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Maladies du bois

Bilan négatif

À l’invitation de l’Union viticole de Saône-et-Loire, le spécialiste français des maladies du bois, Philippe Larignon de l’IFV a fait le point sur les recherches en la matière. Les viticulteurs du département avaient bien des questions sur le sujet, notamment sur les traitements potentiels. L’Esca et les autres maladies du bois de la vigne inquiètent et mettent à mal les marges brutes par hectare.
Par Publié par Cédric Michelin
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« Alors que nous nous étions équipés pour les traitements à l’arsénite de Soude, l’État a retiré ce produit efficace contre l’Esca. L’administration doit nous laisser un peu de répit sur ces maladies du bois qui ravagent nos vignobles français. Apprendre à faire confiance », expliquait en introduction le président de l’Union viticole de Saône-et-Loire, Robert Martin. Une confiance qui doit être accordée également aux chercheurs. Venu présenter l’état des recherches sur ce thème, ce n’est certainement pas Philippe Larignon de l’Institut français de la Vigne & du Vin (IFV) qui contredira le fait que les chercheurs français n’ont pour l'heure pas suffisamment de moyens financiers pour répondre immédiatement aux besoins sanitaires du terrain. Les résultats variant d’un secteur géographiques à l’autre et d'un cépage à l'autre.
Avec un petit accent nîmois, le chercheur présentait les trois principales maladies du vignoble : l'Esca, l'Eutypiose et le BDA (Black Dead Arm), pour maladie du bras mort. « Elles se caractérisent par des nécroses, associées à quelques champignons. Mais d’autres champignons peuvent intervenir », expliquait-il. Les recherches s’orientent donc pour agir soit sur les champignons, soit sur le plant de vigne.
Une voie de pénétration des champignons a d'ailleurs été identifiée, celle de la pénétration lors de la greffe-bouture. « Ces champignons peuvent se propager par les bois, lors de la stratification, à 28°C, par exemple via les pépinières ». L’objectif est donc d’obtenir du matériel sain au départ de la plantation. « Parmi les traitements testés, seul le traitement à l’eau chaude est satisfaisant », explique Philippe Larignon. Les viticulteurs et les pépiniéristes de Saône-et-Loire ont donc la chance de disposer d'un équipement à Davayé, à la chambre d’agriculture, effectuant ce traitement.

Recontamination


« Mais cela s’avère insuffisant car les analyses montrent une recontamination », pondère le spécialiste. Il faudrait donc connaître toutes les voies de pénétration. « Les champignons pénètrent par les plaies de tailles et à des périodes de l’année différentes, sauf pour ceux de l’Eutypiose qui contaminent les ceps toute l’année ». Les chercheurs cherchent donc à connaître précisément les cycles de vie de tous ces champignons. « Actuellement, aucun traitement n’est satisfaisant pour protéger les plaies de taille. L’application de produit est illusoire car dilué (par la pluie, ndlr) lors de période de contamination ». Les spores migrent ensuite profondément dans les plaies (2 cm). Une autre façon d’agir serait d’éradiquer les sources d’inoculum. Nouvelle déception : « aucun produit efficace n’est sur le marché et ce n’est pas avec Écophyto 2018 que cela va arriver », regrette Philippe Larignon. Il propose donc d’agir sur les pratiques culturales ou empêcher le développement du champignon dans les tissus ligneux. « L’introduction de produits dans le cep par injection n’a pas d’efficacité observée et il faut 10 minutes par cep. Impossible donc » à réaliser au niveau d’une exploitation toute entière. Des molécules ont été pulvérisées dans la région poitevine après les vendanges sur le feuillage pour qu’elles pénètrent le phloème et le xylème. Tous attendent les résultats car « après les vendanges serait la période idéale pour traiter » en matière de perception par le consommateur.

Négatif


La deuxième voie de recherche consiste à agir sur la plante directement. Le climat joue un rôle important dans l’expression des symptômes foliaires. L’influence du sol aussi. Ce dernier paramètre peut même accentuer les symptômes « quand les sols sont lourds en eau ». En ce qui concerne le BDA, le champignon responsable –produisant des toxines– est situé dans le cep et jamais dans les feuilles.
Une autre piste consisterait à renforcer les défenses "immunitaires" de la plante. Là aussi, il faut bien comprendre le végétal et ses réactions. Les SDN –stimulateurs de défense naturelle– « ne sont pas pour tout de suite. Les engrais foliaires n’ont pas d’efficacité démontrée non plus ».
Philippe Larignon l’admet et le regrette : le bilan des recherches est pour l'heure « négatif ». La complexité est grande. L’objectif reste pourtant toujours le même : « trouver des méthodes de lutte à moyen terme. Dans l’avenir, des solutions viendront peut-être d’hybrides interspécifiques ou des recherches sur la génomique fonctionnelle ». En attendant, les budgets consacrés au rebrochage pèsent lourd sur les exploitations viticoles ainsi que ceux consacrés par la filière à la recherche (3,7 millions d’euros), sans compter les pertes de production. Ni les inquiétudes sur le possible déclassement de certaines parcelles...

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