Visite ministérielle en Bourgogne Franche-Comté
Des enveloppes pour relancer l’agriculture

Cédric MICHELIN
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Le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, est venu, le 24 septembre, découvrir l’agriculture jurassienne et présenter le plan de relance : 1,2 milliard d’euros prévus pour l’agriculture française. Après avoir vu l’abattoir Gexal de Perrigny et le lycée agricole de Montmorot, le périple du ministre se terminait sur une exploitation agricole, à Ounans, chez Damien et Charles-Adrien Ogier. L'occasion de porter des messages à dimension régionale.

Des enveloppes pour relancer l’agriculture

« Je veux une agriculture forte. Notre premier défi, c’est notre souveraineté ! » : les premiers mots de Julien Denormandie, le ministre de l’Agriculture, à son arrivée sur l’exploitation des frères Ogier à Ounans, ont donné le ton de cette visite ministérielle en terre jurassienne. Certes, à l’invitation du préfet Philot, le ministre était venu découvrir l’agriculture du département. Mais cette journée fut surtout celle de la présentation du plan de relance consécutif à la crise du Covid-19. Un plan de 1,2 milliard d’euros en faveur de l’agriculture française !
Un plan que Julien Denormandie a égrené et détaillé tout au long des différentes étapes de cette journée, en fonction des thématiques qui ont été abordées.

« Nous avons besoin des abattoirs de proximité... »

Première étape à l’abattoir Gexal à Perrigny où, dans le cadre de France Relance, le ministre a annoncé une enveloppe de 130 millions d’euros pour le plan de modernisation des abattoirs. L’objectif étant d’améliorer les conditions de travail des salariés. Mais également de travailler sur le volet bien-être animal par des aménagements destinés à réduire le stress des animaux avant l’abattage... « Il nous faut des moyens pour améliorer le travail des abattoirs et accompagner la filière. Nous avons besoin des abattoirs de proximité... » a rassuré le ministre.
Deuxième étape au lycée agricole de Montmorot et, cette fois, une enveloppe de 10 millions d’euros annoncée. Elle sera consacrée au financement d’une campagne de communication destinées à mieux faire connaître l’enseignement agricole et les métiers du vivant. Face aux élèves, Julien Denormandie a dit sa volonté d’être le défenseur des sciences du vivant et a appelé les élèves à s’engager dans ce chantier...
La rue traversée, c’est dans les locaux de l’exploitation du lycée que la journée a continué, avec une étape consacrée aux projets alimentaires territoriaux. Là, ce sont 50 millions d’euros qui seront débloqués pour soutenir les cantines scolaires des petites communes. En développant leurs équipements, en formant leurs personnels et ce afin de proposer régulièrement des repas à base de produits frais et locaux. Cet approvisionnement local s’inscrit complètement dans des projets alimentaires territoriaux (PAT). Tout comme le développement des circuits courts, la lutte contre le gaspillage, l’exemplarité des pratiques... Vertus reconnues par tout un chacun dont Clément Pernot, le président du Conseil départemental qui se dit très favorable à cette initiative. Julien Denormandie fixe alors un objectif : au moins un PAT par département dans les deux ans qui viennent. Et là, c’est une enveloppe de 70 millions d’euros qui sera débloquée selon le ministre qui invite les porteurs de projets à ne pas attendre : « les premiers arrivés seront les premiers servis ! ».

« Montrez que nous sommes des leaders ! »

La pluie était au rendez-vous à l’arrivée de la délégation ministérielle sur l’exploitation des frères Ogier à Ounans. Un signe du destin après toutes ces semaines de sécheresse ? Le changement climatique et ses conséquences ont été au centre des discussions lors de la visite de la ferme. Fiers de faire visiter leurs nouveaux bâtiments, les frères Ogier ont cependant insisté sur ce changement climatique « qui va parfois plus vite que les capacités d'adaptation des agriculteurs ! ». Ce à quoi Julien Denormandie a répondu en invitant, plus généralement, les agriculteurs « à ne pas rester sur la défensive mais, au contraire, à passer à l’offensive. Montrez que nous sommes des leaders ! »

Michel Ravet

Changer le logiciel de votre administration !

Damien et Charles-Adrien Ogier présentent l’exploitation, les nouveaux bâtiments mais insistent aussi sur le changement climatique, qui va parfois plus vite que la capacité d’adaptation des agriculteurs. Sur ce point Emmanuel Schouwey, vice-président d’Interval, interpelle, document en main, le ministre sur le projet d’arrêté concernant l’irrigation : « vos services doivent revoir leur copie ; interdire l’irrigation le week-end n’a pas sens ».
Christophe Chambon, président de la FRSEA Bourgogne Franche-Comté, poursuit sur le changement climatique : « donnez la consigne à vos administrations de changer les logiciels ; il est urgent de mieux stocker et gérer l’eau. Pour cela, il faut faire évoluer les procédures pour l’agriculture comme pour l’alimentation en eau des populations ».

Christophe Buchet, président de la FDSEA du Jura, prend le relais : « nous partageons l’idée qu’investir reste indispensable si nous souhaitons garder notre souveraineté alimentaire et répondre aux défis des transitions. Nous sommes prêts à relever ces défis mais il faudra nous soutenir pour la modernisation de nos exploitations, avec les bâtiments et matériels du futur, la gestion de l’eau, le développement des énergies renouvelables et le soutien aux investissements dans nos outils de transformation. La mécanique doit être opérationnelle et équitable pour toutes les régions ».
Sur ce dernier point, le ministre apporte tout de suite une réponse qui manque singulièrement de précision : « sur le plan de relance, il n’y aura pas d’enveloppe régionale ; les premiers arrivés seront les premiers servis !»

Le président des Jeunes agriculteurs du Jura, Guillaume Martin, alerte le ministre sur le renouvellement des générations : « nous avons de nombreux Gaec avec des associés qui vont partir à la retraite. Il est urgent de rénover le parcours à l’installation et de prévoir des dispositifs afin de faciliter les installations sociétaires, souvent une condition nécessaire pour limiter les contraintes de l’élevage ».

Dans la foulée, Christophe Chambon revient sur les projets portés par la profession : « le ministère et la Région nous ont soutenus pour le projet « Profilait » qui prévoit de créer la première filière laitière régionale utilisant des protéines de proximité. Nous vous remercions pour cette écoute. Pas de dogmatisme et un peu plus de pragmatisme, l’agriculture et l’agronomie sont des sciences complexes du vivant. Nous attendons, par exemple, des outils pour mettre en œuvre le contrat de solutions avant d’interdire les produits phytosanitaires. Mobilisez un peu plus les chercheurs de l’Inrae pour qu’ils apportent des réponses à nos impasses techniques ! ».

François Lavrut, le président de la chambre d’agriculture du Jura et d’autres responsables professionnels ont rappelé les priorités sur la nouvelle Pac : « sachez vous appuyer sur les systèmes agricoles vertueux existants. Ici, vous avez la polyculture élevage, les zones d’appellation, le système allaitant basé sur l’herbe. Reconnaissez l’existant dans les éco-schemes (future Pac, NDLR), initiez les programmes opérationnels pour conforter les filières, apportez des réponses aux zones intermédiaires autour de projet comme les protéines et faites reconnaître l’ICHN en mesure environnementale, mais n’inventez pas une nouvelle usine à gaz ».