Ravageurs des cultures
Jaunisse nanisante : objectif pucerons

Françoise Thomas
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À défaut de solution efficace contre les virus de la JNO, la lutte cible les pucerons. Les produits disponibles en céréales à paille offrent une protection satisfaisante, mais ils doivent être correctement positionnés : pas trop tôt (car ils n’ont pas d’action préventive), mais mieux vaut un peu tard que jamais en cas de risque avéré !

Jaunisse nanisante : objectif pucerons

Évaluation du risque : observer les pucerons

Les pucerons ne sont pas responsables de dégâts directs. Ils sont nuisibles par le biais des virus qu’ils peuvent transmettre aux plantes. Mais à défaut de solution efficace contre les virus, la lutte cible uniquement les pucerons.
Les plantes sont très sensibles à l’infection virale depuis les tous premiers stades jusqu’au stade début montaison. En pratique, la période à risque s’étale donc depuis la levée jusqu’aux premières gelées significatives.
Les symptômes sont visibles à partir de la sortie hiver sur orge d’hiver et au printemps sur blé tendre. Mais lorsque les symptômes apparaissent, il n’existe aucune solution de lutte curative.
À ce jour, l’analyse de risque repose uniquement sur les observations de pucerons réalisées directement sur les plantes dans les parcelles.

Sur jeune plante, les pucerons sont assez facilement visibles sur les feuilles à condition de respecter quelques règles pour l’observation.
- Privilégier si possible les conditions ensoleillées, durant les heures les plus chaudes de la journée (fin de matinée et début d’après-midi). Privilégier les zones à risque (proches des haies ou de réservoirs potentiels tels que des bandes enherbées, jachères, maïs) et rechercher la présence de pucerons sur des séries de 10 plantes (plusieurs lignes de semis).
- Tôt le matin ou en conditions froides et pluvieuses, les pucerons sont beaucoup plus difficiles à voir car ils sont souvent positionnés à l’insertion des feuilles ou au pied des plantules. Dans des conditions de visite non favorables, l’absence d’observation de puceron ne signifie pas qu’il n’y en a pas ! Il faudra revenir sur les parcelles à des créneaux plus propices à l’observation.

Il est recommandé d’intervenir dès lors que 10 % des plantes sont porteuses de pucerons ou quand la présence de puceron(s) est observée dans la parcelle pendant plus de 10 jours.

Bien positionner la protection face à un risque couvrant une longue période

Les insecticides disponibles ont une action par contact, ils sont donc à positionner quand les pucerons sont présents sur les plantes.
Le déclenchement de l’insecticide ne dépend pas de l’opportunité de réaliser un mélange avec un traitement herbicide (dont les conditions d’efficacités optimales seront différentes par rapport à la lutte contre les pucerons).
Les résultats d’essais réalisés par Arvalis mettent en évidence une relative souplesse dans la date d’application de l’insecticide : il n’y a pas de perte de rendement lorsque l’application est réalisée jusqu’à 14 jours après la date conseillée. Mieux, retarder l’application de 14 jours a été bénéfique dans trois essais sur 13. En effet, lorsque l’application est réalisée alors que des pucerons ailés continuent d’arriver sur la parcelle et que les conditions sont favorables à une croissance rapide des plantes, l’efficacité de l’insecticide est diminuée faute de persistance d’action sur les arrivées de pucerons postérieures à l’application.
Dans la plupart des situations, une seule application insecticide est suffisante, en particulier dans notre région.

Insecticides : un choix restreint à des produits encore efficaces

En cas de présence de pucerons, et s’il ne s’agit pas d’une variété d’orge tolérante à la JNO, le dernier recours est de réaliser une lutte insecticide en végétation grâce à l’application d’un produit comportant une substance active de la famille des pyréthrinoïdes.
L’absence d’alternative aux produits comportant une pyréthrinoïdes est favorable à l’apparition de résistance. Une population de Sitobion avenae présentant une résistance à des substances actives de cette famille a déjà été mise en évidence au Royaume-Uni, en Allemagne et en Irlande. La présence de populations de pucerons vecteurs de la JNO et résistants à des pyréthrinoïdes n’a pas été mise en évidence en France à ce jour mais le risque doit être pris en considération.
Par mesure de précaution, et à défaut de pouvoir diversifier les familles chimiques, il est conseillé de diversifier autant que possible les spécialités en fonction de la sous-famille des pyréthrinoïdes à laquelle la substance appartient (figure 4). L’esfenvalérate appartient à la sous-famille des benzyl-carboxylates, le tau-fluvalinate appartient à celle des valinates alors que les autres pyréthrinoïdes appartiennent toutes à la même sous-famille des cyclopropane carboxylates.

Les produits à base de lambda-cyhalothrine (référence : Karaté Zéon) présentent régulièrement de très bonnes efficacités dans nos essais ce qui peut être en partie relié à une persistance d’action plus soutenue de cette substance active. Dans des conditions optimales d’application, la différence d’efficacité entre substances actives de la famille des pyréthrinoïdes (lambda-cyhalothrine, cyperméthrine, tau-fluvalinate, esfenvalerate…) est le plus souvent marginale (figure 5).

Luc Pelcé et Diane Chavassieux - Arvalis Institut du Végétal

JNO