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Secteur de la distribution

"Déconcentrer" la distribution

L'INRA l'affirme : c’est la concentration du marché de la distribution, notamment au niveau local, qui explique l’impact limité des réformes engagées ces dernières années par les pouvoirs publics, en particulier la réforme de la loi Galland*, pour relancer la concurrence dans le secteur de la distribution.
Par Publié par Cédric Michelin
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Le secteur de la distribution alimentaire en France a radicalement changé au cours des vingt dernières années. L’organisation et la concentration du secteur ont contribué à renforcer la puissance d’achat des principaux groupes de distribution. 85 % des points de vente de 200m2 à 1.200m2, souvent désignés à tort comme étant du « petit commerce » par opposition à la grande distribution, sont également affiliés ou appartiennent aux grands groupes de la distribution. La part de marché des six principales centrales d’achat n’a cessé de croître pour atteindre aujourd’hui plus de 70 %. La situation est similaire en Allemagne.
Pendant cette période, le secteur de la grande distribution a fait l’objet d’une accumulation de lois dont l’objectif était d’encadrer son développement (lois Royer et Raffarin) et de protéger ses petits concurrents et ses fournisseurs (loi Galland). Les effets inflationnistes de ces lois ont été dénoncés et une vague de réformes ont suivi (Dutreil en 2005, Chatel en 2008, LME 2009) pour tenter de les corriger, sans y parvenir complètement.

Les chercheurs ont analysé les différentes lois sur l’interdiction de la revente à perte, qui peuvent permettre aux fournisseurs d’imposer aux détaillants un prix plancher de vente au détail (loi Galland). Ils ont montré que ces lois, tout comme la fixation des prix de détail, suppriment la concurrence entre les détaillants, mais aussi freinent la concurrence en amont. La fixation d’un prix plancher "uniforme", qui résulte de l’interdiction de la revente à perte, a donc toujours un impact négatif sur le bien‐être social en " détruisant la concurrence entre de multiples producteurs et quelques distributeurs concentrés ", précise Claire Chambolle de l'Inra.
Si la loi Galland a été réformée grâce à la loi Chatel en 2008, la concentration du marché, héritage des lois Royer, Raffarin, explique l’impact limité des réformes.
Si la concentration de la distribution au niveau national est forte, mais pas inquiétante au regard de certains de nos voisins européens, les situations sont très contrastées au niveau local. Plusieurs études récentes attestent de la très forte concentration des distributeurs dans un grand nombre de zones de chalandises, notamment à Paris. Il est donc primordial de rétablir une véritable concurrence au niveau local.

* Loi sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales


Les drives vont devoir respecter la réglementation



La Confédération générale de l'alimentation en détail (CGAD) se félicite des mesures que Sylvia Pinel, ministre de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme, vient d’annoncer pour encadrer les drives. La Confédération demandait depuis deux ans que les drives soient soumis à la réglementation propre à l’urbanisme commercial.



La croissance fulgurante du nombre des drives - 2.200 à ce jour et bientôt 3.000 en France - est aussi due au vide juridique actuel sur les modalités d’implantation. La grande distribution s’est manifestement engouffrée dans cette brèche qui lui permet de contourner les règles de l’urbanisme commercial, analyse la CGAD. À l’annonce de cette décision de réglementer ces implantations, la grande distribution avance des arguments sur l’emploi ou sur la TASCOM (taxe sur les surfaces commerciales) pour le moins surprenants !



Si quelques emplois sont créés pour un drive, combien sont détruits ailleurs, demande la CGAD. L’impact économique et social doit malgré tout demeurer au cœur de la réflexion politique.



Quand au fait que la TASCOM fragiliserait les drives, quoi de plus normal pour une surface commerciale que de s’acquitter des taxes qui s’appliquent aux autres magasins ?


COMMUNIQUE DE PRESSE - Rungis, le 05 juin 2013

Le SEFAG demande aux députés de transcrire les recommandations de l’Autorité de la Concurrence relatives au secteur de la distribution alimentaire dans le projet de loi « Consommation ».

