierre-Yves Jestin. En bio, Savéol a produit près de 2000 t de légumes dont environ 1500 t de tomates, et vise le même objectif en 2023. La coopérative projette de produire « 50 à 70 t de fraise bio » grâce à deux producteurs, et d’augmenter « significativement » ces volumes en 2024 (de l’ordre de l’équivalent de 4 ha de serres).

 

Salariés agricoles : Trame présente une enquête nationale sur les conditions de travail

L’association des salariés agricoles de France (membre du réseau Trame) a présenté une enquête nationale sur les besoins des salariés de la production agricole au travail le 27 février au Salon de l’agriculture. Cette étude multi-filières réalisée auprès de 430 salariés de toutes les régions françaises (hors Île-de-France et Outre-mer) permet d’identifier les « rappels à la règlementation » qu’il serait bon de faire aux employeurs, ainsi que les actions à envisager pour « fidéliser les salariés en leur apportant un bien-être et un confort au travail », a expliqué l’animatrice de l’association Céline Marec. Concernant les points qui pourraient faire l’objet d’un rappel sur la réglementation, 25 % des répondants indiquent ne pas avoir de WC sur leur lieu de travail et 22,5 % assurent ne pas disposer d’équipements de protection individuelle (EPI). De plus, 15 % affirment que le DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels) n’a pas été réalisé, quand 46 % disent ne pas savoir si ce diagnostic révisé annuellement a été fait. Concernant les facteurs pouvant nuire à la fidélisation des salariés, un tiers des répondants affirment que leurs horaires de travail ne sont pas respectés, et plus de 61 % indiquent que leurs congés ne sont pas anticipés.

 

Commerce maritime : une étude plaide pour « une concertation » sur l’export des grains

Dans une étude de FranceAgriMer et de l’Isemar (institut supérieur d’économie maritime) à paraître en avril, dont les principales conclusions ont été présentées le 27 février au Salon de l’agriculture, le directeur de l’Isemar, Paul Tourret, plaide pour « une concertation nationale avec les ports français et les acteurs des grains sur les forces et les faiblesses du tissu portuaire ». Cette démarche collective permettrait d’identifier « les points d’amélioration pour éviter le recul des trafics à moyen et long terme », estime-t-il. Les sujets de la « localisation », des « infrastructures » ou encore des « silos » seraient à aborder. « Les critères de concurrence ne sont pas que dans les prix de production et les qualités de grains, souligne le directeur de l’Isemar. Ils se font aussi sur le passage portuaire et la logistique maritime. » Il souligne notamment la question des capacités d’accueil « limitées » des ports français en termes de gabarits de navire. Et l’expert de citer comme modèle possible l’association Pharma Logistics Club (PLC), qui réunit les acteurs français impliqués dans le transport et la logistique de produits pharmaceutiques.

 

Nutrition animale : la collecte des emballages vides démarrera à l’automne (Valoralim)

La collecte des emballages vides de nutrition animale débutera à l’automne, ont annoncé les membres de Valoralim, la filière de recyclage dédiée à ces produits, lors d’une conférence de presse au Salon de l’agriculture le 27 février. Sacs en papier, big bags, seaux ou encore bidons : les emballages concernés représentent un gisement de 10 000 tonnes, qui sera complété prochainement par les cuves de 1000 litres (IBC) et les seringues nutritionnelles. L’objectif de Valoralim d’ici 2028 est de collecter 60 % des emballages et d’en recycler 80 %. « J’espère que ça sera un minimum », s’est enthousiasmé le président du Snia (fabricants privés d’aliment) François Cholat. Après la signature des conventions par les organisations partenaires au premier semestre*, les quelque 200 metteurs en marché intégreront les cotisations d’éco-contribution dans leurs prix de vente en juillet. Ces contributions varieront entre 0,75 €/t et 2,75 €/t pour les aliments en emballages souples (sacs, etc.), et entre 10 et 20 ct€/kg pour les produits en emballages rigides (bidons, etc.). Seuls 10 % des aliments pour animaux sont vendus conditionnés, le reste étant livré en vrac.
* Dont Adivalor, le Snia, la Coopération agricole et l’Afca-Cial (compléments)

 

Insécurité alimentaire : le leader nord-coréen lance une réunion clé sur l’agriculture

Alors que la Corée du Nord est frappée depuis quelques mois par des pénuries alimentaires sévères, son dirigeant Kim Jong-Un a ouvert, de nouveau, le 26 février une importante réunion du parti pour discuter du développement de l’agriculture. Ce type de réunion n’est habituellement convoqué qu’une ou deux fois par an, mais cette nouvelle séance plénière en cours intervient deux mois seulement après la précédente, qui portait également sur les questions agricoles. Cette fréquence inhabituelle alimente les spéculations selon lesquelles la Corée du Nord pourrait souffrir d’insécurité alimentaire aiguë. De son côté, le porte-parole du ministère sud-coréen, Koo Byoung-sam, a estimé que « les pénuries alimentaires […] sont graves [en Corée du Nord] puisqu’ils nous semblent que Pyongyang ait demandé une aide au Programme alimentaire mondial ». Le pays a été périodiquement frappé par des famines, dont l’une, dans les années 1990, a tué des centaines de milliers de personnes, certaines estimations se chiffrent même en millions.

 

Environnement : Iris Borrut prend la présidence du Collectif de la troisième voie

À l’occasion du Salon de l’agriculture, les cinq organisations du Collectif de la troisième voie agricole ont annoncé le 27 février l’élection de leur nouvelle présidente, Iris Borrut, directrice du label Vignerons engagés (vins). Elle succède à Bernard Schmitt, co-président de Bleu-Blanc-Cœur et premier président de l’association de la Troisième voie. À l’avenir, Iris Borrut souhaite « continuer à faire grandir l’association », mais aussi permettre « le partage des bonnes pratiques » entre les membres des différentes structures qui composent l’association. Pour rappel, ces dernières représentent cinq grandes filières alimentaires : Bleu-Blanc-Cœur (alimentation animale), Demain la Terre (fruits et légumes), CRC (céréales), Vignerons engagés (vins) et Mr Goodfish (produits de la pêche et de l’aquaculture). Depuis son lancement en 2018, le collectif se pose en représentant d’une « alternative à l’agriculture conventionnelle et à l’agriculture biologique ».