Loi ÉGAlim
Une nouvelle proposition de loi pour protéger le revenu des agriculteurs

Le texte prévoit que les prix auxquels les produits agricoles sont vendus au premier transformateur seront garantis tout au long de la chaine alimentaire. La part négociée du prix des matières premières agricoles dans le prix des produits transformés, ne sera donc plus renégociable.

Une nouvelle proposition de loi pour protéger le revenu des agriculteurs

Puisque les États généraux de l’Alimentation, les plans de filières et la loi ÉGAlim 1 n’ont pas apporté des résultats attendus, le gouvernement a décidé de renforcer son arsenal législatif et réglementaire pour défendre le revenu des agriculteurs. Le 23 juin dernier, Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture, a présenté la proposition du député de l’Aube, Grégory Besson-Moreau, qui autorisera les agriculteurs à vendre leurs produits agricoles à des industriels à des prix qui couvrent leurs coûts de production. Et par la suite, la part du prix négocié des produits agricoles dans les prix des produits transformés, sera non renégociable. Autrement dit, la grande distribution ne pourra pas contester les prix auxquels les produits agricoles de base ont été achetés par les industriels de la transformation. Les produits de marque distributeurs ne sont pas concernés par cette proposition de loi car la contractualisation est souvent directe, sans intermédiaire.

La proposition de loi défendue par le gouvernement a été adoptée la semaine dernière par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. « C’est une proposition de loi novatrice qui vise à protéger l’agriculteur en rendant les négociations avec les transformateurs plus transparentes », défend un conseiller proche du dossier. Il contribue donc à créer un climat de confiance entre les deux parties. Une fois votée, cette loi entrerait en application avant la nouvelle période de négociations commerciales entre transformateurs et distributeurs, à la fin de l’année.

Des prix sanctuarisés

Dans les détails, le corps de cette proposition de loi comporte cinq articles majeurs. Le premier article impose la contractualisation pluriannuelle de trois ans, assise sur des indicateurs de prix, de coûts de production et de qualité que les parties choisiront à leur guise. Ce contrat pluriannuel comportera des clauses de révision pour prendre en compte l’évolution des indicateurs retenus.

Le deuxième article de la proposition de loi sanctuarise les prix négociés, autrement dit, « ce qui a été négocié entre les producteurs et le premier transformateur n’est plus négociable ». En conséquence, les négociations entre les industriels et la grande distribution porteront seulement sur les marges et les coûts de fabrication des produits transformés. La mise en place d’un tiers indépendant (commissaire aux comptes, expert-comptable, etc.) assurera la transparence sur ce qui n’est pas négociable, tout en protégeant le secret des affaires.

Pour résoudre plus facilement les litiges, le troisième article de la proposition de loi du gouvernement prévoit la mise en place d’un comité des règlements des différends entre l’agriculteur et le premier acheteur, sur le modèle de ce qui existe déjà dans les télécommunications. Ce comité serait en mesure de prendre le relais de la médiation entre les parties d’un contrat contesté. En prenant des mesures conservatoires, il éviterait par exemple que des situations conflictuelles entre les producteurs et les transformateurs ne s’enlisent.

Les quatrième et cinquième articles de la proposition de loi portent sur les origines des produits contractualisés et sur l’interdiction des campagnes publicitaires « de ventes de dégagement » destructrices de valeur, puisqu’elles promeuvent la commercialisation de produits alimentaires à des prix défiant toute concurrence, sans prendre en compte les coûts de production des produits agricoles. 

FNSEA et JA sont « lucides »

FNSEA et JA sont « lucides »

« La FNSEA et JA sont lucides : il faudra que les opérateurs se saisissent des outils et les respectent dans un esprit de dialogue et de confiance renouvelés pour que la valeur revienne dans les cours de ferme », indiquent les deux organisations agricoles le 25 juin. Elles réagissaient à l’examen de la proposition de loi du député Grégory Besson-Moreau (Aube) qui a été adoptée, en première lecture, à l’unanimité, le 24 juin. Cette proposition de loi vise à protéger les agriculteurs dans leurs relations commerciales avec les industriels et la grande distribution. « Les députés ont entendu le message puisque des avancées sont notables sur chacun de ces points. La voie est donc tracée pour un texte précis qui vient encadrer les règles sur la contractualisation et les relations commerciales dans la chaîne d’approvisionnement alimentaire », poursuit le communiqué commun. Pour la FNSEA et JA, « la partie est loin d’être finie », car le texte doit maintenant être discuté au Sénat. « Il faut tout faire pour que la proposition de loi soit applicable dès les prochaines négociations commerciales : notre exigence est totale en la matière », insistent les deux syndicats agricoles. Pour eux, « l’objectif de rentabilité économique des exploitations » qui doit permettre aux agriculteurs « de vivre dignement de leur métier » est indissociable de leur « capacité (…) à réussir le virage de la transition écologique » mais également indissociable de l’objectif « de souveraineté alimentaire ».