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Charolais Horizon

Contractualiser davantage

Actionnaire du groupe Sicarev et forte de sa filiale export Deltagro, Charolais Horizon tire son épingle du jeu dans une conjoncture peu favorable. Conformément à sa stratégie de filière amont/aval, la coopérative encourage à planifier davantage les sorties et à contractualiser encore plus.
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En dépit d’un recul de production départemental de l’ordre de 5 %, la coopérative Charolais Horizon a bénéficié d’une activité stable sur l’année 2013 : 19.379 bovins maigres + 11.756 bovins gras. En bovin viande, la baisse des femelles commercialisées a pu être compensée par une hausse des jeunes bovins. Pour la seconde année consécutive, le groupement a gagné de nouvelles adhésions portant le nombre de ses adhérents à 436. Avec 295.455 € de résultat net et 50,3 millions de chiffre d’affaires, la coopérative réalise « un bon résultat dans le contexte actuel », commente Guy Fonteniaud, le président. D’autant que ce résultat, rappelle-t-il, « est amputé de toutes les plus-values Qualité, planification et contractualisation versées aux éleveurs pour un montant de 420.460 € ».
Pour le président, ces résultats donnent raison aux administrateurs du groupement qui avaient fait le choix « courageux » de réduire de 1,5 à 0,85 % les frais de fonctionnement facturés aux adhérents en restructurant les services administratifs.

Irrégularité en viande, incertitude en maigre


Au niveau du commerce de bovins, l’année 2013 a été marquée par une forte irrégularité des apports en viande. « Après un semestre où nous avons eu du mal à approvisionner les abattoirs, la situation s’est retournée au troisième trimestre où il a fallu gérer des stocks de plusieurs semaines », déplorait Guy Fonteniaud. Dans le maigre, la baisse de l’engraissement en Italie commence à se faire sentir. « Les clients solvables sont de moins en moins nombreux et l’engraissement se concentre sur des unités importantes. Ces clients exigent d’être approvisionnés toute l’année puisqu’ils ont eux-mêmes contractualisé leur production auprès d’abattoirs et souvent de la distribution », expliquait le président. Autre fait marquant de l’année 2013, 4.000 broutards ont été exportés vers l’Algérie fin décembre par Deltagro, la filiale export du groupe auquel appartient Charolais Horizon. S’il représente bel et bien une « alternative à un marché italien en régression », ce débouché - lorsqu’il s’agit « d’expédier des quantités aussi importantes en quelques jours, nécessite une logistique et des moyens humains importants et a un effet déstabilisant sur le marché des broutards les mois suivant », tempérait Guy Fonteniaud.

Sicarev et Deltagro se renforcent


Impossible de parler de Charolais Horizon sans évoquer le groupe Sicarev, dont le groupement est actionnaire avec quatre autres coopératives. Approvisionné à 60 % par les cinq groupements en question et à plus de 80 % par des coopératives, Sicarev continue de se développer tant en gros bovins qu’en porcs, veaux et maigre export. Pleinement opérationnel depuis un an, l’abattoir de Saint-Etienne est prêt à traiter 40.000 tonnes de viande par an. Cet outil est exploité avec la société Défi , propriétaire des magasins Grand Frais. Sicarev qui en est le gestionnaire majoritaire, y abat d’ores et déjà 750 gros bovins par semaine plus 1.300 veaux de boucherie. Quant à l’abattoir de Roanne, avec ses 27.000 tonnes de gros bovins abattus, il est aujourd’hui saturé et des investissements sont programmés.
Après avoir expédié 185.000 animaux en 2013, lesquels proviennent à 90 % des cinq coopératives du GIE dont fait partie Charolais Horizon, la filiale export Deltagro devrait atteindre les 200.000 têtes en 2014. Cela en fait le premier groupe d’export à l’échelle nationale et il représente un quart du marché, indiquait le directeur François Chaintron.

Aller plus loin dans la contractualisation


On le voit, Charolais Horizon continue de décliner une stratégie reposant sur un solide lien de filière entre amont et aval. Pour sécuriser et régulariser les approvisionnements de leurs outils d’abattage et prémunir les adhérents contre la volatilité des cours, les responsables du groupement promeuvent inlassablement une meilleure organisation de la production et une meilleure planification des sorties. A ce titre, la contractualisation est vivement encouragée. D’importants moyens sont consacrés à ce domaine, comme ce nouveau site internet, destiné à favoriser les engagements d’animaux et les différents contrats proposés avec prix garantis : « JB nouvel investisseur, jeunes génisses, mise en production de vaches pour les périodes de soudure ». Au niveau du GIE, la contractualisation qui a beaucoup progressé en 2013, concerne un tiers du volume d’animaux, indiquait François Chaintron. Convaincu « que la contractualisation doit être un engagement continu depuis la ferme jusqu’à l’étape ultime de la transformation » et aussi « qu’il faut revoir l’organisation économique de la filière bovine », le conseil d’administration de Charolais Horizon veut aller plus loin. « L’alimentation étant le principal poste de charge, nous devons créer des relations avec les productions végétales », expliquait Guy Fonteniaud. C’est dans cette optique que s’inscrit le partenariat signé l’an dernier avec la coopérative Bourgogne du Sud. Cet accord vise un développement de productions bovines contractualisées (veaux de boucherie, veaux sevrés, engraissement, repousse…) sur tout le secteur Est du département (lire encadré).


