A l’heure de la reconquête
consommation française de viande de poulet, les éleveurs français de
volailles entendent relever le challenge et se mobiliser pour
reconquérir des parts de marché.
Double objectif en réalité : le marché intérieur où la volaille française ne cesse de perdre du terrain depuis une quinzaine d’années maintenant, et le marché export où les volumes sont en chute libre depuis la fin des restitutions l’année dernière.
Il y a urgence : la production française de volailles a reculé de 20 % depuis 1998. Et les importations représentent désormais 40 % des poulets que les Français consomment chaque année. « C’est un véritable paradoxe », observait Jean-Michel Schaeffer, éleveur de volaille d’Alsace, rappelant que « la demande mondiale explose, à tel point qu’en 2020, la volaille sera la viande la plus consommée dans le monde. En France aussi, la consommation progresse légèrement chaque année. Mais nous, les Français, on n’en profite pas ! »
Edifiant !
Depuis 2007, la France est déficitaire net dans ses échanges avec ses voisins européens. Les Allemands, les Néerlandais et même les Belges grignotent des parts du marché français !
L’exemple belge est édifiant : durant les quinze dernières années, au moment même où l’aviculture française reculait nettement, les Belges ont, eux, augmenté leur production, leurs exportations et doublé la taille de leurs élevages, sans que cela pose de problème ni avec les pouvoirs publics, ni avec les mouvements écologistes… Patrick Van DenAvenne, opérateur flamand de volaille, a expliqué que la taille moyenne des exploitations était ainsi passée de 30.000 à 60.000 volailles en Belgique. Grace à un dialogue et des engagements de bonnes pratiques (diminution des antibiotiques, meilleure gestion des fientes…) avec plusieurs associations écologistes.
« Vous m’avez sidéré ! », confiait en aparté Xavier Beulin, le président de la FNSEA, au représentant de la filière belge…
Comment en sortir ?
« Notre accord avec Sofiprotéol, c’est une façon de réattaquer le marché français », indiquait Denis Lambert, le PDG de LDC, le leader du marché hexagonal. « Ce n’est pas en grande surface que nous avons le plus de retard, ce sont sur les produits industriels, type nuggets, les produits transformés qui souffrent le plus de la concurrence ».
Le 16 octobre, LDC venait d’annoncer l’échange de six sites industriels avec Glon Sanders, la filière animale de Sofiprotéol. Deux des nouveaux sites bretons de LDC sont spécialisés en produits industriels. Spécialisation des sites, automatisation… La restructuration des outils de transformation a commencé. Ce n’est pas Dominique Grasset, le président de Gastronome, filiale de Terrena et numéro deux du marché français de la volaille, qui allait dire le contraire. Eleveur dans l’Ouest, il appelle de ses vœux une refonte des contrats éleveurs/transformateurs. Prix, date de livraison, indice de qualité… Autant d’éléments qui faudrait intégrer au contrat selon Jean-Michel Schaeffer. « Attention à ne pas découvrir l’éleveur » tempérait Michel Prugue.
Pour améliorer leur compétitivité dégradée, les éleveurs demandent notamment l’assouplissement de la réglementation sur les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPN), pour pouvoir augmenter la taille de leur élevage.
Reste l’export. Doux ne perd plus d’argent. Une bonne nouvelle qui venait tout juste d’être annoncée par le groupe alors que son principal client, Al Munajem, entrait au capital du volailler à hauteur de 25 %. « Le marché export n’est pas une simple voie de dégagement des excédents », indiquait Xavier Beulin, pour qui « Al Munajem pourrait faire encore un effort et augmenter sa participation jusqu’à 30 ou 35 %, ce qui serait une bonne chose pour Doux ». Quant à Tilly Sabco, tout le monde attendait avec anxiété la fin de la liquidation judiciaire le 30 novembre. Depuis, on sait que le tribunal de commerce de Brest a retenu l’offre du britannique MS Foods, en association avec la Chambre de commerce de Morlaix et le fonds d’investissement Breizh Algae Invest (Olmix), permettant la sauvegarde de 200 emplois sur un total de plus de 320. Cette offre prévoit la création d'une société dont le capital serait détenu à parts égales entre les trois acteurs (1,5 million d'€ au total) autour du projet de produire du poulet, selon le rite halal ou non, frais, congelé et nourri aux algues.
Volaille de chair
La France, 14e pour la compétitivité
Selon les premiers résultats d'une étude commandée par FranceAgriMer au cabinet AND International, la France arrive à la 14e place (sur 21 pays suivis) dans un classement international de la compétitivité des secteurs volaille de chair. Au sein de l’Union européenne, elle se place certes devant l'Espagne, la Belgique et l'Italie, mais derrière les Pays-Bas, l'Allemagne et le Royaume-Uni. Au niveau international, le Brésil occupe la première place, suivi par la Thaïlande, l'Argentine et les Etats-Unis. Le classement pondère 31 critères, classés selon sept axes: « les coûts de production, les entreprises et les structures sectorielles, le potentiel de production, le portefeuille de marchés, la maîtrise des facteurs naturels, l'environnement institutionnel et les conditions macroéconomiques du pays ». La France apparaît ainsi clairement « handicapée par ses coûts de production et la faiblesse de sa balance commerciale », rapporte FranceAgriMer.
Depuis son assemblée générale, la Confédération française de l’aviculture (CFA) a procédé le 11 décembre à l’élection de Jean-Michel Schaeffer à sa présidence. Michel Prugue est vice-président chargé des relations interprofessionnelles et Isabelle Leballeur a été reconduite au poste de secrétaire générale.