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Bovins allaitants bio

Des pistes pour optimiser la finition

En bio, faute de débouchés pour le maigre, les éleveurs allaitants ont plutôt intérêt à engraisser leurs animaux. Une finition qui doit être basée essentiellement sur des aliments produits sur la ferme, dans le respect du cahier des charges bio, mais aussi pour ne pas dépendre des aliments bio du commerce, nettement plus cher que le standard.
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Le 9 octobre dernier, la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire organisait un après-midi technique consacré à la finition des bovins allaitants en système bio. L’engraissement des animaux est presqu’un passage obligé pour les éleveurs de bovins viande bio. « Le maigre ne dégage pratiquement aucune plus-value dans cette filière », constatait Jean-François Ravault, responsable à la chambre d’agriculture et lui-même éleveur bio. Il n’existe quasiment aucun débouché pour les mâles maigres et avec la revalorisation des cours, les animaux bio arrivent à être mieux valorisés en filière standard. Ce problème de débouché pousse les éleveurs à engraisser mâles et femelles. Pour l’heure, les références techniques en termes de finition en système bio font encore un peu défaut. Conformément à l’esprit du cahier des charges bio, les aliments fermiers sont privilégiés. Une stratégie incontournable quand on sait que le prix du tourteau de soja bio peut atteindre 900 € la tonne !
Pour aider les éleveurs à « établir des rations performantes et économiques », la chambre d’agriculture a suivi trois exploitations bio l’hiver dernier, en partenariat avec la coopérative Feder (Global) et Bovins croissance 71. Objectif : observer leurs pratiques et mesurer les performances sur les lots d’animaux engraissés.

Trois exploitations suivies


L’étude a porté sur la finition en hiver de trois types d’animaux. En femelles : des génisses de 26 - 28 mois, 36 - 38 mois et des vaches de réforme. En mâles : des « barons bio ». Il s’agit de jeunes bovins abattus de 12 à 16 mois d’âge pour un poids de carcasse compris entre 280 et 330 kg. Plus jeune et moins lourd que le baby, le baron avait été tenté comme débouché pour les mâles bio. A Rigny-sur-Arroux, Josiane et Régis Bonnet (EARL des Sapins) se sont mis à en produire à titre expérimental, d’où la présence de ce type d’animal dans ces travaux. 15 barons ont ainsi été suivis durant l’hiver dernier lors d’une finition en stabulation paillée. « Entre le sevrage de début décembre et l’abattage d’avril à août, le lot a réalisé une très bonne croissance de 1.400 grammes. Les animaux ont très bien valorisé la ration, laquelle était particulièrement économe en concentrés : son coût revenant seulement à 2,20 - 2,40 € le kilo de gain de croit », synthétisait Fabien Deschizeaux, conseiller technique à la chambre.
L’EARL des Sapins avait également un lot d’une petite douzaine de génisses de 26 - 28 mois. Elles ont, elles aussi, été finies en bâtiments pour un abattage d’avril à juin. « La croissance a été régulière avec un GMQ conforme aux objectifs liés à la ration (environ 800 g). Celle-ci a été bien valorisée et elle s’avère, là encore, très économique : autour de 2 € le kilo de gain de croit », constate Fabien Deschizeaux.

Bien connaître ses valeurs alimentaires


Les résultats sont plus mitigés pour les génisses de 36 - 38 mois. Deux lots ont été suivis à l’EARL Baudot et au Gaec de Vernotte, l’exploitation des frères Ravault. Dans les deux cas, les animaux ont été finis en bâtiment et abattus de décembre à février. Le coût de la ration s’est avéré un peu élevé pour les deux lots (3 à 4 € le kilo de croit). Cette valeur proviendrait en partie d’un manque de fourrage lié à la sécheresse 2011. Autre constat partagé : le niveau de performance est un peu décevant. Pour expliquer cela, Fabien Deschizeaux fait remarquer qu’il s’agissait de génisses déjà en très bon état au départ. En conséquence, leurs besoins pourraient avoir été sous-estimés. Au Gaec de Vernotte, la ration comprenait des issues de céréales, un sous produit certes économique (220 €/tonne), mais dont l’inconvénient est d’avoir une valeur alimentaire méconnue. A noter que si les performances étaient plutôt moyennes, les rendements carcasses se sont en revanche avérés bons.
L’étude portait également sur un lot d’une dizaine de vaches à l’EARL Baudot. Les bêtes ont été finies en étable entravée et abattues entre février et avril. Là encore, les croissances réalisées se sont avérées décevantes : 800 g alors que 1.200 g auraient été permis par la ration, constate Fabien Deschizeaux. Parmi les explications possibles : la valeur des fourrages ou des concentrés mal évaluée ou alors des problèmes digestifs.

