Comprendre ses sols est à la portée de tous les agriculteurs !
Ce printemps, le GIEE de l’Autunois a organisé deux visites de terrain consacrées à la compréhension des sols. L’objectif était de partager une méthode simple de diagnostic des sols. Un outil de décision indispensable avant toute intervention mécanisée.

Les 24 avril et 7 mai derniers, le GIEE de l’Autunois organisait deux demi-journées techniques de terrain consacrées aux sols. La première avait lieu à Dettey au Gaec des Grands Genêts et la seconde à Monthelon au Gaec Joly. La connaissance et la compréhension de ses sols font partie des axes de progrès que s’était donné le GIEE de l’Autunois. Une recherche qui s’inscrit dans une optique « d’optimiser et réduire ses coûts de fertilisation, de traitements phytosanitaires, d’améliorer ses rendements, de gérer l’hydromorphie… ».
Pour éclairer les échanges, les conseillers et pédologues à la chambre d’agriculture Lucas Dumas et Jean Blancheteau accompagnaient Sophie Mobillion, l’animatrice du GIEE. Rendez-vous était donné dans plusieurs parcelles d’adhérents du GIEE pour une discussion autour de profils de sol.
« Comprendre ses sols, tout le monde peut le faire ! », assuraient en cœur les intervenants de ces deux journées. Il est aujourd’hui très facile de se procurer des informations grâce à Internet. Il suffit pour cela d’aller sur “géoportail”, rubrique “agriculture”, “carte des sols”, pour visualiser une cartographie qui donne d’emblée une première idée du type de sol de son exploitation, montrait sur son ordinateur portable Jean Blancheteau. Des fiches techniques correspondant aux différents types de sols sont également disponibles à la chambre d’agriculture, complétait-il.
Voir ce qui se passe dans le sol avant d’agir
Mais la finalité de cet échange était surtout de présenter aux agriculteurs une méthodologie simple de diagnostic des sols qu’ils peuvent facilement s’approprier. Car lorsqu’un agriculteur est confronté à un problème agronomique, « regarder ce qui se passe dans le sol est le meilleur outil de décision », résumait Gabriel Joly, associé du Gaec du même nom. Ce coup d’œil à la santé du sol doit même précéder toute décision d’intervention mécanisée, ajoutait le jeune agriculteur qui a toujours une bêche sur son tracteur ou dans sa voiture. Sophie Mobillion validait ces propos en rappelant qu’avec des charges de mécanisation dépassant 40 % des coûts de production, un diagnostic préalable à toute intervention mécanisée est essentiel. Et sur cette étape décisive : « vous avez la main ! », encourageait-elle.
Profil de sol « 3 D » en un seul coup de dent !
Pour pouvoir observer rapidement ce qui se passe sous les pieds, il existe une méthode très simple pour réaliser un profil de sol. Il suffit d’un chargeur frontal muni de dents plates porte palettes. L’agriculteur enfonce ces deux dents dans le sol de la parcelle avant de les faire pivoter pour remonter un bloc de terre de forme pyramidale d’environ 45 cm de profondeur. Pour interpréter le profil obtenu, une méthodologie rapide est proposée sous la forme d’une fiche d’observation dite « méthode speed ».
La démarche repose sur une approche qui décrit le sol en deux horizons superposés : au-dessus, l’horizon de « responsabilité » (HR) qui correspond à la partie régulièrement modifiée par l’homme ; en dessous, l’horizon « naturel » là où l’homme n’a pas d’impact direct. Plus les deux horizons sont « proches » et homogènes et meilleur est le potentiel du sol. Dès qu’une limite apparaît au sein de l’horizon HR, c’est la signature d’une rupture de perméabilité pouvant altérer les transferts verticaux de l’eau, le passage des racines et des lombrics, expliquent Lucas Dumas et Jean Blancheteau. Plus cette limite est nette, plus la situation est préoccupante. Et si cette limite ne saute pas aux yeux, c’est que le problème n’est pas si grave, présentent les experts.
Circulation de l’eau, prospection des racines et de la faune
Ces derniers invitent aussi à tester la friabilité des mottes ou agrégats. Moins cette dernière est bonne, « plus cela signifie que le sol est compacté et qu’une intervention mécanique pourrait être nécessaire », expliquent-ils. Ce test sert à interpréter si l’eau circule bien ou mal, si les racines peuvent prospecter sans contrainte dans ce milieu, de même que la faune du sol… L’examen du profil porte également sur la couleur, les taches éventuelles et autres traits colorés, souvent synonymes d’excès d’eau et de phénomènes d’hydromorphie. La présence de racines et de galeries constitue un autre indicateur visuel, de même que la porosité de surface.
Devant chaque profil de sol observé, les participants ont ainsi été invités à décrire l’état de surface (présence de mousse, d’eau stagnante, de battance, de turricules de vers de terre…). Ils ont ensuite inspecté la planéité de cette surface (plane ou chaotique). Suivait l’examen de la friabilité (taille des éléments obtenus, forme des agrégats).
Semelle de labour, hydromorphie, pH…
À Monthelon, le groupe a eu à faire à des parcelles aux sols limono-sableux. L’une d’elle présentait un « petit problème de communication entre les deux horizons », témoignant d’un ancien labour dont la semelle limite le potentiel aujourd’hui, analysait Lucas Dumas. Dans des sols souvent hydromorphes, les intervenants ont explicité les phénomènes d’oxydo-réduction révélés par la présence de marbrures de fer oxydé. Une hydromorphie qui suffit souvent à elle seule à expliquer le manque de potentiel de certaines parcelles.
Les intervenants ont aussi évoqué le pH dont dépend pour beaucoup l’assimilation des nutriments. L’occasion d’insister sur la pertinence des analyses de sol : un « super indicateur pour piloter ! », argumentaient les deux experts. Quand on sait qu’il faut compter 300 ans pour produire 1 centimètre de sol, on comprend bien tout l’intérêt qu’il y a à préserver ce formidable capital !
Intercultures et semis direct sous couvert dans le Morvan !
Adhérent au GIEE de l’Autunois depuis sa création, le Gaec Joly fait évoluer son approche du sol depuis plusieurs années. Cette exploitation de Monthelon s’est lancée dans le semis de maïs au strip-till dès 2017. Elle a aussi adopté le semis-direct. Ces méthodes inhabituelles en zone d’élevage, génèrent gain de temps et économie en mécanisation, constatent les associés. Plutôt que la mécanisation systématique et conventionnelle, le Gaec préfère faire confiance aux capacités structurantes des couverts. Cette année, Gabriel va implanter pour la première fois une interculture courte entre une céréale d’hiver et un blé ancien. Le mélange sera composé de niger, de phacélie, de moutarde d’Abyssinie, de radis chinois, de trèfle d’Alexandrie. L’implantation du blé suivant se fera en direct dans ce couvert encore vivant, confie le jeune agriculteur.
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