Histoire
La Loire et ses catastrophes au XXIe siècle

La Loire a été le théâtre de nombreux drames climatiques, sanitaires, industriels et humains au fil des siècles. Jacques Rouzet, Ligérien d’origine, s’est donné la lourde tâche d’en relater les plus marquants à travers son ouvrage « Les Grandes catastrophes du département de la Loire ». Tour d’horizon.

La Loire et ses catastrophes au XXIe siècle
L’ouvrage de Jacques Rouzet, « Les Grandes catastrophes du département de la Loire », retrace ces drames fatalistes qui ont frappé le territoire depuis le Moyen-Âge.

Natif de Roanne, Jacques Rouzet est un homme aux multiples facettes : maîtrises de lettres modernes et d’histoire, scénariste (créateur du personnage de Louis la Brocante) et romancier. Son penchant pour l’écriture s’est concrétisé par la parution de plusieurs ouvrages, à l’image de sa collaboration aux Grandes affaires criminelles de la Loire (2014) ou du volume dont il est question aujourd’hui : « Les Grandes catastrophes du département de la Loire ».

À travers celui-ci, il passe en revue et relate les différentes catastrophes survenues sur le territoire au fil des siècles, de la fin du Moyen-Âge au début des années 2010 : épidémies de peste, famines, canicules, incendies, grandes sécheresses, drames ferroviaires et aériens, crues dévastatrices, etc. Choix a donc été fait de nous focaliser sur le XXIe siècle ou, comme le qualifie l’auteur, sur « le troisième millénaire ».

Accidents industriels 

Ainsi, la série débute par le déraillement d’un train, parti d’un centre de triage de l’agglomération lyonnaise avec pour destination Saint-Pierre-des-Corps, en Indre-et-Loire. Le 21 mars 2000, un mardi, un convoi de pas moins de 35 wagons quitte la voie entre Saint-Galmier et Cuzieu vers 6h30. Sur les 19 wagons couchés sur la voie, trois des quatre wagons contenant de l’acide nitrique sont éventrés. « De leurs flancs s’écoulent 54 tonnes de produits dangereux […] Très vite, le ciel baldomérien se voile d’un fort dégagement de fumées dont la couleur orangée présage une méchante pollution d’origine chimique. Pendant une grande partie de la journée, un nuage dessine dans le ciel une sorte de champignon aux couleurs de l’amanite phalloïde. » Si aucune victime n’est finalement à déplorer, le drame humain a été évité de peu, contrairement au désastre écologique. Après deux journées à dégager les wagons, deux années de travaux auront été nécessaires pour évacuer près de 4 000 t de terres polluées.

Onze ans plus tard, un 25 janvier, l’histoire semble se répéter, avec un drame humain une nouvelle fois frôlé. Un train de marchandises et un convoi exceptionnel se percutent à Balbigny, sur la ligne ferroviaire Roanne-Saint-Etienne. « Le cheminot a effectivement freiné au maximum, mais stopper un train de 500 m de long, aussi lourdement chargé (trois poutrelles d’une cinquantaine de tonnes, NDLR), nécessite une distance plus importante que les 200 m qui le séparent du semi-remorque. » Outre les blessures légères du conducteur du train et des dégâts matériels conséquents, le pire est évité.  La voie ferrée, endommagée sur 1,5 km, est rendue au trafic le 4 février, soit un peu moins de deux semaines après la collision.

Incendies en tous genres

L’an 2000 fait débuter le nouveau millénaire de la pire des manières sur le territoire ligérien. « Au mois d’août, le versant sud-est du Parc naturel régional du Pilat subit un catastrophique incendie. » Trois communes (Bourg-Argental, Saint-Julien-Molin-Molette et Burdignes) en font les frais. En effet, dans ce secteur, la forêt recouvre près de la moitié du territoire. « Entre 1 400 et 2 000 ha partent en fumée […] L’origine du désastre ? Les enquêteurs finiront par la découvrir : un barbecue mal éteint ! »

S’il y a bien un incendie qui a laissé des traces dans ce début de XXIe siècle, c’est celui survenu à Saint-Romain-en-Jarez en octobre 2003. Le départ de flammes vers 15 heures, puis l’explosion d’un hangar de 1 000 m2 appartenant à un arboriculteur du village, font les gros titres. À l’intérieur du bâtiment : un chariot élévateur à essence, un chargeur de batteries, deux bouteilles de gaz de 13 kg, divers matériels agricoles, 500 kg de chaux vive, 500 caisses en bois, 3 à 5 t d’ammonitrate et entre 6 000 et 7 000 caisses en plastiques. Au total, 26 blessés sont recensés, dont 18 sapeurs-pompiers. Si la cause de l’incendie est encore officiellement inconnue, de nombreuses hypothèses ont été avancées : « fermentation du foin stocké, cigarette mal éteinte ou, la plus crédible, l’éclatement d’une ampoule laissée allumée. »

Le 20 novembre 2010, peu avant 9 heures, une violente explosion survient au 22 de la rue des Tilleuls, dans le centre-ville stéphanois. La façade et les deux derniers étages d’un immeuble qui en compte trois s’effondrent. Là encore, « la mort n’est pas au rendez-vous. Les cinq disparus sont retrouvés sains et saufs ». L’hypothèse de la fuite de gaz est finalement confirmée.