                                                                                
Le Syndicat de l’Epicerie Française et de l’Alimentation Générale (SEFAG) est particulièrement attentif au projet de loi « Consommation » présenté le 02 mai 2013. Suite à l’action du SEFAG, l’Autorité de la Concurrence s’est auto-saisie des restrictions de concurrence sur le marché de la distribution alimentaire, en rendant le 7 décembre 2010 un avis n°10-A-26 relatif aux contrats d’affiliation de magasins indépendants et aux modalités d’acquisition de foncier commercial dans le secteur de la distribution alimentaire. Dans cet avis, l’Autorité a montré le niveau excessivement élevé de concentration de certaines zones de chalandise, les barrières mises en œuvre par les groupes en place pour s’opposer à l’entrée sur le marché de nouvelles enseignes, ainsi que les dispositifs contractuels et capitalistiques visant à limiter la mobilité des magasins affiliés indépendants entre les réseaux concurrents (alors même que selon elle 60 à 75% des points de vente appartiennent à des entrepreneurs juridiquement indépendants). L’Autorité a montré que ces facteurs limitent très fortement la concurrence et dégradent la situation des consommateurs, notamment en matière tarifaire. Il est évident que si les commerçants indépendants affiliés du secteur pouvaient plus facilement changer d’enseigne et de groupe de distribution, ils seraient en situation d’obtenir de meilleures conditions d’approvisionnement, ce qui bénéficierait au consommateur final. L’Autorité de la Concurrence a émis dans cet avis plusieurs recommandations permettant de rétablir un équilibre dans la relation entre les commerçants affiliés et les groupes de distribution alimentaire. Notons que de récentes décisions de la Cour d’Appel de Paris et de la Cour de Cassation sont tout à fait en phase avec plusieurs de ces recommandations.
 
Le SEFAG regrette vivement l’absence des recommandations de l’Autorité de la Concurrence pour le secteur de la distribution alimentaire dans le récent projet de loi « Consommation ». Dans le contexte économique actuel particulièrement difficile, il apparait urgent d’avancer dans le sens d’une concurrence plus saine sur le secteur de la distribution alimentaire, qui profite au consommateur. C’est tout à fait possible en transcrivant dans la loi ces recommandations, dans le respect de l’esprit du projet de loi « Consommation », qui vise notamment à mettre en place « de nouvelles règles pour équilibrer les relations économiques et commerciales entre les entreprises », tout en luttant contre « la constitution de rentes abusives ». Le contrôle de la stricte application des dispositions du Code de Commerce par la DGCCRF ne permettra pas de supprimer les « verrous » contractuels et capitalistiques mis en œuvre par certains groupes pour limiter la mobilité de points de vente entre réseaux concurrents : légiférer sur la question est indispensable.
 
C’est pourquoi le SEFAG demande aux députés qui examineront le texte dans les prochaines semaines de se saisir de la question et d’amender le projet de loi « Consommation » initial en y intégrant les recommandations de l’Autorité de la Concurrence, ainsi que plusieurs propositions complémentaires.
 
Rappelons les recommandations de l’Autorité de la Concurrence concernant la distribution alimentaire
 
·         Supprimer les clauses de non-concurrence et droits de priorité dans les contrats de vente et d’acquisition de foncier commercial ;
·         Rendre obligatoire la conclusion d’un accord cadre unique complété, le cas échéant, de contrats d’application, afin de limiter le manque de transparence des conditions d’affiliation en raison notamment de la multiplicité des documents contractuels ;
·         Renforcer l’information précontractuelle fournie au candidat à l’affiliation, en communiquant le projet d’accord cadre unique le plus en amont possible des pourparlers ;
·         Limiter la durée des contrats d’affiliation à 5 ans ;
·         Harmoniser la durée et les modalités de résiliation de l’ensemble des contrats constitutifs d’une même relation ;
·         Interdire les droits de priorité au profit des groupes de distribution dans les contrats d’affiliation ;
·         Limiter les clauses de non-réaffiliation et non-concurrence post-contractuelles dans les contrats d’affiliation, les statuts des sociétés communes et/ou dans les pactes d’associés à une durée de un an et au magasin objet du contrat ;
·         Etaler le paiement des droits d’entrée en lieu et place de leur paiement différé ;
·         Encadrer les prises de participations des groupes de distribution au capital des sociétés d’exploitation de leurs magasins affiliés.
 
Le SEFAG suggère plusieurs ajustements à ces recommandations afin de lever les blocages à la mobilité des magasins indépendants entre réseaux de distribution alimentaires concurrents
 
·         Interdire les clauses compromissoires visant à soumettre obligatoirement à l’arbitrage les litiges. Le recours à l’arbitrage doit être un choix librement consenti et non une procédure imposée dans un contrat non négocié par la partie la plus puissante, comme c’est actuellement le cas ;
·         Interdire toute participation minoritaire du groupe de distribution lui conférant une minorité de blocage dans la société affiliée exploitant le fonds de commerce, pratique qui lui permet de verrouiller l’appartenance du fond à son réseau ;
·         Imposer une transparence réelle sur les redevances de toutes nature facturées aux affiliés (redevances de franchise, de fonctionnement ou publicitaires…), mais aussi une transparence réelle sur les remises obtenues par le franchiseur sur les industriels et sur les modalités de leur redistribution aux affiliés ;
·         Interdire toute clause de non-concurrence post-contractuelle et de non-réaffiliation : ces clauses n’ont d’autre objectif que de dissuader l’affilié de quitter le réseau tant il est vrai qu’un magasin du secteur de la distribution alimentaire ne peut être viable qu’en ayant la possibilité de se réaffilier à un autre groupe de distribution et d’adopter ainsi une nouvelle enseigne.