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Bâtiments d’élevage

Des solutions pour limiter les frais

Avec la flambée du prix de l’acier et de la paille, la stabulation sur aire paillée type "cathédrale" est un peu remise en cause. Echaudés par les difficultés économiques, les éleveurs explorent diverses alternatives pour limiter les frais de bâtiments. Passage en revue de quelques pistes de réflexion.
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Initiés dans les années 1990, les plans de modernisation successifs ont fait sortir de terre de très nombreuses stabulations sur litière accumulée (aire paillée). De véritables "cathédrales", spacieuses, confortables et fonctionnelles, mais faisant appel à de grandes surfaces de toiture et de bardages, nécessitant des quantités de béton, des charpentes aciers et tubulaires. Face aux besoins énormes de l’époque, cette solution avait le mérite d’être simple et rapide pour abriter un maximum d’animaux. Durant près de quinze ans, la formule a beaucoup séduit, d’autant que le prix de la paille était constant à l’époque, aux alentours de 35 centimes de francs le kilo jusqu'avant 2003.

Le temps des cathédrales est révolu


Mais aujourd’hui, la donne a changé. Les prix des matières premières ont flambé. Matériau très répandu dans la construction des bâtiments d’élevage, l’acier a vu son tarif exploser, ce qui alourdit considérablement le coût des projets. Dans le même temps, la paille aussi a connu une flambée sans précédent. Or, aujourd’hui la Saône-et-Loire a besoin de trains entiers de paille pour ses stabulations. Une paille devenue très précieuse avec des débouchés nouveaux, comme l’énergie, qui font concurrence au débouché litière.
Alors qu’elles avaient l’avantage d’être moins onéreuses à l’achat qu’une formule avec raclage, caillebotis et récupération des effluents, les stabulations sur aires paillées se révèlent désormais très coûteuses. Elles le sont en fonctionnement avec leur grande consommation de paille. Elles le sont aussi en investissement avec des matériaux devenus très chers et des aides dont l’avenir semble incertain. A cela, il faut ajouter les difficultés économiques auxquelles sont confrontés les éleveurs avec un revenu qui ne décolle pas du fait d’une hausse des charges inédite.

Annuités et les coûts de fonctionnement


Ce nouveau contexte freine les projets et pousse à rechercher des solutions alternatives, plus économes. Il y a la paille, à laquelle on essaie de réduire sa dépendance. Il y a le prix des équipements, qu’on tente d’alléger par différents moyens. Si l’on intègre les coûts de production, le bâtiment le plus économe en paille à l'usage n’est pas forcément le moins cher à l’achat. Dans une étude datant de 2008, la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire avait démontré que c’était les bâtiments avec aires d’exercice non couvertes qui revenaient le moins cher, car ces systèmes nécessitent à la fois moins de charpente et moins de paille. Pourtant, cette formule ne séduit guère, car elle implique un investissement plus conséquent à la construction. Les financeurs accordent davantage d’importance aux annuités qu’aux coûts de fonctionnement, regrette un technicien.

Le raclage fait économiser de la paille


Pour abaisser la consommation de paille, le plus simple est de recourir à un curage régulier. Dans le département, certains éleveurs s’équipent de bâtiments dotés de pentes paillées avec couloir raclé et fumière couverte. L’investissement de départ est conséquent, mais les économies en coût de fonctionnement amortissent largement le surcoût. Selon les techniciens de la chambre d’agriculture, la plupart des stabulations existantes pourraient être aménagées en aires raclées. Il suffit pour cela de bétonner un couloir de trois mètres au pied de la stalle d’alimentation et de prévoir des fumières en conséquence. La transformation d’une aire totalement paillée en une stabulation dotée d’un racleur sur la moitié de sa surface permettrait d’économiser de 40 à 50 % de paille ! Seul bémol, la réglementation impose l’ajout d’un ouvrage de stockage du fumier (fumière bétonnée + fosse).

Et les logettes ?


Au chapitre des économies de paille, une étude est en cours sur la possibilité de réintroduire des logettes en élevage allaitant. Certains éleveurs en sont équipés dans le Massif central. Le principal frein aux logettes en élevage allaitant serait la gestion des vêlages, des veaux et de la reproduction. Se posent les questions de "comment agencer les boxes à veaux ?", "les risques liés à l’introduction du taureau"… Des références sur le sujet devraient voir le jour prochainement.

Constructions économes


Si l’anticipation des coûts de fonctionnement est une préoccupation, certains éleveurs ne veulent pas non plus se lancer dans des projets trop coûteux, ni trop figés dans le temps. D’autant que la lisibilité dans l’avenir s’est considérablement raccourcie avec une politique agricole changeante, une conjoncture économique volatile et un métier qui se transforme au rythme des évolutions de la société. Les tunnels illustrent cette tendance de bâtiments légers, démontables, réduits au strict minimum. Moins chers à l’achat, ils ont toutefois l’inconvénient de perdre en compétitivité du fait d’une grande consommation de paille. Gare aussi au confort de travail : mieux vaut parfois allonger une stabulation existante plutôt que de créer un tunnel loin du site d’exploitation, fait remarquer un technicien.
Sans aller jusqu’au tunnel, certaines astuces peuvent permettre d’optimiser le coût d’un bâtiment. Dans l’étude de la chambre de 2008, on redécouvrait des concepts qui paraissaient dépassés : bois rond, bâtiment avec un pan ouvert… Il y était également question d’un bâtiment "simplifié". Conçu un peu comme l’antithèse du bâtiment "cathédrale", cet ouvrage se résume à une aire paillée couverte avec un pan ouvert côté alimentation. Moins de bardage, moins de longueur de toit, moins de béton, moins de tubulaires, telles sont des sources d’économie.

