Le taureau
Note de lecture, le taureau, une histoire culturelle

Cédric MICHELIN
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« Le taureau a peut-être été le premier dieu », écrit Michel Pastoureau dans son dernier ouvrage intitulé : Le taureau une histoire culturelle

Note de lecture, le taureau, une histoire culturelle

Il est vrai que l’animal trône en bonne place dans l’art pariétal, la plus connue des représentations étant sans doute celle de Lascaux. Cette grotte a d’ailleurs sa « salle des taureaux » dans laquelle ont été dessinés, au charbon, il y a près de 20.000 ans pas moins de cinq imposants aurochs. Offert en sacrifice sous de nombreuses latitudes, vénéré en Égypte sous les traits du dieu Apis, le taureau auquel sont associés la vache et le bœuf, fait l’objet de nombreux récits mythologiques dans l’Iliade et l’Odyssée (Homère), dans l’Enéide (Virgile) ou encore les Métamorphoses (Ovide). De Io, la prêtresse devenue génisse au Minotaure vaincu par Thésée, les récits grecs sont riches des aventures taurines. La religion catholique ne sera pas en reste sur la symbolique du taureau qu’elle va diaboliser, lui préférant la figure à la fois patiente, vertueuse, protectrice et docile du bœuf. On retrouve ce dernier au côté d’un des quatre évangélistes, Saint Luc, mais aussi dans la scène de la Nativité, à côté d’un autre animal domestique. « Cette présence souligne combien le Moyen Âge chrétien est attentif aux animaux », souligne l’auteur, directeur d'études à l'École pratique des hautes études et qui a rédigé sa thèse sur le bestiaire héraldique au Moyen Âge. L’histoire du taureau à travers les âges à laquelle nous invite Michel Pastoureau est une histoire culturelle, c’est-à-dire sociale, celle des « savoirs, des représentations collectives », se traduisant et se glissant dans la langue (« prendre le taureau par les cornes », « il est facile de parler du taureau quand on n’est pas dans l’arène » …), dans les arts (Bernard Buffet, Marc Chagall, Roy Lichtenstein…), la symbolique, la religion, les croyances, etc. Dans le chapitre consacré à « la vache dans nos campagnes », l’auteur, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, cherche à répondre à la question : que reste-t-il de la riche histoire symbolique du taureau dans nos sociétés contemporaines ? Oui que reste-t-il de cet animal « dont la queue est un fouet, le souffle un rappel de l’orage, les cornes une arme menaçante… ? ». Richement illustré, le livre de Michel Pastoureau nous embarque dans des terres méconnues. Ce spécialiste des animaux qui a notamment écrit sur l'ours (2007), le cochon (2009, puis 2015) et le loup (2018), tout en accumulant pendant cinquante ans une immense documentation sur le corbeau et bien d'autres animaux, complète ici sa palpitante enquête animalière. Un magnifique et passionnant ouvrage dont le lecteur a bien du mal à se détacher.  

Michel Pastoureau – Le taureau : une histoire culturelle – Éditions du Seuil – 160 pages – 19,90 euros