D’autres itinéraires possibles ?


Cette première année de suivi amène un certain nombre de réflexions, conclut Fabien Deschizeaux. Le premier enseignement des observations faites en ferme est qu’il faut absolument « connaitre la valeur des aliments distribués », insiste le technicien. Un soin particulier à la qualité des fourrages est évidemment incontournable pour optimiser les coûts de ration. Deux pistes complémentaires sont avancées : « réaliser ou commencer la finition des génisses de 36 mois au pré » et peut-être « augmenter la part de fourrages conservés dans la ration (herbe, maïs, dérobées ?) », suggère Fabien Deschizeaux.
Au regard des résultats contrastés obtenus sur les femelles (des performances correctes mais avec des coûts de ration quand même élevés), sans doute faut-il réfléchir à d’autres « itinéraires d’engraissement ». Les contraintes du cahier des charges bio (1) autorisent pas mal de possibilités, à commencer par l’ensilage de maïs ou d’herbe, signale le technicien. Parmi les pistes évoquées : la finition à base d’enrubannage, une technique qui a été expérimentée en système conventionnel à la ferme expérimentale de Jalogny (lire en page X). La finition à l’herbe pâturée est une autre voie sur laquelle la ferme de Jalogny s’est penchée et qui pourrait intéresser la filière bio. D’autres leviers pourraient être actionnés comme « augmenter la part des fourrages de haute qualité », tenter de nouvelles cultures comme les dérobées…, propose Fabien Deschizeaux

(1) La moitié de l’alimentation doit être produite sur l’exploitation. Au moins 60 % de la matière sèche doivent être constitués de fourrages grossiers, secs, frais ou ensilés. Un pourcentage qui peut être ramené à 50 % pendant trois mois maximum pour les animaux en finition.


Exploitations allaitantes bio
Troupeaux mixtes et légumineuses au menu


L’étude a porté sur trois exploitations allaitantes bio de Saône-et-Loire. A Saint-Romain-sous-Gourdon, Danièle et François Baudot exploitent 170 ha sur lesquels ils cultivent 18 ha de mélange céréales-pois et 10 ha de prairie temporaire. Le cheptel se compose d’environ 80 vaches charolaises et de 65 brebis. Les vêlages se font de janvier à avril. Commercialisée auprès de Feder, la production se compose de broutards repoussés (trois quarts des mâles), de bœufs de 30 mois finis au pré, de génisses grasses finies en bâtiments et de vaches finies au pré ou à l’intérieur.
La seconde exploitation est celle de Josiane et Régis Bonnet à Rigny-sur-Arroux. Eux exploitent 128 ha comprenant 21 ha de mélange céréales-pois, 7,5 ha de maïs ensilage et 38 ha de prairie temporaire. Le cheptel de 75 vaches côtoie un troupeau de 140 chèvres laitières. Les vêlages s’étalent de janvier à juin. Les animaux sont commercialisés auprès d’Unebio. Trois quarts de mâles charolais et croisés limousins partent en “barons”. Le reste donnant des taurillons maigres. Les génisses grasses de 2 ans et les vaches sont engraissées en bâtiments. La troisième exploitation est celle qui a servi de cadre à la réunion technique du 9 octobre à Saint-Pierre-de-Varennes. Dominique et Jean-François Ravault (Gaec de Vernotte) exploitent 165 ha sur lesquels ils cultivent 14 ha de céréales à paille ainsi que de la luzerne associée à du dactyle. Le troupeau charolais compte 90 vaches complétées par une troupe ovine de 120 brebis. Conduits en broutards repoussés, les mâles sont vendus en début d’hiver, les vêlages ayant lieu en hiver. Quant aux femelles, des génisses grasses de trois ans sont finies en bâtiments tandis que les vaches ont une finition au pâturage ou en bâtiment. Toute la production est commercialisée par l’intermédiaire de Feder.


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