Une part d’autoconstruction


Dans son étude de 2008, la chambre d’agriculture avait mis en évidence que la plus grande source d’économie dans un bâtiment restait l’autoconstruction. « Grosso modo, c’est 45 à 50 % d’économie possible sur le coût d’investissement d’un bâtiment ! Le choix du type de bâtiment ne joue que sur 15 à 20 % », faisaient alors remarquer les techniciens. Mais l’autoconstruction est très gourmande en temps (5 à 10 mois pour un bâtiment de 64 vaches sans compter les finitions), avertissaient les mêmes techniciens. Un choix pas toujours évident à concilier avec le travail quotidien de l’exploitation. Sans oublier que la taille des cheptels évolue toujours à la hausse et que la question de la main-d’œuvre constitue un problème grandissant en élevage allaitant.
Toutefois, l’autoconstruction peut se concevoir à différents degrés. Le marché propose des produits qui se prêtent à ce choix : murs ou murettes préfabriqués, bâtiments en kit, tunnels, multichapelles…

Du photovoltaïque pour en financer un bout


La production d’électricité photovoltaïque est un autre moyen de "financer" le coût d’un bâtiment. Dans une simulation récente, le centre de gestion et de comptabilités AS 71 calcule qu’une toiture photovoltaïque, grâce à sa production d’électricité, pourrait permettre de financer 70 % du montant d’un bâtiment de surface équivalente (lire article dans ce même dossier). L’équivalent de la charpente grosso modo. Dans le département, quelques éleveurs ont saisi l’opportunité de bâtiments "gratuits", mis à disposition par des exploitants de toitures photovoltaïques qui proposaient un abri gratuit dont l’éleveur peut disposer, moyennant les aménagements adéquats. Si le photovoltaïque peine à se développer pour l’heure, certains continuent de penser que les toitures agricoles représentent un véritable gisement si l’on y posait des panneaux photovoltaïques. Pour les agriculteurs, ce serait un bon moyen de financer leurs coûteux bâtiments d’élevage. Cela offrirait également une plus-value inestimable en termes d’image : les éleveurs deviendraient des producteurs d’énergie verte !



Plein air

Parc stabilisé d’hivernage : piste à creuser


Le plein air est, de prime abord, la solution la plus économe pour hiverner des animaux. Pas de bâtiment, pas de paille… Il faut juste prévoir une consommation de fourrage supérieure et des conditions de travail moins confortables. Dans les faits, le plein air semble plus adapté à des situations bien particulières. Il faut des terrains très portants et drainants, de type montagnes granitiques par exemple, avec des abris naturels. En Saône-et-Loire, les adeptes du plein air optent souvent pour une race rustique (Aubrac, Salers…) pour une conduite spécifique avec vêlages d’automne.

Depuis trois ans, la ferme de Jalogny teste des parcs stabilisés d’hivernage. Le parc stabilisé d’hivernage (PSH) est un parc à ciel ouvert dont le sol a été empierré et qui reçoit une litière de paille, copeaux de bois ou autre. Les deux PSH aménagés par la ferme de Jalogny sont équipés d’abreuvoirs et de râteliers à fourrages et ils sont délimités par une clôture électrique. Les parcs sont utilisés pour affourager les animaux. Ils évitent la formation de bourbiers préjudiciables au confort des animaux et aux conditions de travail de l’éleveur. Si les bovins ont en principe libre accès à la pâture, ils peuvent être temporairement fermés sur le parc, le temps que la parcelle « se refasse ». Le coût d’un PSH serait environ le tiers de celui d’un bâtiment classique et ce mode de logement en plein air serait nettement moins gourmand en paille. Associé à un pâturage hivernal, il fait également économiser du fourrage. Mais l’économie ne serait réelle qu’à condition qu’il n’y ait pas besoin de récupérer les jus. Les responsables de la ferme de Jalogny se sont donnés pour objectif d’établir si des PSH pourraient « légalement » être utilisés en Saône-et-Loire et sous quelles conditions.




Modernisation des bâtiments d’élevage

Il y a encore des besoins


Au niveau Bourgogne, le rythme annuel de modernisation se situait entre 10.000 et 15.000 UGB par an. En Saône-et-Loire, le rythme moyen s’est maintenu aux alentours de 180 dossiers par an de 2005 à 2008. En 2011, il restait encore 100.000 UGB mal logées en Bourgogne, soit 10 % du cheptel total. Des bovins qui étaient abrités dans des bâtiments vétustes ou alors en plein air non choisis.


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