Les marchés de la viande à la loupe dans le Brionnais
Le 12 décembre dernier, les apprentis BTSA Acse du CFA de Gueugnon, accompagnés de leur formateur en module M55 (" Entreprise agricole, produits agricoles et marchés") ont passé une journée dans le Brionnais. L’objectif était de comparer différents modes de commercialisation de la viande bovine, en maigre ou en gras. Mais aussi de gré à gré en ferme ou en marchés, vente au cadran, coopératives, vente directe… Une deuxième journée en mars sera consacrée à la rencontre d’une organisation de producteurs. Voici le compte-rendu réalisé par les élèves.

Première étape du périple, l’incontournable marché au cadran de Saint-Christophe-en-Brionnais. Ce marché, créé par lettre patente du roi Charles VIII en 1488, est devenu au cours du XIXe siècle, le plus gros marché aux bovins du territoire. À partir de 1961, le marché est fixé le jeudi et devient hebdomadaire. Depuis 2005, le changement de jour du marché s’imposait. Malgré quelque réticence, il est passé du jeudi au mercredi car les apports étaient en baisse constante.
En 2009, le marché au cadran est inauguré. C’est-à-dire qu’il est basé sur l’anonymat. À leur arrivée, un numéro de lot est attribué aux animaux. Ils sont pesés et défilent devant les acheteurs. Le cadran permet d’afficher le poids des animaux, leur date de naissance, l’origine et l’évolution du cours (prix total et prix au kilo vif). Le nom de l’éleveur n’apparaît pas. Le paiement est effectué à 48 heures, c’est-à-dire le vendredi.
Le marché au cadran permet aux éleveurs de valoriser leurs animaux et de concurrencer les autres marchés comme celui de Moulins-Engilbert dans le département de la Nièvre, également classé dans les premiers marchés nationaux.
Le marché au cadran de Saint-Christophe-en-Brionnais est divisé en trois parties : le matin, pour la commercialisation des jeunes bovins en maigre ; l’après-midi pour des vaches maigres pour l’engraissement et le marché de gré à gré des animaux gras.
En moyenne, 1.000-1.100 bovins sont présents par marché. Une taxe de 2 % par animal est demandée à l’éleveur pour l’apport de bovins. Les éleveurs qui amènent des animaux viennent d’un rayon de 100 km autour de Saint-Christophe-en-Brionnais. Environ 90 % des animaux amenés sont vendus à chaque marché. En 2020, 49.565 bovins ont été vendus et en 2019, 58.503 bovins.
Les races présentes sont principalement des bovins charolais (71 %), puis des croisés (14 %), des limousins (9 %), des aubracs (3 %) et quelques autres races bovines (3 %).
Les acheteurs sont essentiellement des acheteurs français avec des transporteurs de toute la France. Il y a également des acheteurs privés qui viennent acheter pour compléter leur camion puisqu’ils achètent surtout en ferme.
Le marché au cadran de Saint-Christophe a aussi un important impact touristique puisque des visiteurs viennent toute l’année pour le découvrir. De plus, le bocage du Charolais-Brionnais est candidat pour être classé à l’Unesco.
Deuxième étape, chez Bruno Ducerf, négociant en bestiaux privé situé à Saint-Julien-de-Civry. Il travaille essentiellement des animaux gras. Il commercialise environ 2.000 vaches grasses par an à l’abattoir. Il essaie de limiter l’exportation de bovins maigres et réalise donc, pour se faire, des échanges avec un autre négociant, la SARL Corneloup Philibert.
Bruno Ducerf livre à cinq abattoirs : Saint-Étienne, Montluçon, un dans le nord, l’est et le sud. Les animaux demandés dans le nord sont des bovins cirés et dans le sud des bovins gras (environ 20 bêtes spécifiques sont demandées). Le transport des animaux est délégué à l’entreprise Barnaud.
Troisième étape en direction de la SARL Corneloup Philibert, entreprise basée à Curbigny. Ce négociant privé a trois grandes activités : un centre d’allotement, le transport et l’engraissement. Environ 65.000 bovins sont commercialisés. 63.000 sont vendus en maigre pour l’Italie. L’entreprise fait également de l’engraissement de babinettes croisées, environ 2.000 par an qui sont achetées au marché au cadran de Saint-Christophe-en-Brionnais.
Enfin, dernière étape de cette journée au Gaec Bichet, exploitation d’élevage en agriculture biologique qui a la particularité de faire de la vente directe « pour avoir du contact avec des gens, vendre à des cours plus élevés », explique David Bichet. Le chef d’exploitation constate que diversifier sa gamme de viandes « plaît aux gens » même s’il a dû arrêter les colis de 10 kg pour se concentrer sur la vente de pièces au détail. Dès 2015, il avait fait construire une unité découpe-transformation à la ferme pour se simplifier la préparation-vente aux clients. Sept personnes y travaillent maintenant. Cinq employés à la transformation et à la découpe (et préparation de commande) et deux salariés pour la partie exploitation. David Bichet fait le constat qu’il a « très peu » de clients locaux car, il n’a pas de magasin de vente à la ferme et que déjà beaucoup de viandes charolaises sont vendues partout dans le département. Résultat : 95 % de ses ventes se font en dehors du département, dans les grandes agglomérations principalement. David Bichet fait appel à des transporteurs frigorifiques (0 à 4 °C ou -18 °C) pour livrer selon la quantité achetée. En moyenne, la commande se situe autour de 5 kg et le coût du transport est à la charge du client. 60 % des viandes commercialisées viennent de son exploitation mais 40 % proviennent d’autres agriculteurs. C’est ainsi suffisant pour répondre à la demande des clients qui représentent au final à l’année, une centaine de tonnes. Ce sont principalement de jeunes vaches (car toutes les femelles sont mises à la reproduction et réformées après le premier vêlage) soit environ 200 à 250 bêtes par an. Si David compte quelques clients étrangers parfois, c’est bien sur une base de clients « très fidèles » sur lesquels il s’appuie.