Gel en Rhône-Alpes-Auvergne
Un objectif de 35 à 40 M€ d’aides pour les agriculteurs sinistrés

La Région Rhône-Alpes-Auvergne va engager un dispositif exceptionnel d’aides pour les agriculteurs sinistrés par l’épisode de gel de début avril. Laurent Wauquiez appelle au soutien des Départements et Communautés de communes avec pour objectif de débloquer 35 à 40 M€*. Le président d’Auvergne-Rhône-Alpes souhaite un versement à la fin de l’été.

Un objectif de 35 à 40 M€ d’aides pour les agriculteurs sinistrés
Laurent Wauquiez appelle les Départements et les Communautés de communes qui ont une présence agricole importante à faire converger leurs aides avec celle de la Région pour atteindre une enveloppe de 35 à 40 M€. ©AA

Vous avez annoncé le 9 avril dans la Drôme une enveloppe régionale de 15 millions d’euros (M€) pour aider les agriculteurs sinistrés par l’épisode exceptionnel de gel de début avril. Est-ce bien le montant d’aides sur lequel la Région va s’engager ? 
Laurent Wauquiez : « Suite à cet épisode de gel, je me suis déplacé dans la quasi-totalité des territoires touchés. Ce que j’ai vu m’a énormément marqué ! Des agriculteurs qui se sont battus durant trois nuits successives ont perdu en une semaine entre 80 et 100 % d’une récolte. Nous devons bien comprendre la menace : potentiellement, nous avons 6.000 exploitants qui peuvent aller au tapis, toute notre arboriculture et une large partie de la viticulture de la région peuvent être par terre ! Ce plan régional serait le plus gros jamais mobilisé sur une calamité en Auvergne-Rhône-Alpes. Nous appelons à nos côtés les Départements et les Communautés de communes où il y a une présence agricole importante pour faire converger toutes nos aides et atteindre un niveau qui soit autour de 35 à 40 M€ de solidarité. La Région serait le premier financeur. Mais il faut être lucide, les montants que nous allons verser, si jamais il n’y a pas une solidarité nationale exceptionnelle, ne sont pas à la hauteur de l’ampleur des pertes, qui pourraient atteindre entre 200 et 300 M€ dans la région. »

Quelle est la nature de ces aides et à qui sont-elles destinées ?
L.W. : « Nous avons trois filières qui ont été touchées : les arbres à noyaux, les arbres à pépins et la viticulture. Le danger pour l’arboriculture à pépins est qu’il faut attendre la fin de l’année pour évaluer l’ampleur des dégâts. Sauf que les charges sont là et les agriculteurs vont continuer à travailler, voire davantage pour certains, afin d’essayer de rattraper ce qui peut l’être. Mes priorités sont donc, tout d’abord, que nos aides soient versées vite : pour moi l’idéal serait à la fin de l’été. Ce que nous sommes également en train de définir avec la profession serait un volet pour répondre à des situations exceptionnelles, des jeunes qui viennent de s’installer et que l’on ne veut pas perdre, des agriculteurs qui viennent de faire des investissements… J’insiste aussi sur le fait que les agriculteurs victimes du gel font face à une fermeture climatique : je demande donc à l’Etat qu’ils puissent avoir accès aux mêmes types d’aides que celles déployées pour le Covid dans le cadre de fermetures administratives. »

 

Propos recueillis par Sébastien Duperay

* Entretien accordé le 27 avril. Le plan a été présenté en assemblée plénière de la Région le 29 avril. 

Le président de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Laurent Wauquiez. ©C-Pietri

L’Etat a annoncé la création d’un fonds de solidarité exceptionnel d’un milliard d’euros pour les agriculteurs victimes du gel. Quelle sera la place de votre plan régional ?
L.W. : « Nous sommes dans une course de vitesse avec des exploitations qui ont perdu leur trésorerie. Nous connaissons les dispositifs de l’Etat : entre le temps que le zonage soit fait et le délai de traitement administratif pour que ça redescende dans les exploitations, nous aurons de la chance si les agriculteurs sont indemnisés avant fin 2021. Ma préoccupation est de faire comprendre au niveau national qu’ils doivent aller vite. Le plan régional vise à être plus simple, plus rapide et capable de prendre en compte des situations particulières. Le milliard d’euros pourrait représenter 150 M€ pour notre région : si nous rajoutons 40 M€, cela signifie que notre région aura le plan de soutien le plus important de France. Au-delà de ces réponses à court terme, nous devons aussi réfléchir à moyen terme pour obtenir une assurance climatique nationale qui protège les agriculteurs. Il faut créer un dispositif sur-mesure avec des cotisations plus faibles qu’aujourd’hui, la disparition des franchises, un accès pour tous les agriculteurs et des remboursements plus élevés. Cela suppose que nous mettions de l’argent dans un fonds public pour constituer cette assurance. Avec la profession, nous considérons que ce dispositif doit être national. Mais au niveau de la Région, nous pourrions également aider nos agriculteurs à cotiser à ce fonds. Nous devons sortir du fonds des calamités qui n’est plus à la hauteur des enjeux du réchauffement climatique. Et cela doit être l’un des sujets prioritaires de la réforme de la Pac. »

Vous avez présenté fin 2020 un plan de lutte contre le changement climatique de 900 M€, pour lequel la Région consacrera 50 M€ par an à sa mise en œuvre. Avez-vous l’intention de revoir les ambitions de ce plan ?
L.W. : « A plus long terme, il est évident que nous ne devons pas baisser notre niveau d’investissement et d’accompagnement sur la protection face aux aléas climatiques. Nous l’avions anticipé en Auvergne-Rhône-Alpes avec le plan de lutte contre le changement climatique : le système est là, il est opérationnel et efficace. Les investissements concernent les réseaux d’eau, la lutte contre la grêle, les réseaux d’aspersion ou les bougies contre le gel, etc. Notre objectif est d’avoir 50 % de nos parcelles protégées d’ici 3 ans. Sur la quasi-totalité des parcelles où je me suis rendu, il y avait par exemple des filets para-grêle. Nous devons aussi continuer de nous battre pour que l’Etat arrête de nous mettre des bâtons dans les roues pour la création de retenues collinaires et de réseaux d’eau parce que nous en avons besoin ! Nous ne devons pas baisser la garde. »