Un an plus tard, le 25 juin 2011, les 800 m2 d’un bâtiment de la fonderie Feursmetal sont soufflés par l’explosion d’un four en cours de refroidissement. Pas moins d’une soixantaine de pompiers sont déployés sur place, un premier bilan confirme le décès de deux ouvriers et d’autant de blessés. Moins de deux mois plus tard, toujours dans la cité forézienne, rue Parmentier, vers 20h30, un nouvel incendie se déclare. « Dans les locaux de DJ Méca, un feu ravage une machine et menace les ateliers envahis par une épaisse fumée. Le pire est écarté et le sinistre circonscrit. »

Cette même année, jour du Réveillon de Noël, rue de La Talaudière à Saint-Étienne, la zone industrielle s’embrase. Un bloc de bâtiments ultramodernes accueillant différentes entreprises est touché. En moins d’une demi-heure, le Sdis 42 dépêche une centaine de pompiers. Démarré vers 16h45, l’incendie est finalement éteint aux alentours de minuit. « Les dégâts occasionnés par l’incendie demanderont quelques semaines de travaux, toutefois les données stratégiques n’ont pas été atteintes ».

Sécheresse, crues et tempêtes

L’épisode caniculaire de l’été 2003 aura fait couler beaucoup d’encre… et de sueur aux Ligériens. « Un mois de juin étouffant préfigure la catastrophe climatique à venir. Conformes aux normales saisonnières dans les premiers jours, les températures virent à la canicule dès le 12. » Mais c’est en juillet que les températures atteignent leur paroxysme : 40°C, pic d’ozone, sécheresse, grêle. En août, même combat, les premiers records de chaleur tombent dans le département dès le 3 du mois. Au final, « selon un bilan officiel, le nombre de décès causés par la canicule s’élève en France à 19 490 ». Dans le département, elle est évaluée entre 1 200 et 1 300 victimes ligériennes. En 2012, une vague de chaleur submerge le pays depuis la deuxième quinzaine du mois d’août. « Les températures frôlent les sommets de l’été 2003. Moins longue, touchant une population prévenue des risques encourus, cette poussée de touffeur estivale ne provoque pas une hausse sensible de la mortalité […] mais rappelle de pénibles souvenirs avec un 38,2°C relevé le dimanche 19 août à Andrézieux-Bouthéon. »

Si le fleuve de la Loire fait parler de lui en 2002 et 2003, c’est en 2008 qu’il dépasse ces années en termes de violence et de rapidité avec ”La crue de la Toussaint”, inondant une partie de la plaine du Forez et du Roannais. « Le 1er novembre 2008, en début de soirée, une pluie tenace, soutenue, arrose sans discontinuer la région de Rive-de-Gier. En six heures, elle sature de 60 mm d’eau un sol que les précipitations des jours précédents ont détrempé […] Des rouleaux de flots boueux s’engouffrent dans les rues étroites du centre-ville, entraînant avec eux des dizaines de véhicules. » Un an plus tard, les cicatrices de la crue étaient encore visibles.

En 2008, la Loire inonde une partie de la plaine du Forez et du Roannais, à l’image de cette photo prise aux abords de Feurs.

Dernière catastrophe et non des moindres évoquée à travers le livre de Jacques Rouzet, la tempête du printemps 2012 (rappelant celle de 1999, à moindre mesures). Si aucun mort n’est à déplorer dans la Loire, malgré quelques blessés légers, ce sont plutôt des dégâts matériels et naturels qui ont marqué les esprits : branches et troncs d’arbres sur le sol et les routes, tuiles et charpentes enlevées des toits, toitures arrachées et dégradations en tous genres. « Le Progrès daté du 30 avril 2012 fait un ultime inventaire des dommages infligés aux Ligériens : 6 000 familles et un peu moins d’un tiers des communes de la Loire toujours privées d’électricité. »

Publié en 2013, l’ouvrage de Jacques Rouzet n’est donc logiquement pas en mesure d’aborder les catastrophes ligériennes survenues ces dix dernières (voir encadré). Encore disponible sur les différentes plateformes (Fnac, Amazon, etc.), l’ouvrage explore, comme précédemment évoqué, les drames sur le territoire depuis le Moyen-Âge.

Axel Poulain