Louis Latour
Constantin converti par nos vins ?
Le 2 octobre à Beaune, Louis Latour tenait une conférence présentant
les principaux enseignements de son livre sur l’œnologie historique. Ce
viniculteur-éleveur –qui a présidé pendant un quart de siècle aux
destinées de la maison de négoce familiale du même nom à Beaune–
abordait l’histoire « générale » des vins fins de Bourgogne. Diplômé de Science Po, il distillait même sa thèse sur la « Grande histoire », décelant autour du voyage (311 après JC) de l’empereur Constantin à Augustodunum (Autun) les prémices de la conversion de l’empire Romain au Christianisme ! Rien de moins…
les principaux enseignements de son livre sur l’œnologie historique. Ce
viniculteur-éleveur –qui a présidé pendant un quart de siècle aux
destinées de la maison de négoce familiale du même nom à Beaune–
abordait l’histoire « générale » des vins fins de Bourgogne. Diplômé de Science Po, il distillait même sa thèse sur la « Grande histoire », décelant autour du voyage (311 après JC) de l’empereur Constantin à Augustodunum (Autun) les prémices de la conversion de l’empire Romain au Christianisme ! Rien de moins…
Plus qu’une « synthèse », Louis Latour reformulait son essai de 800 pages sur « Le Parcours de la qualité des vins de Bourgogne du Ier siècle au XIXe siècle ».
Débutant son propos par la description des vins romains au Ier siècle qui fermentaient dans des amphores –dolia– hermétiques, il rappelait que ces dolium ne permettaient pas de vinifications « faciles ». En effet, les Romains ne pouvaient les nettoyer facilement pour éliminer les germes. « D’ailleurs, ils ne voulaient pas ! Car les Grands crus de la Grèce antique sont alors sucrés, avec une teneur en sucre qui les fait ressembler aux châteaux Yquem (Bordeaux, ndlr) de notre époque », rappelle-t-il en mentionnant les travaux d’Olivier de Serres. Pour maintenir ce "principe sucré", une vinification « particulière » d’une « extrême précision » est inventée par les agronomes latins. Ainsi le defrutum –condiment à base de moût de raisin réduit utilisé par les cuisiniers de la Rome antique– est réintroduit dans les dolium, avec notamment du sel de la mer méditerranée et d’autres produits « pittoresques » qui servaient alors de "stabilisateurs" pour empêcher le vin de fermenter complètement.
En ce début du premier millénaire de notre civilisation, la consommation romaine est alors conséquente. Mais ces vins sucrés sont principalement importés d’Italie. Car, aucun de ces produits n’est largement disponible dans la Gaule du nord où alors « affreusement chers » rendant « inenvisageable » de faire des vins Romains "sucrés" dans notre région septentrionale.
Du tonneau nait le vignoble septentrional
Pour Louis Latour, l’explication de l’essor du vignoble bourguignon se trouve dans un instrument : le tonneau de bois, utilisé auparavant pour la bière ou le transport d’autres boissons.
La vinification pris un « détour définitivement différent » pour permettre la création de vins naturels, « grosso modo ce que nous faisons avec nos raisins blancs sans substances étrangères pour le stabiliser ou le sucrer », se plait à imaginer Louis Latour. [WEB]Car, pour lui, « il est tout a fait faux de croire que nous avons fait de tels progrès depuis. Leurs résultats devaient être proches, avec des cépages fins et des raisins bien mûrs ».[/WEB]
Cette (r)évolution en passant à une vinification en tonneau a provoqué un « choc considérable » en permettant l’hygiène des parois, rincées par les deux ouvertures, ou encore en terme de transport. Pour lui, ce sont donc bien « les Gaulois qui ont renouvelé l’œnologique antique ». « La vinification romaine s’est fracassée contre cette habitude nouvelle de consommation des pays du Nord-Est de la Gaule », défend Louis Latour. La « cohabitation » des deux types de vins va même durer quatre siècles, tant les Romains étaient habitués aux vins sucrés. A cette époque, le vin de Bourgogne –fin et naturel– a pris le « tropisme septentrional » en étant exporté vers le Nord mais jamais à Rome. [WEB]Les réfractaires aux changements de goût nombreux. Le rhéteur gallo-romain du IIIe siècle, né vers 260 à Autun, Eumène ira jusqu’à écrire que « le vignoble ne mérite plus l’envie qu’on lui portait à cause des invasions barbares ».[/WEB]
Tropisme septentrional
Dans une période agitée et souhaitant "rassurer" la Gaule, l’empereur Constantin entrepris un voyage à Augustodunum (Autun) en passant par Beaune.
