Assemblée générale de la FDSEA de Saône-et-Loire
Une année déstabilisante

Cédric MICHELIN
-

Le 22 juillet à la Ferme du Mont Rouge à Blanot s’est tenue l’assemblée générale de la FDSEA de Saône-et-Loire. Comme un symbole, un lieu convivial, apprécié de la centaine d’adhérents présents, et preuve que l’agriculture même déstabilisée par la crise Covid sait s’adapter en toutes circonstances. Reste néanmoins que 2020 a été une année éprouvante pour les agriculteurs.

Une année déstabilisante
De g. à d., Henri Bies-Perré, Benoit Regnault, Jean-François Lacroix, Anton Andermaat et Luc Jeannin.

Déjà d’un point de vue humain. La crise sanitaire a entrainé un isolement forcé et tous espère « que la crise sanitaire va s’arrêter pour se revoir et échanger avec les adhérents », expliquait en introduction Joël Maltaverne, trésorier qui rappelait que les services FDSEA ont, malgré la crise, les confinements et le télétravail, réussi à « trouver un rythme normal ». Et de rappeler le grand principe d’un syndicalisme d’Homme et de services avec « des services économiques qui limitent ou payent le coût de l’adhésion ». 
Une activité syndicale qui aura été intense sur tous les fronts. « Résumer cette année est un exercice difficile », prévenait le responsable du service, Thibault Laugâa qui lançait quatre sujets principaux : les aléas climatiques, les attaques de loups, les problèmes de revenu et la volonté de communiquer positivement (lire page HH) sur l’agriculture et la viticulture de Saône-et-Loire.
Pour ce faire, les quatre secrétaire-généraux présentaient et développaient la suite de ces dossiers.
Premier à s’élancer, le président de la section Grandes Cultures, Benoit Regnault qui revenait sur « ce qui se trame » autour des Zones Vulnérables (lire aussi en page HH). Un sujet parmi d’autres. Le temps imparti ne lui permettait pas de parler des « ZNT riverains, du plan Pollinisateurs… ». Sur la directive Nitrates, Benoit Regnault démontait point par point les incohérences des Agences de l’eau, ici Loire-Bretagne voulant classer « 957 communes supplémentaires en Bourgogne Franche-Comté » et ce, chez nous, « en grande partie sur le Morvan, Charolais, Brionnais ! » mais également sur les plateaux du Haut-Doubs et de Haute-Saône. Alors qu’habituellement, il s’agissait de classer des zones de cultures, là, l’Agence classait des « prairies extensives ». Incohérent à l’heure ou l’élevage de ces secteurs extensifie encore pour palier aux sécheresses et manque de fourrages. D’ailleurs, les élus ont alors constaté qu’outre le changement des calculs, l’Agence n’avait fait que 2 analyses au lieu de 12 par point et en plus, en pleine sécheresse. La manifestation à Dijon l’a rappelé à tous, la profession ne compte pas laisser passer. « Il reste 240 communes sur le côté Ouest, on n’a pas terminé le travail », promettait de poursuivre Benoit Regnault.
Administrateur et vice-président du pays charolais à la FDSEA, François Nugue rebondissait sur la charte départementale Zones humides, « reconnue comme une référence au national » et qui donne à tous des « éléments concrets, des cartes de ce qu’est un fossé, un ruisseau et ce qu’il est en droit de faire ». Un travail de fourmi sur le terrain à l’heure où l’administration s’emmêle les pinceaux. Les Maires ruraux « demandent à être à nos côtés quand l’OFB vient », tant le dossier se complexifie avec le temps, les sécheresses ou excès d’eau.

ZNT riverain, flou inacceptable

Pour les grandes cultures et la viticulture, le président de l’Union Viticole 71, Patrice Fortune, revenait sur les ZNT riverains et la Charte départementale. Suite au décret fin décembre 2019, pour application au 1er janvier 2020, le décret définissant les nouvelles modalités de traitements avec ZNT prévoyait d’abaisser les distances possibles via une charte départementale. Sauf que le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État ont rendu des avis les remettant toutes en cause. « Pourtant, notre Charte a été élaborée avec sérieux. Cette incertitude est inacceptable. On dénonce ce flou qui veut que les Chartes sont considérées comme valides tant que non attaquées juridiquement », ne comprend pas la profession qui s’inquiète en cas de conflit futur. Un travail est engagé au national avec la FNSEA, alertée également des difficultés pour toutes les vignes étroites d’arrêter totalement le glyphosate.

