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Minimum vieillesse

Aussi mini que le nombre de bénéficiaires

Sur les 1,7 million de retraités relevant du régime des non-salariés
agricoles, ils sont seulement 38.000 à disposer du minimum vieillesse et
donc à profiter, au 1er avril, de son augmentation de 4,7 %.
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Depuis sa mise en place, le minimum vieillesse peine à investir le monde agricole : seulement 38.000 personnes, parmi les 1,7 million de retraités non salariés agricoles, percevaient en 2011 ce mécanisme de subsidiarité. Autrement dit, « c'est très peu de personnes », concède Denis Nunez, directeur de la protection sociale à la caisse centrale de la MSA (CCMSA) qui pointe plusieurs raisons à cela.
D'abord, cette prestation est soumise à des conditions des ressources. « Or, d'après nos statistiques, le niveau moyen de retraite des non-salariés agricoles se situe au-dessus du plafond minimum vieillesse ». Qui plus est, bien souvent avancée comme un complément potentiel pour la femme d'agriculteur, championne de la petite retraite, cette condition de ressource dépend, pour celles en couple, du revenu du foyer. « Prenons l'exemple d'un exploitant agricole qui a eu une carrière complète. En fonction de son revenu, on peut imaginer qu'il ait une retraite d'environ 1.000 € par mois. Donc, lui est exclu du dispositif ». Depuis le 1er avril, le niveau du minimum vieillesse est de 777,14 € mensuels pour une personne seule (9.325,98 € par an) qui représente aussi le plafond d'éligibilité au dispositif.
« Ensuite, vous avez sa conjointe », poursuit le directeur général. « Imaginons qu'elle ait été durant sa carrière, conjointe, puis conjointe participante, puis conjointe collaboratrice, puis éventuellement - parce que plus jeune que lui - chef d'exploitation pendant quatre ou cinq ans. Elle peut arriver à une retraite de 400 € par mois. Si on ajoute à cela, les revenus de son mari (d'environ 1.000 € par mois) : on a pour le couple un revenu d'environ 1.400 € par mois. Le couple est donc exclu là aussi du dispositif ». Les revenus pour un couple ne doivent en effet pas excéder, depuis le 1er avril, 1.237,31 € par mois (14.479,10 € par an). Autrement dit, le minimum vieillesse est à un niveau très bas. Et ne pas y prétendre ne signifie pas pour autant percevoir une retraite convenable.

La crainte du recours sur succession


L'autre raison du peu de bénéficiaires dans le monde agricole est qu'une partie des sommes versées est susceptible d'être récupérée sur la succession du bénéficiaire : la législation prévoit un recours sur succession sur la partie de l'actif successoral net excédant un montant de 39.000 € (article D.815-6 et D.815-4 du code de la sécurité sociale). Une éventualité qui rend la demande souvent difficile : « Nous pensons en effet que la crainte de la récupération, au moment de la succession, motive certains retraités, éligibles au minimum vieillesse, à ne pas y souscrire ». Aussi, pour inciter ces retraités, les pouvoirs publics ont récemment assoupli la règle : jusqu'à présent, le patrimoine d’exploitation était pris en compte à 30 % de sa valeur, désormais le patrimoine d'exploitation et la maison d'habitation, en intégralité - à condition qu'elle soit dans le périmètre d'exploitation -, sont déductibles de la succession (article 92 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 et le décret du 26 décembre 2011).
Mais rien n'a pour autant bougé, constate Denis Nunez : « nous n'avons pas, depuis, ressenti des changements dans les demandes d'Allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa, ex-minimum vieillesse), même si nous devons attendre encore un peu de temps avant de nous prononcer, puisque cet assouplissement ne date que de la fin 2011 ». La MSA se fait néanmoins peu d'illusion, soulignant la persistance de la peur des retraités de voir leur succession, une fois décédés, ponctionnée d'un trop perçu, au détriment de leurs héritiers. Bref, la donne risque de ne pas varier de si tôt, même si les incitations se multiplient du côté de la MSA, des organisations syndicales, et même du conseiller technique de Nicolas Sarkozy pour l'agriculture qui, lors du congrès des anciens exploitants de la FNSEA, les 7 et 8 mars, a insisté sur le fait que le capital d'exploitation n'était plus recherché. « Difficile » d'ignorer aujourd'hui l'aide, soutient la MSA, mais « difficile » aussi de savoir quel retraité y ait réellement éligible et n'en fait pas la demande.
Rappelons que le seuil de pauvreté est de 954 € par mois pour une personne seule, soit 13,5 % de la population vivent en deçà de ce seuil et, parmi eux, nombre de retraités agricoles…