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Installation

Accompagner après

A 32 ans, installé depuis 2002 et habitant Le Planois, David Cornier est
le président des Jeunes agriculteurs de Saône-et-Loire depuis mars
2013. Portrait pour découvrir les projets de sa mandature.
Par Publié par Cédric Michelin
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Avec recul, David Cornier ne se rêvait pas agriculteur. Mais le destin en a décidé autrement. En 1995, son père décède. Sa mère, Gisèle, préside la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire. David se retrouve alors propulsé aide familial. Là « ce fût une évidence pour moi de rester sur l’exploitation familiale », se souvient David. Le déclic est venu en nourrissant le bétail. Adieu les études de cuisine donc, qui ne lui manquent pas.
Place à une nouvelle vie débouchant sur l’obtention du Bepa à Fontaines en 1996. Avec son BPREA en poche en 1999, passé à Saint-Germain, il s’installera finalement en 2002 sur l’exploitation familiale. « Hormis mon stage de six mois, je n’ai jamais travaillé ailleurs. Ce ne m’aurait pas fait de mal certainement mais je ne ressens pas de manque », rigole-t-il. Car, ce qui caractérise David, c’est son tempérament fonceur avec une volonté farouche de profiter de la vie telle qu’elle est, sans regret. Mais David n’est pas un rêveur pour autant. Il a les pieds bien sur terre. Une de ses premières décisions à la tête de la ferme fut d’arrêter le lait en 2007 en raison de bâtiments sous dimensionnés qui aurait nécessité de lourds investissements. Il préféra se concentrer sur ses 105 hectares (35 ha de maïs, 30 ha de blé et une quinzaine en colza). Le reste sont des prés pour faire pâturer ses 45 salers et croisées charolais. Les vêlages se font aux prés vers octobre novembre. Il vend ses broutards, en maigre à neuf mois, début juin à Charolais Horizon et rachète pour renouveler. Une partie de son maïs est également livré à Interval. Quand on lui parle de faire de la vente directe, David est franc : « Je n’aime pas raconter des histoires. Je n’ai pas la fibre commerciale », avoue-t-il. Idem pour le matériel mécanique, « un mal nécessaire » selon lui. « J’aime le confort (barre de guidage) mais je ne vais pas le payer plus qu’il ne le faut », prévient-il, pragmatique. David travaille donc avec du matériel de Cuma, « performant et qui limite les coûts ». Sur un hangar neuf, depuis 20 mois, des panneaux photovoltaïques financent un nouveau bâtiment (300 m2) et « laissent une petite bricole », sourit David.

Bières et actualités



Ayant arrêté tôt l’école, David « ne voyait pas grand monde ». Il adhère alors au Jeunes agriculteurs de Saône-et-Loire en 1998. L’occasion « d’aller boire une bière », confie-t-il mais aussi d'aller parler du métier tout en écoutant les actualités JA « sans tout comprendre au départ ». Puis en 2001, le syndicat de Louhans est l’organisateur de la Fête de l’agriculture à Branges. Une réussite. Nouveau déclic. Nouvel engagement. Il devient président de canton en 2004, administrateur en 2006 et président depuis mars 2013. « Je suis parti pour un an avec la volonté de continuer le travail engagé, avec la même équipe ». Et le travail ne manque pas.

Accompagner après l’installation



Pour cela, David sait aussi déléguer. « On voudrait voir les thèmes qui sont sortis de "L’Avenir en Confiance" (réflexions pilotées par la chambre d'agriculture avec les OPA du département, NDLR) se concrétiser ». Et de citer pêle-mêle : la nécessité d’avoir une vision sur le foncier (dossier suivi par Samuel Maillard), développer les échanges inter-filières tels que les échanges paille/fumier, suivre les jeunes installés (dossier suivi par Ludovic Cottenceau) collectivement et individuellement… Sur ce dernier point, le président veut « accompagner, rassurer et conseiller » les jeunes « largués et seuls dans la nature » parfois après.

Du local au national



Evidemment, les jeunes suivent les dossiers nationaux : « on doit faire reconnaître nos zones intermédiaires, extensives. Nous n’avons pas les meilleures terres céréalières en Bourgogne et la surprime des 50 premiers hectares dans la Pac nous soucie. Quid de la transparence derrière si il s’agit d’une exploitation avec un ou plusieurs exploitants », interroge-t-il. Tous les JA suivent. Jérémy Decerle fait office de porte-parole au national. « Il faudra également se battre pour le maintien de la PMTVA, les aides à l’herbe, pour garder de la souplesse en matière de gestion des exploitations (retournement des prairies) »… enchaine David Cornier.

Financer l’installation autrement ?



Mais c’est sur l’installation qu’il s’arrête le plus longuement. « Nous sommes remontés au dessus de la barre des 100 installations en Saône-et-Loire, majoritairement en bovin viande, lait, viticulture. Avec le Plan de professionnalisation personnalisé (PPP), nous sommes organisés avec les services de la chambre. Comme il est ressorti de notre dernière AG, la filière doit aussi s’impliquer dans le financement et le cautionnement des installations. Les prêts JA ne suffisent plus ! Mais sous quelles formes ? 300 accueils sont réalisés au Point info installation. Les entretiens sont alors poussés pour bien orienter vers les personnes ressources. Le PDE, plan de développement de l’exploitation, donne une vision en terme de gestion à moyen terme. Car il y a des rêveurs et des jeunes avec de vrais projets qui viennent. Pour avoir plus d’installations et ainsi éviter de perdre des actifs dans la globalité, il faudrait plus d’hors cadres familiaux ».

Une vision longue



Et d’insister sur l’importance de communiquer et d’accompagner. « Aujourd’hui, un jeune n’a plus de visibilité en raison des marchés instables. Il faut donc une bonne vision de son exploitation qui doit rester réactive malgré les emprunts ». Dur donc. « On ne connaît pas la solution ». Les Jeunes veulent donc parler emplois aux politiques en ces temps de crise. La Fête de l’agriculture qui se déroulera le week-end du 31 août près de Chalon-sur-Saône veut donc « aller chercher le public urbain, amené une ambiance, parler aux gens… ». Une opération séduction en quelque sorte…




Retraités : un loupé générationnel !



Futur papa, David Cornier évoque la vivabilité et qualité de vie recherchées par les jeunes agriculteurs, lui qui est en couple avec Virginie, travaillant à Blanzy. Pour un chef d’exploitation, la première des solutions est celle collective, comme lui en Cuma ou l’entraide entre voisins ou encore la copropriété de matériels. David Cornier fait également appel au service de remplacement, deux jours par semaine. Sa mère, qui a pris sa retraite en 2009, continue de l’aider un peu.
« L’idée est d’être autonome. Un coup de main, pourquoi pas mais il ne faut pas dépendre d’un retraité. Beaucoup d’exploitations, n'ont pas géré le départ en retraite d’un père qui continue de travailler comme s’il avait 30 ans. Cela explique aussi un certain déficit d’installations ». Mais cela a aussi des conséquences plus larges : « du coup, les coûts de production sont biaisés. Les jeunes investissent plutôt que de se verser un revenu et les retraités profiter de leurs retraites. C’est un loupé générationnel ».