Lilian Seurre à Palinges
A Palinges, Lilian Seurre a repris en main son système fourrager

Marc Labille
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Confronté aux sécheresses successives, Lilian Seurre a décidé de reprendre en main son système fourrager après avoir suivi la formation Herb’Adéquat. Un travail riche en enseignements qui l’a fait adopter le pâturage tournant, augmenter la part de fourrages de qualité dans l’alimentation de ses animaux et investir dans la santé de ses sols. 

A Palinges, Lilian Seurre a repris en main son système fourrager
Pour ses vaches vêlant en automne, Lilian Seurre a augmenté la part d’enrubannage de fauche précoce.

Lilian Seurre élève un troupeau de 60 vaches charolaises à Palinges. Il produit des broutards et des femelles maigres ainsi que des mâles reproducteurs sélectionnés sur le caractère sans corne. Cet ancien inséminateur privilégie une conduite traditionnelle à l’herbe la plus économe possible. « Mon plaisir, c’est de voir mes vaches dans l’herbe ! », aime-t-il répéter. Mais trois sécheresses consécutives, l’obligeant à « donner à manger toute l’année », lui ont un peu fait « perdre le moral », comme il le confie. Ces années éprouvantes lui ont donné l’envie « d’être plus autonome en faisant pousser plus d’herbe ». Lilian s’est inscrit à la formation Herb’Adéquat dispensée par la Chambre d’Agriculture de Saône-et-Loire. L’éleveur confie y avoir appris beaucoup de choses. « Cette formation nous apporte des références, des bases pour mettre en application de nouvelles techniques ».

Quatrième saison de pâturage tournant

C’est ainsi que Lilian a pris connaissance des modalités pratiques du pâturage tournant : les repères pour organiser le pâturage, le chargement, la production de l’herbe, etc. Cette année, il entamera sa quatrième saison de pâturage tournant. Trois de ses quatre lots de vaches allaitantes sont concernés par cette conduite. L’un de ces lots compte 14 vaches et 14 veaux tournant sur une parcelle de 7 hectares scindée en 7 paddocks. Un autre lot de même effectif tourne sur une prairie de 14-15 ha dont 7,5 ha sont fauchés. En pâturage tournant, le chargement est de deux vaches suitées par ha pour les vêlages de mars-avril et 1,5 vache suitée/ha pour les vêlages de septembre-octobre, explique Lilian. L’éleveur fait en effet naître à deux périodes distinctes de l’année. Cela lui permet d’avoir moins de taureaux et d’étaler les ventes. Et l’exploitation n’a pas assez de bâtiments pour généraliser les vêlages d’automne, explique Lilian.

Pas de concentré au pré

Le pâturage tournant est très profitable aux broutards d’automne, fait valoir l’éleveur qui les conduit sans aucun aliment au pré. Ces veaux de septembre-octobre ne sont complémentés qu’en hiver en bâtiment jusqu’au 10 avril. Puis, ils poursuivent leur croissance dans la bonne herbe du pâturage tournant pour une vente en juillet-août. Quant aux vaches qui vêlent en mars-avril, le pâturage tournant améliore la réussite de leur reproduction tout en soutenant leur production laitière, indique Lilian. Leurs veaux sont vendus vers un an d’âge (vers le 10 mars) après avoir passé l’hiver au pré.

« Avec le pâturage tournant, on impose aux vaches de manger l’herbe d’une parcelle à la bonne hauteur et on évite le surpâturage et le tassement permanent. C’est un vrai plaisir quand on les change de paddock : elles arrivent en courant et dès qu’elles ont changé de parcelle, elles se mettent à manger la bonne herbe ! », confie Lilian.

Plus d’enrubannage pour les vêlages d’automne

Outre l’adoption du pâturage tournant, l’éleveur palingeois a aussi fait évoluer sa récolte fourragère. « En étudiant mon bilan fourrager, on s’est aperçu que je faisais beaucoup de stock, mais pas de qualité », rapporte Lilian. De fait, l’éleveur avait pour habitude de récolter principalement du foin sans privilégier vraiment la qualité du fourrage. Il craignait les effets de fourrages trop riches sur les vaches… Mais pour les vaches qui vêlaient en septembre, le foin n’était pas suffisant pour allaiter des gros veaux. Aussi, Lilian s’est-il mis à distribuer davantage d’enrubannage d’herbe à cette catégorie d’animaux. Il a accru sa surface consacrée à la récolte en enrubannage et il a avancé ses dates de fauche vers le 15 mai, soit une dizaine de jours plus tôt qu’auparavant. Une seconde récolte intervient fin mai, début juin. Pour ses vaches, Lilian mélange ces deux fourrages enrubannés à hauteur de deux tiers pour le fourrage le plus précoce et le plus riche et un tiers pour la seconde coupe. Avec cette ration, les vaches suitées des veaux d’automne n’ont pas besoin de concentré au pré, fait valoir l’éleveur.

Carbonate et phosphore pour les sols

La troisième décision prise par Lilian suite à la formation Herb’Adéquat a été d’améliorer les amendements. « Avec la mise en place du pâturage tournant, il fallait faire tourner les vaches plus vite et l’herbe ne les nourrissait pas assez. Le sol avait besoin d’être amélioré. J’ai donc investi dans de l’amendement calcique (carbonate) et du phosphore. Chaque année, j’épands 30 tonnes/ha de carbonate sur un tiers de mes 90 hectares », explique Lilian. Les effets de cet amendement ne se sont pas fait attendre. Dès la deuxième année, l’éleveur a observé un retour des légumineuses dans ses prairies naturelles. « Le trèfle s’installe à la place des bouses et il fournit de l’azote aux graminées aussi ». En ne faisant plus d’impasse sur cet élément de fonds qu’est le phosphore, Lilian a vu la qualité de ses foins s’améliorer avec des vaches qui « bousent moins liquide et mieux nourries », observe-t-il. Carbonate et phosphore représentent un investissement de 7.000 à 8.000 € par an. Mais « cela contribue à améliorer la résistance du sol et cela profite à tous les animaux de la ferme », fait valoir Lilian qui estime aussi que cette démarche de restauration des propriétés du sol est écologique. « Je souhaite être le moins critiquable possible sur mes pratiques », confie l’éleveur. Satisfait d’avoir consacré un peu de temps à se former à la gestion de l’herbe, Lilian Seurre est convaincu que « la maîtrise de son système fourrager passe avant tout le reste ».