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Pierre Bertin

Avec Pierre Bertin, l’Autunois et la profession perdent un précurseur

Pierre Bertin s’est éteint à Autun le 20 avril à l’âge de 85 ans. Installé à Tavernay en 1960 avec son épouse Marie-Thérèse, Pierre fut une figure dévouée du monde agricole départemental : président d’USC, vice-président d’arrondissement, administrateur FDSEA, vice-président de la section des Anciens, membre de chambre… Mais l’éleveur morvandiau fut avant tout l’un des artisans du développement agricole de l’Autunois-Morvan.

Avec Pierre Bertin, l’Autunois et la profession perdent un précurseur

Dans les années soixante, ce territoire pauvre et loin de tout était un peu exclu du reste du département. « Plus personne ne voulait y aller. Tout était à faire », se souvient Jean-Paul Nicolet, ancien technicien envoyé dans l’Autunois au début des années 70. Avec une poignée d’agriculteurs du secteur, Pierre Bertin fut l’un des moteurs d’une formidable épopée. Dès 1963, le groupe fonda la Cuma de Sommant pour pouvoir accéder à un « matériel trop cher », se souvient Lazare Desmorieux, son complice depuis l’école chez les frères. Puis, avec l’aide de techniciens agricoles, ils eurent l’ambition visionnaire d’initier un développement qui dépasse le simple cadre agricole avec une dimension sociale, territoriale forte, se remémore Jean-Paul Nicolet. Naissait ainsi le très précurseur Cadaram, comité d’aménagement et de développement agricole et rural de l’Autunois-Morvan que présida Pierre Bertin.

C’est dans cette dynamique que les exploitations du secteur se sont remarquablement modernisées. L’Autunois se retrouvait ainsi parmi les pionniers des essais d’ensilages de maïs et d’herbe et, dès les années 80, certaines fermes se mirent alors à engraisser même les mâles, une pratique atypique en Saône-et-Loire. C’est encore en Autunois-Morvan qu’a vu le jour le projet de Cuma départementale de drainage, qui deviendra la Cuma Aster. Pierre Bertin en fut l’un des administrateurs fondateurs. Il fut aussi parmi les fondateurs de la Sica La Truelle et aussi à l’origine du Service de remplacement de l’Autunois, ce qui lui a valu de présider plus tard le CDSR, le Comité départemental des Services de remplacement. Un service qui a beaucoup aidé les agriculteurs du secteur, se remémore Lazare Desmorieux, et qui est aujourd’hui devenu l’un des plus important de Saône-et-Loire.

Parmi les nombreux projets auxquels s’est donné Pierre Bertin, l’Auberge de Sommant constitue sans doute le plus emblématique. La commune de Sommant se questionnait alors sur l’avenir de son ancienne école. Jean-Paul Nicolet suggérait de créer une auberge communale inspirée des fermes-auberges en plein essor dans d’autres départements. Plusieurs années ont été nécessaires pour faire aboutir le projet. Porté par la commune et par la détermination de son maire, Rémi Godillot, aidé en cela par les conseillers de la chambre d’Agriculture et soutenu par le Cadaram emmené par Pierre Bertin, le projet a suscité l’enthousiasme de toute la population. Les agriculteurs, à travers leur Cuma et la Sica La Truelle, ont beaucoup œuvré à la création de ce restaurant. Gérée par une Sica que Pierre Bertin a présidé en son temps, l’auberge ouvrait en 1977 et plus de quarante ans plus tard, elle connaît toujours le même succès.

Telle était la philosophie de Pierre Bertin. Un esprit collectif avant tout au service du territoire. Un esprit d’entraide, résolument coopératif qui perdure encore aujourd’hui dans l’Autunois-Morvan, constate Jean-Paul Nicolet. Bien que pionnier du développement local avant l’heure, précurseur en bien des domaines et leader naturel, Pierre Bertin faisait montre d’une étonnante humilité. A l’image d’ailleurs du petit groupe de copains agriculteurs dont il faisait partie (Jean Bernardin, Lazare Desmorieux, Maurice Robert...). Tous d’origine modeste, souvent partis de presque rien, mais résolument ouverts d’esprit, désireux d’aller de l’avant et toujours solidaires.

Avec son épouse Marie-Thérèse qui l’a toujours beaucoup épaulé à la ferme comme dans ses différentes responsabilités, Pierre Bertin a eu cinq enfants : Gilles, Michel, Geneviève, Sylvie et Florence. C’est son fils Michel qui a repris la ferme familiale avec son épouse Annick. Depuis peu, ils ont été rejoints par leur fille Marlène qui a créé un atelier caprin sur la ferme des Bois-Saint-Romain.