Partenariat avec Bourgogne du Sud
Une stratégie contractuelle pour peser


Dans le prolongement de son assemblée générale, le 5 juin dernier à Digoin, Charolais Horizon avait convié Didier Laurency, président de Bourgogne du Sud, et Philippe Dumas, président de Sicarev, à prendre part à un débat sur les stratégies et partenariats à mettre en œuvre pour dynamiser l’élevage bovin.
En introduction, le président de Charolais Horizon Guy Fonteniaud redisait la nécessité, pour le groupement, de s’associer avec une coopérative végétale. En cela, « Bourgogne du Sud est une coop dynamique qui défend les mêmes valeurs de transparence, création de filière, investissement dans l’aval. Elle est implantée dans une zone où il y a tout un potentiel et des plus values à apporter à travers la mise en place d’une organisation de filière », débutait Guy Fonteniaud. « Nous sommes à la recherche de valeur ajoutée », confirmait Didier Laurency. De fait, dans cette partie Est du département, certes dominée par les cultures mais diversifiée aussi dans la viticulture et l’élevage, la restructuration de la production laitière impacte les exploitations. Tandis que le lait se concentre sur de très grosses unités, l’agrandissement en grandes cultures s’avère hasardeuse voire vaine. En Bresse ou dans le Val de Saône, le salut des exploitations passerait davantage par un accroissement de la valeur ajoutée que des hectares. Et pour cela, la réintroduction d’activités animales offre une voie crédible, expliquait en somme Didier Laurency. L’idée n’est bien entendu pas de concurrencer le bassin allaitant. Il s’agit plutôt, pour ceux qui disposent de bâtiments existants, d’introduire de l’engraissement, de la repousse, une production de veaux de boucherie…

Une réponse à la crise de l’élevage


Pour le directeur de Charolais Horizon François Chaintron, ce partenariat est une réponse à la crise générale dont souffre l’élevage. « Face à la conjoncture, à la baisse des cours, à l’érosion du marché italien, il faut sans attendre que la filière se réforme. Travailler à la régularité des sorties ; trouver une solution pour les broutards ; abandonner la logique de cueillette... Il faut que le mode de relation change », défend François Chaintron qui promeut une contractualisation allant jusqu’à la grande distribution. Et pour atteindre cet objectif, « il faut y mettre des moyens, d’où l’appui de Bourgogne du Sud », concluait le directeur. La démarche permettrait à Sicarev de se positionner comme un leader régional incontournable qui pèserait face à la grande distribution.
« Mais dans cette démarche contractuelle, ne risque-t-il pas d’être compliqué de mettre tout le monde d’accord sur un prix qui satisfasse céréalier, éleveur, engraisseur, abatteur, distributeur ? », interrogeait un adhérent. D’autres éleveurs ne cachaient pas leur impatiente, pour ne pas dire leur agacement, en déplorant un prix de la vache inchangé depuis plus de 25 ans. Inquiétude difficile à dissiper, surtout lorsque le président de Sicarev reconnaissait lui-même qu’il y avait « un prix de marché dont on ne peut pas être déconnecté… ».
En réponse à ces inquiétudes, François Chaintron expliquait que les contrats proposés prennent en compte les coûts de production. De son côté, Didier Laurency évoquait le système « d’assurance sur un niveau de prix pratiqué chez les céréaliers et qui vise à se protéger des courants d’évolution des cours ». Il citait également la filiale Extrusel, « une structure pour les oléagineux, partagée entre producteurs et consommateurs »…

Faire pression sur les distributeurs


Au-delà du débat, une chose est sure, c’est que la production de viande bovine souffre d’un manque de rentabilité. Alors bien sûr, toutes les démarches qui concourent à mieux organiser la filière sont bonnes. « L’organiser, la contractualisation : j’y crois ! », synthétisait le président de la section bovine Christian Bajard. Fédérateur, le représentant de la FDSEA incitait à la mobilisation générale au-delà des sensibilités. « Les actions d’éleveurs en magasin sont importantes », expliquait le président de la section bovine. « Tout ce qui peut inciter à acheter de la viande bovine française est le bienvenu ». Le responsable encourageait les éleveurs à faire pression sur les grandes enseignes au quotidien. Tellement soucieux de faire les yeux doux aux consommateurs, les distributeurs et autres restaurateurs rapides ont plus que jamais besoin de se forger une bonne image. En cela, la profession est aujourd’hui en position de force pour agir. A condition qu’elle se mobilise.



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