Le cortège impérial aurait alors découvert « ce bon vin » de Bourgogne en 312 après Jésus-Christ et conduit à répandre le vin vermeil en vin de messe dans tout l’Empire Romain, ayant adopté officiellement la religion chrétienne.
Le vin de Beaune convertit l’Empire
Les cépages utilisés étaient natifs
Certes, les agronomes latins savaient qu’il valait mieux « accrocher des cépages fins dans les côtes et non dans les plaines ». Au vu des connaissances, sans connaître son berceau exact, le pinot noir figure parmi ces cépages fins primitifs « très sucrés, à 12°, permettant une vinification élémentaire pour extraire le jus par piétinement du fouleur ».
La sélection des cépages fins
Au XIIe s., intervient un changement de couleur des vins puisque les jus n’étaient pas colorés puisque il n’y avait pas macération des peaux. Des bâtiments, en dur, meublés, avec pressoirs sont alors mis en place requérant une ingénierie complexe. Jusqu’alors, les vendanges étaient échelonnées puisque dans une parcelle où des dizaines de cépages poussaient.
Louis Latour voit là les prémices à la sélection des cépages fins. « Les Duc de Bourgogne ont du vouloir du vin rouge aux couleurs du sang du Christ », affirme l’ancien négociant. A proximité de ces vastes cuveries, des vignes homogènes sont créées en sélectionnant le pinot noir. « La vinification de vins rouges, c’est en Bourgogne qu’elle a été inventée ». Ce vin vermeil « triomphe » car « c’est un produit nouveau ».
Le "monopole bourguignon" ne tint pas au XVIIIe s., avec les vins gris, champagnisés plus tard à partir de vin rouge. L’avènement des vins forts, à forte longévité (Porto, Madère…) menaçant de dominer le marché oblige la Bourgogne, comme Bordeaux plus prompt, à faire des vins « solides » et non plus vermeil clair.
Débutant son propos par la description des vins romains au Ier siècle qui fermentaient dans des amphores –dolia– hermétiques, il rappelait que ces dolium ne permettaient pas de vinifications « faciles ». En effet, les Romains ne pouvaient les nettoyer facilement pour éliminer les germes. « D’ailleurs, ils ne voulaient pas ! Car les Grands crus de la Grèce antique sont alors sucrés, avec une teneur en sucre qui les fait ressembler aux châteaux Yquem (Bordeaux, ndlr) de notre époque », rappelle-t-il en mentionnant les travaux d’Olivier de Serres. Pour maintenir ce "principe sucré", une vinification « particulière » d’une « extrême précision » est inventée par les agronomes latins. Ainsi le defrutum –condiment à base de moût de raisin réduit utilisé par les cuisiniers de la Rome antique– est réintroduit dans les dolium, avec notamment du sel de la mer méditerranée et d’autres produits « pittoresques » qui servaient alors de "stabilisateurs" pour empêcher le vin de fermenter complètement.
En ce début du premier millénaire de notre civilisation, la consommation romaine est alors conséquente. Mais ces vins sucrés sont principalement importés d’Italie. Car, aucun de ces produits n’est largement disponible dans la Gaule du nord où alors « affreusement chers » rendant « inenvisageable » de faire des vins Romains "sucrés" dans notre région septentrionale.
Du tonneau nait le vignoble septentrional
Pour Louis Latour, l’explication de l’essor du vignoble bourguignon se trouve dans un instrument : le tonneau de bois, utilisé auparavant pour la bière ou le transport d’autres boissons.
