BD Les âges perdus
Le Fort des landes

Régis Gaillard
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Avec Les âges perdus et son premier opus Le Fort des landes, le lecteur effectue une plongée au cœur d’une civilisation marquée par l’apocalypse survenue en l’an mille. Avec, en toile de fond, l’enjeu essentiel de réapprendre à domestiquer la nature et à cultiver la terre.

Le Fort des landes
Dans ce monde dévasté, l’un des enjeux vitaux est de pouvoir tout simplement se nourrir.

Bienvenue dans le premier épisode d’un récit rétro-apocalyptique qui en comportera quatre. Ici, l’humanité n’est pas sortie du Moyen Âge qu’elle doit déjà se réinventer. Nature inhospitalière, faune terrifiante et paysages minéraux désespérément beaux : les ingrédients d’une épopée fantastique sont réunis. L’œuvre est d’autant plus séduisante qu’elle est servie par un trait acéré comme une lame. Les scènes d’action débordent d’énergie, alternées avec des espaces de contemplation généreusement composés. Jérôme Le Gris, qui vient du cinéma, a trouvé en Didier Poli un précieux coréalisateur et chef opérateur. Au cœur de cette BD s’invite une réflexion sur notre histoire. Car l’intrigue se concentre sur l’éternelle opposition entre chasseurs-cueilleurs nomades et cultivateurs sédentaires. Par ailleurs, la thématique du savoir scientifique et de sa transmission apparait dès les premières pages de l’album. La recherche pour une société plus juste et apaisée se heurte à la résistance des dogmes jusqu’à la violence extrême. Derrière l’uchronie, des questions bien contemporaines.

Une épique reconquête

Le lecteur effectue ainsi une plongée dans un univers marqué par l’apocalypse survenue en l’an mille. La civilisation n’est plus ; place au temps de l’Obscure. Sur une Terre poussiéreuse, les bêtes sauvages ont évolué, plus massives et dangereuses que jamais. Mais leurs troupeaux offrent aux êtres humains une source de subsistance. En les suivant, l’homme est redevenu nomade. Pour trouver un refuge éphémère, les clans s’abritent autour d’anciennes ruines fortifiées. Primus, du clan de Moor, a déchiffré d’anciens parchemins. Il sait que l’engrain est domesticable. Grâce à ce blé sauvage, la famine pourrait être vaincue. Pour convaincre, il doit affronter des siècles de croyances, de tabous et de coutumes, au péril de sa vie. Publiée aux éditions Dargaud, cette bande dessinée, sombre voire parfois, très noire, montre combien la nature humaine peut mêler bien des contradictions. Avec, en toile de fond, l’envie de survivre en affrontant nombre de dangers et des périls, avec quantité de peurs et de préjugés qu’il convient de combattre. 

Aux éditions Dargaud, 14,50 €, 56 pages.