Le Charolais Label Rouge doit s’adapter aux nouveaux modes de consommation
L’association Charolais Label Rouge n’échappe pas à la crise qui frappe les filières de qualité. Elle vient de connaître deux années de baisse consécutive, mais maintient ses efforts pour préserver son capital auprès des consommateurs et des distributeurs.
Les filières de qualité souffrent d’un contexte défavorable. Le covid a laissé des traces et l’inflation a cassé une belle dynamique. Aujourd’hui, la décapitalisation fait flamber les prix des animaux standards. Ce retournement n’encourage pas les éleveurs à produire de la qualité. Et leur nombre s’érode en même temps que les abattages à l’échelle nationale tandis que la consommation diminue elle aussi.
Les labels rouges sont à la peine et l’association Charolais Label Rouge n’y échappe pas. En 2024, le volume de bovins labellisés a baissé pour la seconde année consécutive de — 6 %. Cela laisse tout de même un volume conséquent de 15.000 bovins labellisés, deux fois plus qu’en 2016-2017. 2.230 éleveurs ont livré des bovins label rouge en 2024.
GMS, haché, restauration hors domicile…
Depuis 2006, la part des GMS a pris de l’ampleur dans les points de vente, mais le nombre total est en baisse depuis deux ans et la disparition de l’enseigne Casino a pesé sur ce chiffre. La part de VPH (viandes pour haché) atteint désormais 35 % du volume. Le Charolais Label Rouge fonde ses espoirs sur la Restauration Hors domicile (RHD) que devaient encourager les lois EGAlim et Climat. « Mais cela peine à se mettre en place », regrettait Emmanuel Pilorge, vice-président de l’association.
En 2025, une progression est en vue sur les produits élaborés, signalait la directrice Marjorie Marty. De nouvelles dispositions autoriseraient l’intégration de viande bovine label rouge dans des brochettes, viandes marinées et autres rôtis… Ces nouveaux produits seraient toutefois exclus pour le moment d’un approvisionnement dit « durable »…
Consommateurs de plus en plus exigeants
Parlant au nom des abatteurs, Olivier Jame, directeur de Bigard Cuiseaux et vice-président de l’ACLR, évoquait les mutations de la filière. Ainsi, « on tue désormais des labels rouges pour des avants », témoignait-il. « Le consommateur veut du prêt à déguster tout élaboré et les industriels ont dû s’adapter à la montée du haché. Aujourd’hui, la difficulté, c’est de trouver sa place. Jusqu’alors, le haché, c’était le prix d’appel. Il faut revoir ce prix, se placer… », complétait Olivier Jame qui incitait à poursuivre la promotion du produit face à « des clients distributeurs moins professionnels et des consommateurs de plus en plus exigeants ».
Incertitudes en agneaux
En « label Tendre Agneau », la production est en baisse depuis 4-5 ans et est passée de plus de 10.000 à 5.200 animaux en 2024. Le nombre d’éleveurs habilités n’a pas beaucoup baissé (392) mais la motivation reste difficile sur le terrain avec un différentiel de prix très faible avec l’agneau standard. La FCO a lourdement impacté le cheptel en 2024 ce qui fait peser beaucoup d’incertitudes sur la production à venir. Une autre difficulté est le manque d’agneaux en fin d’année et début d’année suivante. À cela s’ajoute le fait que l’agneau est une viande plutôt chère et consommée par une clientèle âgée. Et le nombre de points de vente est en baisse.
Maintenir la présence auprès des points de vente
En toute logique, la baisse des volumes d’activité réduit les ressources de l’ACLR. Mais son niveau d’activité des années passées lui permet aujourd’hui de poursuivre les actions de communication habituelles. L’association va en particulier maintenir sa présence auprès des points de vente (animations, visuels, accompagnement à des concours…) et cibler les consommateurs (dégustations, salons…). Elle espère pouvoir compter sur une nouvelle « communication collective avec de gros moyens », à l’image de la future campagne nationale de l’INAO. « Il y a des signes qui ne trompent pas. Je suis convaincu que l’on doit poursuivre le chemin pour préserver ce véritable patrimoine, mais il faut être ouvert aux attentes de notre société. Nous avons su modifier nos cahiers des charges pour plus d’environnement, de bien-être animal, mais il faut être attentif et s’adapter aux nouveaux modes de consommation. Nous devons, au sein de nos instances nationales, gagner en réactivité pour éviter de regarder passer le train… », concluait le président de l’ACLR Didier Périchon.
Un manifeste pour alerter l’Etat
Face à la crise des filières de qualité, Fedelis, fédération nationale qui regroupe la plupart des signes de qualité, a rédigé un manifeste pour alerter l’État sur le manque de communication, de protection du label rouge face à la concurrence déloyale, et la mauvaise application de la loi EGAlim. Ce manifeste a été signé par des élus, des professionnels et des consommateurs. Malheureusement, « le nombre limité de signataires ne permet pas de pousser plus loin la démarche pour le moment », regrettait Didier Périchon.
Les opérateurs de la filière Charolais Label Rouge
Trois organisations de producteurs collectent 90 % des bovins Charolais Label Rouge : Sicarev Coop, Feder, Bovineo. Ces animaux proviennent à 60 % de Bourgogne-Franche-Comté et Auvergne Rhône-Alpes. Pays de Loire et Centre Val-de-Loire constituent le second bassin de production. Quatre opérateurs abattent 70 % des bovins : Tradival Migennes, Tradival Roanne, Bigard Castres, Bigard Cuiseaux.