La vinification pris un « détour définitivement différent » pour permettre la création de vins naturels, « grosso modo ce que nous faisons avec nos raisins blancs sans substances étrangères pour le stabiliser ou le sucrer », se plait à imaginer Louis Latour. [WEB]Car, pour lui, « il est tout a fait faux de croire que nous avons fait de tels progrès depuis. Leurs résultats devaient être proches, avec des cépages fins et des raisins bien mûrs ».[/WEB]
Cette (r)évolution en passant à une vinification en tonneau a provoqué un « choc considérable » en permettant l’hygiène des parois, rincées par les deux ouvertures, ou encore en terme de transport. Pour lui, ce sont donc bien « les Gaulois qui ont renouvelé l’œnologique antique ». « La vinification romaine s’est fracassée contre cette habitude nouvelle de consommation des pays du Nord-Est de la Gaule », défend Louis Latour. La « cohabitation » des deux types de vins va même durer quatre siècles, tant les Romains étaient habitués aux vins sucrés. A cette époque, le vin de Bourgogne –fin et naturel– a pris le « tropisme septentrional » en étant exporté vers le Nord mais jamais à Rome. [WEB]Les réfractaires aux changements de goût nombreux. Le rhéteur gallo-romain du IIIe siècle, né vers 260 à Autun, Eumène ira jusqu’à écrire que « le vignoble ne mérite plus l’envie qu’on lui portait à cause des invasions barbares ».[/WEB]
Tropisme septentrional
Dans une période agitée et souhaitant "rassurer" la Gaule, l’empereur Constantin entrepris un voyage à Augustodunum (Autun) en passant par Beaune.
Le cortège impérial aurait alors découvert « ce bon vin » de Bourgogne en 312 après Jésus-Christ et conduit à répandre le vin vermeil en vin de messe dans tout l’Empire Romain, ayant adopté officiellement la religion chrétienne.
Le vin de Beaune convertit l’Empire
Ecrit en 312 après Jésus-Christ, le panagéryde d’Eumène, six mois seulement avant la conversion de l’empire à la religion chrétienne, n’est « pas un événement fortuit », pour Louis Latour. Menacé, l’Empire Romain manque alors de bons vins. En route pour Autun, le cortège impérial s’arrête quelques heures à Beaune. En revenant à Rome de ce voyage, Constantin crée la religion Chrétienne le lendemain. L’empereur refusait les sacrifices sanglants (religions païennes). Il aurait eu l’idée, en voyant les vins vermeils –couleur sang– fabriqués à Beaune, d’assurer « la fourniture d’un vin de qualité » au ministère de la messe, pour « convertir l’empire ».
Les cépages utilisés étaient natifs
Certes, les agronomes latins savaient qu’il valait mieux « accrocher des cépages fins dans les côtes et non dans les plaines ». Au vu des connaissances, sans connaître son berceau exact, le pinot noir figure parmi ces cépages fins primitifs « très sucrés, à 12°, permettant une vinification élémentaire pour extraire le jus par piétinement du fouleur ».
La sélection des cépages fins
Au XIIe s., intervient un changement de couleur des vins puisque les jus n’étaient pas colorés puisque il n’y avait pas macération des peaux. Des bâtiments, en dur, meublés, avec pressoirs sont alors mis en place requérant une ingénierie complexe. Jusqu’alors, les vendanges étaient échelonnées puisque dans une parcelle où des dizaines de cépages poussaient.
Louis Latour voit là les prémices à la sélection des cépages fins. « Les Duc de Bourgogne ont du vouloir du vin rouge aux couleurs du sang du Christ », affirme l’ancien négociant. A proximité de ces vastes cuveries, des vignes homogènes sont créées en sélectionnant le pinot noir. « La vinification de vins rouges, c’est en Bourgogne qu’elle a été inventée ». Ce vin vermeil « triomphe » car « c’est un produit nouveau ».
Le "monopole bourguignon" ne tint pas au XVIIIe s., avec les vins gris, champagnisés plus tard à partir de vin rouge. L’avènement des vins forts, à forte longévité (Porto, Madère…) menaçant de dominer le marché oblige la Bourgogne, comme Bordeaux plus prompt, à faire des vins « solides » et non plus vermeil clair.