Invivable loup

Ayant fait couler beaucoup d’encre et de sang surtout, Christian Bajard, président de la FDSEA, refaisait l’historique des attaques de loups dans le Charolais et le Clunisois. Des loups tuants « jusqu’à 15 brebis par attaque dans un même troupeau ». Aberrant mais à l’heure d’une société urbanisée sans lien avec l’élevage et la ruralité, il faut rappeler que « les victimes sont les éleveurs ». Difficile à voir et encore plus à chasser, il a fallu un travail considérable sur le terrain pour repérer les lots de brebis, coordonner les chasseurs… pour prélever le loup « le plus rapidement possible ». Reste que « c’est invivable pendant ces 8-10 semaines. Nous redisons que le loup n’est pas compatible avec nos zones d’élevage ». Les choses pourraient bouger dans les prochains mois avec les représentants des éleveurs qui ont quitté la réunion Loup dans les Alpes du Sud qui n’en peuvent plus après une montée en puissance des tueries depuis 25 ans. Idem dans l’Aveyron. « On doit mutualiser les moyens juridiques pour adapter cette convention de Berne. À nous de porter de plainte, d’attaquer », plaide déjà la section ovine de la FDSEA de Saône-et-Loire qui mobilise la FNO dessus. 
Vice-président à la FNSEA, Henri Bies-Perré faisait là un « parallèle avec l’agribashing. Des ONG montent ce genre de sujets  faune-environnement en épingle. Vos cotisations permettent d’être pied à pied avec eux. Seule la FDSEA peut être à la manœuvre. Comme pour les ZNT, plan Pollinisateur et autres, stop aux contraintes et faisons reconnaitre nos pratiques vertueuses ».

Faire respecter la loi EGAlim

D’accord lui répondait Guillaume Gauthier, président de la section bovine et administrateur FNB mais à condition que l’économie suive faisant référence au non partage de valeur au sein de la filière viande, bovine notamment. La loi EGAlim n’est pas appliquée et le Gouvernement ne fait rien pour la faire respecter. « On a vu le Ministre, on a vu les GMS, on a vu les boucheries… tout le monde nous dit oui pour le retour de valeur mais derrière, rien ». La profession a donc poussé pour une loi EGAlim2 plus contraignante pour les acteurs de la filière. Même type de réaction que pour la première mouture, des rumeurs sur de soi-disantes baisses de la demande. « Il y a un an, c’était sur l’export des broutards, du maigre. Aujourd’hui, certains disent que la consommation de viandes baisse mais ce n’est pas vrai. Ce sont de fausses rumeurs », dénonce Guillaume Gauthier qui a les vrais chiffres au national.
La structuration des filières est aussi un enjeu. Pour la section laitière, le vice-président de la FDSEA, Anton Andermaat se félicitait qu’avec « nos AOP, on a pris un peu d’avance sur la valorisation mais pas en lait de plaine ». Revenant sur la viande bovine, Guillaume Gauthier rappelait que la loi EGAlim veut 40% de Label Rouge et que la filière atteint péniblement 2,3% aujourd’hui encore.
Outre la reconnaissance des coûts de production et la montée en gamme, la FNSEA et ses FDSEA vont aussi chercher des sources de rémunération ailleurs en l’occurrence du côté des crédits carbone, via la démarche Carbon Agri qui permet aussi de « réaliser des économies de charges » sur les exploitations.

L'assurance oubliée de la Pac

Et il y a urgence, tant les trois années de sécheresse ont fragilisé les systèmes d’élevage. Autre aléa climatique majeur, le gel historique d’avril faisant craindre des pertes historiques en arboriculture et en viticulture. Pour Jean-François Lacroix, vice-président FDSEA, les calamités doivent être déclenchées certes mais « ne doivent pas exclure les agriculteurs qui sont diversifiés ». Idem pour le volet assuranciel, « il y a besoin d’une profonde réforme. À l’heure de la Pac, c’était le moment », regrette-t-il car assureurs comme agriculteurs ne peuvent plus faire face à la multiplication des aléas, eux même accentués par le changement climatique. Les inondations du Val de Saône, Bresse… en plein mois de juillet sont le dernier exemple en date.
Dégrèvement TFNB, MSA, aides des collectivités… la FDSEA se mobilise pour renforcer « ce panel de solutions ». Pour Henri Bies-Perré, le volet assurance va devoir dans un futur proche « mixer des budgets de l'État, de l'Europe, de fonds privés… pour baisser les franchises et augmenter les taux d’assurance. Car la solidarité nationale est à privilégier plutôt que tous les ans ».